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de Dieu, telle que tu l’exposes, ne soit contraire aux croyances des aïeux. Il n’importe guère, en somme, que tes raisons soient meilleures ou pires que celles d’Apollodore. Mais il faut songer à la patrie. Rome doit à sa religion ses vertus et sa puissance. Détruire nos dieux, c’est nous détruire nous-mêmes.

— Ne crains pas, ami, répliqua vivement Gallion, ne crains pas que je nie d’une âme insolente les célestes protecteurs de l’Empire. La divinité unique, ô Lucius, que connaissent les philosophes, contient en elle tous les dieux comme l’humanité contient tous les hommes. Les dieux dont le culte a été institué par la sagesse de nos aïeux, Jupiter, Junon, Mars, Minerve, Quirinus, Hercule, sont les parties les plus augustes de la providence universelle, et les parties n’existent pas moins que le tout. Non certes, je ne suis pas un homme impie, ennemi des lois. Et nul plus que Gallion ne respecte les choses sacrées.