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AMÉLIE

ma figure, il m’embrassa plus tendrement encore, et me pria de me remettre, en m’assurant que, quelque chose que j’eusse à lui apprendre, rien ne pourrait altérer la tendresse qu’il avait pour moi.

Je ne savais que lui dire, et j’étais d’avis de forger une histoire pour me sauver la honte de raconter ce qui m’était arrivé ; mais je craignais qu’à l’air embarrassé que je montrerais sans doute, il ne s’aperçut que je le trompais encore et ne me retirât ses bonnes grâces, dont je sentais tout le besoin ; je me déterminai donc à lui dire la vérité, quoiqu’il dût m’arriver, et je lui fis le récit fidèle de ma malheureuse aventure.

Pendant ce récit, qu’il écoutait avec la plus grande attention, je suivais tous ses mouvements pour y découvrir l’impression qu’il faisait sur lui ; j’eus la satisfaction de m’apercevoir qu’il était vivement affecté, et quand j’eus fini, il me remercia de ma complaisance, avec tant de bonté, que je me sus bon gré de ma franchise.

Il ne put en dire davantage pour le moment, parce qu’on vint annoncer que le souper était servi. Mais aussitôt que nous fûmes seuls, il remit la conversation sur ce qui nous avait d’abord occupés, et en me prenant la main qu’il couvrit de baisers, il me dit, du ton le plus expressif, qu’il n’avait plus qu’un désir, celui de me tenir lieu du trop malheureux Georges. Cet aveu, auquel cependant je m’attendais, me ren-