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de 93, et que l’État laïque ne lui avait pas demandé ses raisons[1].

Dès lors, que fait le ministre des Cultes de l’État français en nommant un évêque, sinon pétrir l’argile épiscopale, fournir la matière plastique d’un évêque ? Seul, le souffle du Souverain Pontife peut animer cette argile, et lui donner une âme sacramentelle. Le ministre des Cultes le sait. Aussi est-il inquiet de voir sa créature demeurer inerte et comme une forme sans esprit, en attendant l’institution de vie. Il est vrai qu’il en était de même sous l’ancien régime, et que le Pape refusait parfois d’instituer les évêques du roi. Mais le roi trouvait que c’était un abus intolérable. La Constitution civile du clergé avait pourvu à cette difficulté.

Pie VII remportait donc de grands avantages et, si, en échange, il avait accordé plus qu’il n’aurait dû, il pouvait alléguer qu’il avait cédé à la force et fait pour le bien de l’Église des concessions toujours révocables.

Le Concordat fut proclamé loi de la République le 18 germinal an X. Cette loi comprenait, en outre du Concordat proprement dit, les articles organiques du culte catholique. On y avait joint aussi les articles organiques des cultes protestants, pour que, en dépit du préambule qui reconnaissait le catholicisme comme

  1. Ces conséquences ont été exposées avec force et clarté par M. A. Debidour, dans un livre excellent, qui m’a été très utile : Histoire des rapports de l’Église et de l’État en France de 1789 à 1870, par A. Debidour, 1898.