Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/110

Cette page a été validée par deux contributeurs.

les honneurs. C’était sa maison. Il lui montrerait les bolides. On en conservait là de superbes.

Elle ne savait pas du tout ce que c’était qu’un bolide. Mais elle se rappela qu’on lui avait dit qu’on voyait au Muséum des os de renne travaillés par les premiers hommes, des plaques d’ivoire sur lesquelles étaient gravés des animaux dont la race est depuis longtemps perdue. Elle demanda si c’était vrai. Lagrange ne souriait plus. Il répondit avec une indifférence maussade que ces objets concernaient un de ses confrères.

— Ah ! dit madame Martin, ce n’est pas votre vitrine.

Elle s’apercevait que les savants ne sont pas curieux et qu’il est indiscret de les interroger sur ce qui n’est pas dans leur vitrine. Il est vrai que Lagrange avait fait sa fortune scientifique des pierres tombées du ciel. Cela l’avait amené à considérer les comètes. Mais il était sage. Depuis vingt ans il ne s’occupait plus guère que de dîner en ville.

Quand il fut parti, la comtesse Martin dit à madame Marmet ce qu’elle voulait d’elle.

— Je vais la semaine prochaine à Fiesole, chez miss Bell, et vous venez avec moi.

La bonne madame Marmet, le front placide sur des yeux fureteurs, garda un moment le silence, refusa mollement, se fit prier et consentit.