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C’est l’heure où, dans son nid, se blottit l’hirondelle ;
Où vers les hauts glaciers revient à tire-d’aile,
Riche de son butin, l’aigle au vol foudroyant ;
L’heure où la sombre nuit, égrenant les étoiles,
Comme une broderie, attache à ses longs voiles
          Son écrin flamboyant !

Viens ! nous irons joyeux, les deux mains enlacées,
À travers les taillis dont les branches cassées
De feuilles et de fleurs jonchent l’étroit chemin ;
Je cueillerai pour toi la sauvage anémone
Que tu pourras demain, en tressant ta couronne,
          Mêler au blanc jasmin.

Viens ! je pourrai revoir sur ta bouche mi-close
Ce sourire enivrant où mon baiser se pose,
Où pour puiser l’amour sans cesse je reviens,
Et ton œil me dira, dans son ardente flamme,
Ce que jamais encor aucuns regards de femme
          N’auront su dire aux miens !…

Nous irons écouter, sous l’épaisse ramure,
De tous les bruits du soir le ténébreux murmure
Arrivant jusqu’à nous par l’espace affaibli ;
Et tous deux, nous berçant dans notre rêverie,
Nous mettrons un instant, si tu le veux, Marie,
          L’univers en oubli !