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due, suivant les vues de Mœhler[1], au travail général des esprits et à la fermentation des opinions religieuses excitée par l’apparition du Christianisme. C’est surtout en Syrie et en Égypte, où cette fermentation existait depuis longtemps, qu’elle se propagea, en prenant la forme systématique prédominante dans ces régions, celle de l’émanation et du platonisme en Égypte, celle du dualisme et du docétisme[2] en Syrie.

Nous trouvons déjà tes germes du docétisme dans les idées de Philon, dont le dieu suprême, comme le dieu secondaire, purs esprits, ne peuvent se manifester dans le monde qu’en prenant, non une forme réelle et substantielle, mais une apparence vide et fantastique. On peut encore diviser les systèmes gnostiques selon la prédominance de l’idée païenne, judaïque ou chrétienne sur la Divinité. D’après cela, la première forme principale du gnosticisme est celle où le Christianisme est, à la vérité, considéré comme la Religion absolue, mais sans opposition radicale entre lui, le judaïsme et le paganisme, qu’on envisage, au contraire, comme les degrés nécessaires d’un même développement progressif (tel est le gnosticisme de Basilide, Valentin, Saturnin et Bardesane). Dans la deuxième forme, le Christianisme se sépare rigoureusement du judaïsme et du paganisme, et son Dieu est tout différent du Dieu des autres (telle est la doctrine de Marcion). La troisième forme, enfin, résulte d’un mélange de Christianisme et de

  1. Le christianisme releva avec tant d’énergie, vers le monde spirituel, l’esprit humain, qui avait si longtemps végété dans la région des sens et des passions terrestres, que beaucoup de chrétiens outre-passèrent les bornes du vrai et tombèrent dans un extrême contraire : ils prirent à dégoût le monde visible, qui, pour eux, devint le mal même. Pour résoudre les difficultés doctrinales qui s’élevaient en grand nombre, on s’adressa aux vieux systèmes de philosophie, de théosophie, de mythologie de l’antiquité.
  2. Saturnin, Basilide, Valentin, Cerdon et Marcion enseignèrent le docétisme après Simon le Magicien et Ménandre. Les principaux points dogmatiques du docétisme, conformes à ceux du gnosticisme, sont : 1o Le Christ, l’æon, qui délivre de la matière ou du mal, n’avait que l’apparence d’un corps ; il apparaissait aux yeux par une sorte d’illusion d’optique ; 2o son corps était formé d’une substance éthéro-céleste ; ou 3o il pouvait se servir d’un corps étranger comme d’un organe qu’il s’appropriait.