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Au dire de Tertullien et d’Épiphane[1], il n’aurait vécu que du temps d’Adrien. Sa patrie est aussi incertaine que l’époque de sa vie ; on est assez d’accord pour le compter parmi les anciens judaïsants les plus rigoristes[2]. Sa doctrine est un mélange de Judaïsme et de Christianisme ; elle se rattache à l’idée des Alexandrins sur un Dieu suprême, être mystérieux, sans rapport avec le monde visible ; elle admet l’émanation ; elle pose le monde comme créé par un être subordonné au grand Être, par un ange[3] ; c’est un ange qui a donné la loi de Moïse ; c’est un ange que les Juifs adoraient sous le nom de Jéhovah. Jésus est comme pour les Ébionites, qu’un homme remarquable par sa sagesse et sa piété ; à son baptême, le Logos suprême (Κριστὸς πνεῦμα Θεοῦ, πνεῦμα ἅγιον (Christos, pneuma Theou, pneuma hagion)) est descendu, sur Jésus sous la forme d’une colombe et a rempli son âme. C’est lui qui a révélé le Père, inconnu jusqu’alors ; c’est lui qui opère des miracles, ce qui constitue l’œuvre de la Rédemption. Mais ce Logos a de nouveau quitté Jésus, et l’homme seul a souffert et est ressuscité, le Logos, tout spirituel, ayant dû rester impassible[4]. Il est étonnant (car c’est une véritable inconséquence) que Cérinthe, malgré ses idées fausses sur le Créateur du monde et l’auteur de la loi mosaïque, ait cependant tant insisté, en s’appuyant de l’exemple de Jésus, sur l’accomplissement de certaines parties de cette loi[5]. Cérinthe et ses partisans n’admettaient des livres du Nouveau Testament que l’Évangile de saint Matthieu ; ils haïssaient surtout les écrits de saint Paul et de saint Jean. Cérinthe opposa à ce dernier apôtre un livre qu’il prétendait inspiré, comme le reste de ses opinions erronées, et qu’il appela son Apocalypse[6]. Il pensait, comme les

  1. Tertull. de Præscr. c. 48, p. 252 ; Εpiphan. Hær. XXVIII, 1, t. I, p. 110, Cf. Paulus, Historia Cerinthi (Introd. in Nov. Testam. cap. selectiona. Jen., 1799).
  2. Epiph. Hær. XXVIII, 2. Philostrius (Ev. de Brescia vers 887), de Hæresib. c. 36. (Galland. Biblioth. t. VII, ed. J. O. Fabricii. Hamb., 1724 et autres fréquentes éditions.)
  3. Iren. Contra hær. I, 26, n. 1. A virtute quadam valde separata et distante a principalitate, quæ est super universa, etc., III, 11. Epiphan. Hær. XXVIII, 1. Ὑπ' ἀγγέλων (Hup’ aggelôn). Cf. Theodoret, Hæret. fab. II, 1-3.
  4. Iren. et Epiph. I. Cit.
  5. Déjà, Epiph. Hær. XXVIII, 2, blâme cette inconséquence.
  6. Euseb. Hist. ecclesiast, III, 28.