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coupoles de l’église de Vassili sont un symbole de la condition de l’étranger alors en Russie ; au lieu d’imposer aux Russes ses goûts et ses coutumes, il était obligé de prendre les leurs.

Avec des artistes, Ivan III appelait des artisans de toute sorte, fondeurs, orfèvres, mineurs, maçons, artificiers. Ainsi, dès le premier jour de l’imitation étrangère, se trace le chemin que suivra Pierre le Grand ; c’est par le côté matériel, technique, industriel, que la Russie se rapproche d’abord de l’Europe. Comme Pierre Ier, Ivan III et Ivan IV se soucient plus de former leur peuple aux arts mécaniques qu’à la science ou aux beaux-arts, Après Ivan III, Vassili IV, marié à une Lithuanienne, non content d’appeler les étrangers, va, pour plaire à sa femme, jusqu’à prendre leurs usages et à couper sa barbe. Sous Jean IV, Ivan le Terrible, la Moscovie entre par Archangel en relation avec l’Angleterre ; c’est ce prince qui, malgré les moines, introduit l’imprimerie en Russie. Il envoie en Europe des émissaires lui rassembler d’habiles ouvriers ; mais la plupart sont retenus au passage par la jalousie militaire de l’ordre Teutonique et la jalousie marchande des villes anséatiques, qui, dans l’intérêt des armes ou du commerce allemands, tentent de mettre la Russie en interdit.

La période des usurpateurs compromit l’influence européenne en l’exagérant. Sur le point de régner en Russie avec le faux Dmitri ou les voiévodes polonais, les étrangers parurent menacés d’être chassés avec eux. Les Romanof semblaient devoir être peu favorables à la civilisation de l’Occident. Une réaction nationale les avait portés au trône ; le premier souverain de leur maison, Michel, avait été éduqué dans un couvent par une mère devenue religieuse, et c’est son père Philarète, devenu patriarche, qui gouverna l’empire en son nom. Cette dynastie, de sang russe et d’origine presque sacerdotale, prit à tâche de res-. taurer les vieilles mœurs ; elle n’en contribua pas moins à jeter en Russie les semences de la culture européenne