CHAPITRE XVI
Bien avant l’organisation des sociétés de sauvetage, il y a eu des gens de cœur toujours prêts à hasarder leur vie pour sauver celle de leurs semblables. Bien plus : on a vu des populations entières chez qui l’instinct, la passion du dévouement a constitué comme une seconde nature. Tels sont les habitants d’une des îles de notre littoral armoricain qui a vu le plus de naufrages.
L’île de Sein est située sur la côte la plus à l’ouest de Bretagne, à deux lieues de la pointe de rochers escarpés appelée Bec du Raz, qui forme l’extrême avancée dans la mer de notre littoral français. Cette île environnée d’écueils, séjour des rafales et des ouragans, est-elle là au milieu d’une mer si souvent furieuse pour offrir à la tempête — auxiliaire et complice — les arêtes noires de ses rochers ? Est-elle là, au contraire, avec sa population de sauveteurs comme un secours toujours prêt ? Elle est l’une et l’autre.
Tous pêcheurs de profession, tous à la mer dès leur enfance, et habitués à affronter les dangers que présentent les écueils qui les environnent, ces braves marins deviennent des pilotes expérimentés, et les services qu’ils ont rendus aux navires qui fréquentent ces parages sont inappréciables. Que dire de l’intrépidité qu’ils montrent quand il s’agit d’arracher à la mort l’équipage d’un navire en détresse ?