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l’usage des écrivains. Sur la muraille, un frère mendiant avait peint jadis, dans la manière de Giotto, les Maries au pied de la Croix. Sous cette peinture, une tablette de bois, sombre et luisante comme les poutres des pressoirs, portait des livres, dont les uns étaient sacrés et les autres profanes, car fra Mino étudiait les poètes antiques, afin de louer Dieu dans tous les ouvrages des hommes, et il bénissait Virgile pour avoir prophétisé la naissance du Sauveur, lorsque le Mantouan dit aux nations : Jam redit et Virgo.

Sur le rebord de la fenêtre, une tige de lys s’élançait d’un vase de faïence grossière. Fra Mino se plaisait à lire le nom de la sainte Vierge écrit en poussière d’or dans la coupe des lys. La fenêtre, ouverte très haut, n’était pas large ; mais l’on y voyait le ciel au-dessus des collines violettes.

S’étant enfermé dans ce doux tombeau de sa vie et de ses désirs, Mino s’assit devant l’étroit pupitre, surmonté d’une double tablette, où il avait coutume de se livrer aux études. Et là, trempant son roseau dans l’écritoire attachée au flanc du casier qui renfermait les