Page:Anatole France - Pierre Nozière.djvu/326

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Les visions du fermier Nicolazic n’ont rien de singulier. Avant lui Jeanne d’Arc, après lui le maréchal-ferrant de Salon, qui fut conduit à Louis XIV, et plus récemment le laboureur Martin de Gallardon eurent des hallucinations semblables et reçurent d’un personnage céleste une mission particulière. Comme Jeanne, comme le maréchal-ferrant, comme Martin, le fermier de Keranna résista d’abord à la voix du ciel, alléguant sa faiblesse, son ignorance, la grandeur de la tâche. Mais la dame de la fontaine insista ; sa parole devint plus impérieuse. Les prodiges se multiplièrent. Il y eut des lueurs soudaines, des pluies d’étoiles. Quand on étudie d’un peu plus près les hallucinés qui crurent avoir une mission, on est frappé de la similitude, je dirais même de l’identité de leur état psychique et des actes qui en résultèrent. Nicolazic, obsédé par une idée fixe, alla trouver le recteur de Pluneret, qui le reçut fort mal et le renvoya rudement à son seigle et à ses bêtes. Le visionnaire ne se laissa pas décourager et il finit par triompher de tous les obstacles. Ce Nicolazic était un homme simple, ne sachant ni lire ni écrire et ne parlant que le breton.

Il est aussi impossible de douter de sa sincé-