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SUR TALONS ROUGES

elle, tandis qu’elle tournait son regard du côté de la lune. Il ne put retenir un cri :

— Asolane !

Elle frémit, elle marcha vers lui sans paraître le voir.

— Oui ! Asolane… Je suis l’âme errante d’Asolane… Est-ce toi, Aldo ?… As-tu pardonné, Aldo ?…

Mattacchione tressaillit. Il voulut s’élancer vers elle, mais ce sentiment de crainte le retint encore.

— Aldo !… Aldo !… voilà plus de sept siècles que je suis malheureuse, et tant que je ne t’aurai trouvé, tant que tu ne m’auras pardonné, un mauvais sort affligera les épouses des Venador, puisque les Albori m’ont répudiée. Par ma faute, par mon amour coupable pour le Comte Fiore, je possède leurs corps durant leur sommeil et les torture, en me torturant moi-même, jusqu’à obtenir ton pardon… Aldo, toi seul peux m’ouvrir les portes du Paradis, toi seul peux sauver ces pauvres femmes de toutes les transes qu’elles souffrent !

Mattacchione alla doucement vers elle.

— Me voici !

Il s’avança, les mains tâtonnantes comme s’il était aveugle. Sa main la toucha ; ce toucher avide le fit tressaillir ; il aurait voulu fuir… Trop tard… Elle était cramponnée à son bras ; elle lui passa la main dans les cheveux, le long des épaules, elle lui découvrit la poitrine. Mattacchione fit une prière et recommanda son âme à la Madone.