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À MONSIEUR ROUDIL

Moi, je suis un type dans le genre de Flaubert, et vous n’en saurez point davantage.

Mais ce que vous ne devez pas ignorer, monsieur Roudil, c’est ce qui advint quand, revenus de la place du Trône et la jeune femme en allée, je réglai mon fiacre devant la caserne du Prince-Eugène, qu’on appelle maintenant caserne du Château-d’Eau, parce qu’elle se trouve place de la République.

Je remis ma pièce de cinq francs au cocher.

Ce dernier la contempla à la lueur de sa lanterne, s’assurant qu’elle n’était point de provenance moldovalaque ou qu’elle n’arrivait pas de ces républiques hispano-américaines mal cotées, en ce moment, sur le marché des pièces de cent sous en argent.

Ayant constaté que mon dollar était un honnête Louis-Philippe, il le mit dans sa poche, disant goguenard :

— Ça fait le compte.

— Comment, ça fait le compte !

— Bien sûr que ça fait le compte !

— Comment cela ?

— Eh ben oui !… quarante sous de sapin…

— Et puis ?

— Et trois francs de chambre.

Alors, enveloppant sa maigre rosse d’un vigoureux coup de fouet, il piqua des deux et disparut à l’horizon.

Vous savez, mon cher Roudil, ce qui vous reste à faire.