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SUR TALONS ROUGES

« Ma chère enfant,

« Je vous envoie le Marquis Perez Pablo de Llerena Loñogo. Il est très riche. Écoutez sa prière. N’oubliez pas le Couvent des Sept-Douleurs. »

« Diego. »

Juana se leva et glissa ses pieds nus dans ses petites pantoufles.

— Je vais ouïr la volonté du Seigneur.

Elle s’agenouilla sur son prie-Dieu sans ménager ses ondoiements de hanches ; elle prit sur l’autel son petit miroir et passa du rouge et du bistre sur sa figure pour paraître belle aux yeux de Notre-Seigneur. Elle joignit les mains et s’abîma dans une profonde méditation. De ses yeux clos roulaient des larmes douces comme le pardon. Sa poitrine devint haletante et d’une voix entrecoupée, un peu lointaine et caverneuse, elle répétait à intervalles inégaux : « Je vois… Je vois… » Cela dura bien un quart d’heure. Elle se signa, essuya ses larmes et se tourna vers Don Perez dans une attitude de voyante.

— Perez, si tu veux la rémission de tes péchés, écris instantanément la Volonté du Ciel, que je vais te dicter.

Le Marquis, un peu tremblant, s’installa à un petit bureau marqueté, prit une feuille de papier blanc et une plume d’oie qu’il trempa dans l’encrier et qu’il secoua ensuite avec affectation.