CHAPITRE VI
Des grains de pluie et de grêle se succèdent avec rapidité ; un brouillard épais voile l’horizon. De l’arrière du navire, on aperçoit à peine la partie de l’avant. Bientôt la mâture craque, les voiles se déchirent, fouettent avec bruit et sont emportées par l’ouragan.
La voix du vent secoue dans la tumultueuse étendue d’aigres sifflements, et par instant éclate en détonations répétées. Sous la pression du vent les vagues s’élèvent, bondissent, retombent lourdement. Les voiliers, menacés d’aller à la côte, n’ont que deux moyens d’échapper au naufrage : louvoyer au risque de se coucher sur l’eau pour ne plus se relever, ou mouiller s’il est possible que l’ancre trouve fond. Malheureusement les courants, la dérive, la grosse mer, les mâts qui se cassent, rendent trop souvent le louvoyage impossible, et quand les lames sont soulevées par un impétueux vent du large, il est encore plus douteux que les ancres puissent tenir bon.
« Tel bâtiment, à l’ancre dans une baie bien fermée, est plus exposé que celui qui fuit, emporté par la tempête, à travers les solitudes de l’Océan. Aussi les cœurs des marins eux-mêmes s’émeuvent-ils profondément alors qu’ils aperçoivent une voile aux prises avec une brise violente qui tend à la jeter au rivage.