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jettent bas, par leur imprudence ou leur maladresse, une œuvre qui s’élançait de haut vol ? Est-ce que nous aussi, comme le légionnaire de César, nous ne sommes pas saisis de trouble et d’angoisse à cette pensée que notre sort n’est pas assuré par notre propre valeur, mais qu’il dépend de ceux qui combattent avec nous ?

— C’est la vie, cela ! dit Constantin Marc. En toute entreprise, partout et toujours, nous payons pour les fautes des autres.

— Il n’est que trop vrai, reprit Meunier, qui venait de voir tomber son drame lyrique de Pandolphe et Clarimonde. Mais cette iniquité nous révolte.

— Elle ne doit nullement nous révolter, répliqua Constantin Marc. Il y a une loi sacrée qui gouverne le monde, à laquelle nous devons obéir, que nous devons adorer, c’est l’injustice, l’auguste, la sainte injustice. Elle est bénie partout sous les noms de bonheur, fortune, génie et grâce. C’est une