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— Je ne te crois pas.

Elle se révolta :

— Je vous ai tout dit. Accusez-moi, condamnez-moi, mais ne m’offensez pas dans mon amour pour vous. Cela, je vous le défends.

Il secoua la tête :

— Laissez-moi. Vous m’avez fait trop de mal. Je vous ai tant aimée que toutes les douleurs que vous auriez pu me donner, je les prendrais, je les garderais, je les aimerais ; mais celle-là est hideuse. Je la hais. Laissez-moi, je souffre trop. Adieu.

Droite, ses petits pieds fixés au tapis :

— Je suis venue. C’est mon bonheur, c’est ma vie que je dispute. Je suis âpre, vous le savez. Je ne m’en irai pas.

Et elle redit tout ce qu’elle avait dit. Violente et sincère, sûre d’elle, elle expliqua comment elle avait rompu le lien déjà si lâche et qui l’impatientait ; comment, du jour où elle s’était donnée dans le pavillon de la via Alfieri, elle n’avait été qu’à lui, sans regrets, certes, sans un regard, sans une pensée égarés. Mais, en lui parlant d’un autre, elle l’irritait. Et il lui criait :

— Je ne vous crois pas !

Alors elle recommença de dire ce qu’elle avait dit.

Et tout à coup, d’instinct, elle regarda sa montre :