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la culture, il a d’abord fallu en chasser les nomades. Les Scythes et tous leurs congénères finno-turcs étaient des peuples pasteurs qui, avec leurs chariots et leurs troupeaux, menaient dans les steppes, en deçà du Volga et du Don, la vie que leurs frères kirghiz mènent encore au delà. Tous ces peuples, si redoutés de l’Occident et si vite disparus de l’histoire, étaient aussi peu nombreux que les tribus d’Asie de même race, qui conservent aujourd’hui le même genre d’existence. Une famine, une épidémie, une bataille suffisait pour les anéantir. Ils se détruisaient les uns les autres sans presque laisser d’autres vestiges que leur nom. C’est dans la moitié méridionale de la Russie qu’il faut chercher les traces de l’élément scythe ou tatar, et c’est de l’Ouest et du Nord, c’est des régions boisées que sont sortis peu à peu, et pour ainsi dire sous nos yeux, les habitants actuels de la Russie méridionale.

Grande a été l’influence des Tatars, mais plutôt historique qu’ethnologique ; elle a tenu à la conquête plutôt qu’à la fusion des races. Pour repousser un préjugé vulgaire, il ne faut pas cependant se jeter dans l’excès opposé : la part des Tatars dans la formation du peuple russe a été minime ; elle n’a pas été nulle. Sur plus d’un point, il y a eu mélange entre les tribus turques et les tribus slaves d’où sont sortis les Russes, — sur les bords du Dniepr, lorsque les princes de Kief recueillaient les débris des Polovtzi ou des Petchénègues, — sur le même fleuve, sur le Don, sur le Volga, parmi les Cosaques qui, en paix comme en guerre, furent souvent en étroites relations avec leurs voisins et ennemis musulmans. Quoi qu’il en soit, l’influence ethnique des Tatars, dans les régions mêmes du Sud, est demeurée inférieure à celle des Finnois dans les régions du Nord, d’autant plus que les Tatars eux-mêmes ont souvent été croisés de Finnois.


Les Turcs de Russie ont subi tant d’alliages que, au point de vue physique, il est impossible de les réunir sous un