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gée tous les six, neuf ou douze ans. Ailleurs, comme dans quelques communes du gouvernement de Moscou, on s’est arrêté à une période décennale ; ailleurs encore, comme chez les Grands-Russes du gouvernement de Voronège, les terres ne sont soumises à un nouveau partage que lors des revisions ou dénombrements des âmes assujetties à la capitation[1]. Ces revisions (revisii), qu’il ne faut pas du reste confondre avec nos recensements généraux, ont lieu à des intervalles irréguliers et jusqu’ici supérieurs à douze ou quinze ans. Depuis 1719, il n’y en a eu que dix et la dernière remonte à 1858. Dans les communes qui ne procèdent à une nouvelle distribution qu’aux époques de revision, il n’y a donc pas eu de répartition générale depuis l’abolition du servage ; il peut n’y en avoir pas d’ici à longtemps, n’y en avoir même plus jamais, si le gouvernement s’abstient de procéder à un nouveau dénombrement des paysans taillables, la capitation, l’impôt par âme, par tête de paysan mâle, ayant été supprimée sous l’empereur Alexandre III.

Le partage triennal avait sa raison d’être dans le mode de culture, le partage aux époques de revision, dans le système d’impôt. D’une revision à l’autre, en effet, le nombre des âmes, ou paysans mâles soumis à la capitation, demeurait invariable, quels que fussent les décès ou les naissances. On comprend que, pour la répartition des terres communales, l’on ait adopté les époques fixées pour la répartition de l’impôt. La commune était solidaire devant le fisc ; grâce à un nouveau partage, où chaque famille obtenait un lot proportionnel aux charges qu’elle supportait ou aux bras dont elle disposait, l’impôt, qui, d’après la loi, pesait sur les personnes, se trouvait indirectement ramené à un impôt sur les terres.

Les fatales conséquences des fréquentes répartitions du

  1. D’après les Materialy, publiés par le ministère des domaines en 1880, ce serait la règle chez les paysans de la couronne du gouvernement de Kazan.