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LE SALUT DU MAL

Doña Juana, accablée de chaleur, vaincue par la fatigue, s’assoupit…

Une main un peu grasse caressant ses bras nus la réveilla en sursaut. Tout contact physique la répugnait.

La duègne murmura chastement à son oreille :

— C’est moi, ce n’est que moi… Je viens vous annoncer que le Marquis Perez Llerena Loñogo désire vous voir. Il n’a qu’un mot à vous dire.

— Le vieux ? demanda Doña Juana. A-t-il assez de la vie ? Dites-lui que mon corps est toujours avide de caresses et qu’il est le bienvenu… Son âge d’ailleurs lui aura fait acquérir quelque expérience en agacements de l’amour.

Mais Doña Rosario se redressa, hautaine, et se drapa dans toute son aristocratique pudeur.

— Une fille d’hidalgo ne porte pas de tels messages.

Juana sourit d’un air moqueur.

— C’est vrai, j’oubliais votre rang… Dites au Marquis de Llerena Loñogo que je l’attends.

— Bien, Jota de mes délices.

La duègne plongea dans une svelte révérence et sortit en sautillant. Puis elle reparut pour introduire Don Perez et disparut discrètement.

Doña Juana, toujours immobile, fit signe au Marquis de s’asseoir.

Don Perez s’assit et prit un air affable ; le temps de composer une phrase galante.

Brusquement, elle appela :

— Rosario !