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gile comme font les potiers. Il ne se borna pas à façonner de ses mains un couple unique. Trop prévoyant et trop industrieux pour se résoudre à faire sortir d’une seule semence et d’un seul vase toute la race humaine, il entreprit au contraire de fabriquer lui-même une multitude de femmes et d’hommes, afin d’assurer tout de suite à l’humanité l’avantage du nombre. Pour mieux conduire un travail si difficile, il modela d’abord séparément toutes les parties qui devaient composer les corps aussi bien mâles que féminins. Il fit autant de poumons, de foies, de cœurs, de cerveaux, de vessies, de rates, d’intestins, de matrices, de vulves et de pénis qu’il était nécessaire et fabriqua enfin avec un art subtil et en quantité suffisante tous les organes au moyen desquels les humains pussent parfaitement respirer, se nourrir et se reproduire. Il n’oublia ni les muscles, ni les tendons, ni les os, ni le sang, ni les humeurs. Enfin il