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et les exactions de toutes sortes, il n’y a pas beaucoup à craindre que cette menace soit suivie d’effet ; et nous trouverons longtemps encore des ministres d’État et des gouverneurs de provinces pour faire nos affaires. Seulement je voudrais bien qu’il en vînt d’autres à la place de ceux-ci. Les nouveaux ne pourraient être plus mauvais que les anciens, et qui sait si même ils ne seraient pas un peu meilleurs ?

— Prenez garde, dit M. Roman, prenez garde ! Ce qu’il y a d’admirable dans l’État, c’est la suite et la continuité et, s’il ne se trouve pas au monde un État parfait, c’est, à mon sens, qu’au temps de Noé, le déluge jeta du trouble dans la transmission des couronnes. C’est un désordre dont nous ne sommes pas encore bien remis aujourd’hui.

— Monsieur, reprit mon bon maître, vous êtes plaisant avec vos théories. L’histoire du monde est pleine de révolutions ; on n’y voit que des guerres civiles, tumultes, séditions causés par la méchanceté des princes,