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LES FANTAISIES DE VESPASIEN

on ne sait d’où, et cela lui permettait d’épier les attitudes du bel inconnu.

Vespasien d’un geste lui fit comprendre qu’il mourait de faim. La petite vierge plongea la main dans une petite boîte carrée et lança quelques noisettes que Vespasien attrapa au vol. Et cette charmante entrevue fut égayée de petits cris aigus et de marivaudages. Mais l’idylle commençait à peine. Quand les élancements de la faim furent apaisés et que les noisettes eurent produit leur effet de restauration, Vespasien mima à sa belle tout un poème lyrique. La petite vierge en fut d’abord paralytiquement intimidée. Elle vit cependant la sincérité, la bonne foi de son soupirant et sans être encore tout à fait rassurée, la frayeur se modifia en violente émotion, ce qui la fit trembler comme une feuille de pistachier. Voici ce qu’en gestes éloquents, lui dit le tendre soupirant :

« Tu me plais, je ne sais te dire pourquoi, je suis même trop échauffé pour en comprendre la cause. Peut-être ne le comprends-tu pas non plus. Mais je subis un charme qui ne doit pas t’être étranger et comme je me sens attiré vers toi, tu dois te sentir attirée aussi ! C’est si naturel de se caresser un peu. Allons, viens ma mignonne, viens plus près pour qu’il se passe la chose la plus naturelle du monde ! »

La petite vierge, lentement, avec une certaine réserve, s’approcha de Vespasien qui l’attendait de ses deux bras tendus et de ses dix petits doigts follement agités. Il poussa un soupir assez expressif et lui passa