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SUR TALONS ROUGES

sommet de la montagne était-il désert, et le ciel sans nuages ? Cette tache lumineuse sur les mains était bien extraordinaire !

Ceretti regarda autour de lui. Il se vit sous une énorme cloche de verre à facettes prismatiques qui faisaient converger toute la lumière du soleil en un seul point : sur ses mains. Cette lumière était particulièrement chaude, mais pas brûlante. C’était une sensation presque agréable, une sensation peut-être débilitante, mais il ne lui déplût pas de s’y abandonner.

À mesure que le soleil marchait dans le ciel, la tache lumineuse se déplaçait en sens inverse insensiblement de ses poignets sur ses mains, de ses mains sur ses doigts, de ses doigts sur les doigts, les mains et les poignets du Chevalier. Et, en même temps, Ceretti dominé par le regard de l’autre, se sentait progressivement fléchir, engourdir avec inconscience et indifférence.

Alors le mystérieux apothicaire sortit d’une poche profonde, une grande paire de ciseaux qui scintilla au soleil.

Ceretti entendit sans trop bien réaliser, la voix du Chevalier :

— L’Éthérique… l’Astral seulement…

L’apothicaire approcha la pointe des gros ciseaux près des mains de l’artiste et se mit à couper dans le vide. Les pointes cliquetaient si près, si près, que Ceretti crut à une double amputation. Mais les ciseaux avec insistance coupaient tout autour des poignets