Page:Allais - Deux et deux font cinq (2+2=5).djvu/49

Cette page a été validée par deux contributeurs.

deux bouteilles de soda… Quel soda détenez-vous, ici ?

— Mais… le meilleur ! Du schweppes !

— Ah ! Seigneur ! Éloignez de moi ce calice ! Du schweppes !… Certainement, le schweppes n’est pas une marque dérisoire de soda, mais auprès de celui que fabrique mon vieux old fellow Moonman de Fall-River, le schweppes-soda n’est qu’un fangeux, saumâtre et miasmatique breuvage !… Enfin… Donnez-nous tout de même du schweppes !

— … Dit mon père, hugolâtrai-je.

C’était fait ! Nous n’avions plus qu’à lamper notre drink, largement, comme font les hommes libres, forts, rythmiques et qui ont la dalle en pente…

… Quand le gérant eut l’à jamais regrettable idée de nous apporter des chalumeaux.

La combativité de Cap n’en demandait pas davantage.

— Ça, des pailles ! fit-il avec explosion.

— Mais, monsieur…

— Non, ça, ça n’est pas des pailles ! C’est de la paille, et de la paille périmée, sortant de dessous — saura-t-on jamais ? — quelles innommables vaches ! Je n’ai point accoutumé à boire en des étables. En allons-nous, mon ami, en allons-nous !

Cap jeta sur le marbre de la table une suffisante pièce de cent sous, et nous partîmes vers le prochain mastroquet, où nous nous délectâmes à la joie d’une chopine de vin blanc, un peu de gomme et un demi-siphon !