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l’âge à ne plus agir au dehors, il ne cessait pas de répéter à son troupeau fidèle le mot le plus profond de la vie intérieure : « Mes petits enfants, aimez-vous les uns les autres[1]. » Son grand âge semblait aux yeux de plusieurs confirmer la tradition qu’il ne mourrait pas[2], quand, sous le règne de Trajan [v. 100], il expira, au milieu de ceux qu’il avait aimés jusqu’à la fin, calme, paisible[3], heureux d’avoir vu, de ses yeux, l’Église du Christ répandue sur toute la surface du monde connu.

§ 61. — Fin des temps apostoliques.

Avec saint Jean[4] nous nous séparons des apôtres et des temps apostoliques. Le Seigneur est sans doute toujours miséricordieux, et sa grâce et sa puissance se manifestent continuellement dans ses élus ; mais désormais ce n’est plus par la plénitude des miracles que sa grâce se répand sur la terre comme au temps où l’Évangile fut annoncé par ceux-là mêmes qui avaient vécu avec le Christ, Fils du Dieu vivant. La prudence humaine sera trompée dans tous ses calculs ; la sagesse du monde ne sera plus qu’une dérision. Une doctrine qui humilie l’orgueil par ses mystères, qui mortifie les sens, qui réprouve le désir des biens terrestres, qui condamne toute espérance mondaine, qui impose l’abnégation, qui prédit la persécution et ne promet que des joies invisibles ; une doctrine prêchée par des hommes illettrés et ignorants, par des Galiléens méprisés ; cette doctrine nouvelle, étrange… on l’écoute ! et le Juif se dépouille de l’orgueil des enfants d’Abraham et de Moïse, il renonce au royaume terrestre du Messie ; l’Hellène abandonne les colonnes du Portique, les ombrages de l’Académie et se fait disciple du Galiléen ; le Romain oublie le Capitole et s’humilie avec joie ; le païen délaisse ses idoles complaisantes pour se soumettre à la loi sévère de l’abnégation et de la pénitence. Il n’y a plus qu’un peuple

  1. Hieronym. Comm. ad Galat. (Opp. ed. Martianay, t. III, p. 314).
  2. Jean, XXI, 22.
  3. Euseb. Hist. ecclesiast. III, 1,31 ; Hieronym. de Viris illustr. c. 9.
  4. Rauscher. Hist. de l’Église, t. I, p. 236.