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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS GRAINES

Cajan. — Cajanus indicus, Sprengel. — Cytisus Cajan, Linné.

Cette Légumineuse, très souvent cultivée dans les pays tropicaux, est de la nature des arbustes ; mais elle fructifie dès la première année, et dans quelques pays on aime mieux la cultiver comme une plante annuelle. Ses graines sont un article important de la nourriture des nègres ou des indigènes, tandis que les colons européens ne les recherchent guère, si ce n’est pour les manger avant maturité, comme nos petits pois.

La plante se naturalise avec une grande facilité dans de mauvais terrains, hors des cultures, même aux Antilles, d’où elle n’est certainement pas originaire[1].

À l’île Maurice, elle se nomme Ambrevade ; dans les colonies anglaises, Doll, Pigeon-Pea, et dans les Antilles anglaises ou françaises, Pois d’Angola, Pois de Congo, Pois pigeon.

Chose singulière, pour une espèce répandue dans les trois continents, les variétés ne sont pas nombreuses. On en signale deux, basées uniquement sur la couleur jaune ou teintée de rouge des fleurs, qui ont été regardées quelquefois comme des espèces distinctes, mais que des observations plus attentives ramènent à une seule, conformément à l’opinion de Linné[2]. Le petit nombre des variations obtenues, même dans l’organe pour lequel on cultive l’espèce, est un indice de culture pas très ancienne. C’est cependant ce qu’il faut chercher, car l’habitation préculturale est incertaine. Les meilleurs botanistes ont supposé tantôt l’Inde et tantôt l’Afrique intertropicale. M. Bentham, qui a beaucoup étudié les Légumineuses, croyait en 1861 à l’origine africaine, et en 1865 il inclinait plutôt vers l’origine asiatique[3]. Le problème est donc assez intéressant.

Et d’abord il ne peut pas être question d’une origine américaine. Le Cajan a été introduit aux Antilles de la côte d’Afrique par la traite des nègres, comme l’indiquent les noms vulgaires déjà cités[4] et l’opinion unanime des auteurs de flores américaines. On l’a porté également au Brésil, à la Guyane et dans toutes les régions chaudes du continent américain.

La facilité avec laquelle cet arbuste se naturalise empêcherait, à elle seule, d’accorder beaucoup de poids au dire des collecteurs, qui l’ont trouvé plus ou moins spontané en Asie ou en Afrique, et de plus ces assertions ne sont pas précises. Généralement elles sont accompagnées de doutes. La plupart des

  1. De Tussac, Flore des Antilles, vol. 4, p. 94, pl. 32 ; Grisebach, Fl. of brit. w. Ind., 1, p. 191.
  2. Voir sur cette question Wight et Arnott, Prodr. fl. penins. ind., p. 256 ; Klotzsch, dans Peters, Reise nach Mozambique, 1, p. 36. La variété à fleur jaune est figurée dans Tussac, l. c. ; celle à fleur colorée de rouge, dans le Botanical register, 1845, pl. 31.
  3. Bentham, Flora Hongkongensis, p. 89 ; Flora brasil., vol. 15, p. 199 ; Bentham et Hooker, Gen., I, p. 541.
  4. De Tussac, Flore des Antilles ; Jacquin, Obs., p. 1.