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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS FRUITS

siècle, et le silence des anciens auteurs sur la Chine montre que l’introduction y est moderne. Rumphius[1] l’avait vue dans les jardins de l’archipel asiatique. Les Malais l’appelaient Tomatte ; mais c’est un nom américain, car C. Bauhin désigne l’espèce comme Tumatle Americanorum. Rien ne fait présumer qu’elle fût connue en Europe avant la découverte de l’Amérique.

Les premiers noms donnés par les botanistes, au XVIe siècle, font supposer qu’on avait reçu la plante du Pérou[2]. Elle a été cultivée sur le continent américain avant de l’être aux Antilles, car Sloane ne la mentionne pas à la Jamaïque, et Hughes[3] dit qu’elle a été apportée du Portugal à la Barbade, il n’y a guère plus d’un siècle. Humboldt regardait la culture des Tomates comme ancienne au Mexique[4]. Je remarque cependant que le premier ouvrage sur les plantes de ce pays (Hernandez, Historia) n’en fait pas mention. Les premiers auteurs sur le Brésil, Piso et Marcgraf, n’en parlent pas non plus, quoique l’espèce soit aujourd’hui cultivée dans toute l’Amérique intertropicale. Nous revenons ainsi, par exclusion, à l’idée d’une origine péruvienne, au moins pour la culture.

De Martius[5] a trouvé la plante spontanée dans les environs de Rio-de-Janeiro et de Para, mais échappée peut-être des jardins. Je ne connais aucun botaniste qui l’ait trouvée vraiment sauvage, dans l’état que nous connaissons, avec ses fruits plus ou moins gros, bosselés et à côtes renflées ; mais il n’en est pas de même de la forme à petits fruits sphériques, appelée L. cerasiforme dans certains ouvrages de botanique et considérée, ce me semble[6], avec raison, dans d’autres ouvrages, comme appartenant à la même espèce. Celle-ci est sauvage sur le littoral du Pérou[7] à Tarapoto, dans le Pérou oriental[8] et sur les confins du Mexique et des États-Unis vers la Californie[9]. Elle se naturalise quelquefois dans les déblais, près des jardins[10]. C’est ainsi probablement que l’habitation s’est étendue, du Pérou, au nord et au midi.

Avocatier. — Persea gratissima, Gærtner.

L’Avocat, Alligator pear des Anglais, est un des fruits les plus

  1. Rumphius, Amboin., 5, p. 416.
  2. Mala peruviana, Pomi del Peru, dans Bauhin, Hist., 3, p. 621.
  3. Hughes, Barbadoes, p. 148.
  4. Humboldt, Nouv.-Espagne, éd. 2, vol. 2, p. 472.
  5. Flora brasil., vol. 10, p. 126.
  6. Les proportions du calice et de la corolle sont les mêmes que dans la Tomate cultivée, mais elles sont différentes dans l’espèce voisine, L. Humboldtii, dont on mange aussi le fruit, d’après de Humboldt, et qu’il a trouvée sauvage dans le Venezuela.
  7. Ruiz et Pavon, Flor. peruv., 2, p. 37.
  8. Spruce, n. 4143, dans l’Herbier Boissier.
  9. Asa Gray, Bot. of California, 1, p. 538.
  10. Baker, Flora of Mauritius, p. 216.