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SPRINGFIELD

nua d’expliquer ses pensées avec clarté et ordre.

— Ma venue à cette heure est une promesse que je tiendrai à l’avenir. Je vous en fais le serment devant Dieu. Je ne vous donnerai que de l’amour, je vous donnerai tout mon amour que le mariage m’aurait empêché de vous offrir complètement. Par contre, mon prochain mariage me permettra de m’abandonner toute à vous, comme je le désire et comme je l’entends.

Lord Jamland écoutait d’une oreille un peu distraite ces raisonnements si bien équilibrés et attirait doucement Lady Springfield vers son lit. Mais elle ne se troubla nullement pour si peu, et poursuivit son discours.

— Ne me croyez pas démente pour vous avoir défendu la porte de ma chambre et pour avoir en même temps forcé la vôtre. Si vous étiez venu me trouver cette nuit, j’eusse trouvé dans votre démarche un je ne sais quoi d’inconvenant, voire d’obscène, qui m’eût considérablement blessée. En venant chez vous, c’est différent. Demain, il vous semblera avoir fait un joli rêve, car vous me retrouverez telle que vous me quittâtes hier soir. Cet entretien, plus tard, dans votre esprit, et j’espère aussi dans votre cœur, prendra la forme d’une vision dont le souvenir vous sera cher. Et maintenant, Wentworth, me voici. Vous croyez à mes paroles : je souhaite ne pas me tromper et veux bien avoir confiance en vous. Je désire que ma hardiesse vous semble sublime, et que pour cela vous n’oubliiez pas dans vos transports que je suis une jeune fille.