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Il est certain du moins que M. l’abbé Coignard, en admettant les principes chrétiens et catholiques, ne s’interdit pas d’en tirer des conclusions très originales. Sur les racines de l’orthodoxie, son âme luxuriante fleurit singulièrement en épicurisme et en humilité. Je l’ai déjà dit : il s’efforça toujours de chasser ces fantômes de la nuit, ces vaines terreurs, ou, comme il les appelait, ces diableries gothiques, qui font de la vie pieuse d’un simple bourgeois une espèce de sabbat mesquin et journalier. Des théologiens l’ont, de nos jours, accusé de porter l’espérance à l’excès, et jusqu’au dérèglement. Je retrouve ce reproche sous la plume d’un éminent philosophe[1]. Je ne sais

  1. M. Jean Lacoste a écrit dans la Gazette de France du 20 mai 1893 :

    « M. l’abbé Jérôme Coignard est un prêtre plein de science, d’humilité et de foi. Je ne dis pas que sa conduite ait toujours honoré son petit collet et que sa robe n’ait pas reçu maint accroc… Mais s’il succombe à la tentation, si le diable a en lui une proie facile, jamais il ne perd confiance, il espère par la grâce de Dieu ne plus rechuter et arriver aux gloires du Paradis. Et de fait il nous donne le spectacle