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MARIAGE, CONCLUSION


p. 591 sq ; surtout que les enfantfl et jeunes ^ens reçoivent une éducation qui les prépare aux charges, aux obligations, aux sacrifices <lu mariage. E. Jordan, Religion et natalité, p. 10-67 ; P. Bureau, L’Indiscipline p. 171-170. L’objet de l’Association du mariage chrétien est d’insister sur la nécessité de cette préparation et de la diriger. De nombreux ouvrages de direction .spirituelle ont été publiés sur ce sujet au cours de ces dernières années. Voir notamment ceux de l’onssagrives, Knoch, Fôrster, plus récemment :.1. Viollet, Éducation de la pureté et du sentiment, Paris, 1925, et les divers livres périodiques, comptes rendus de Congrès publiés par l’A. M. C. (HO, rue de Gergovie, Paris).

On le voit, le catholicisme admet et permet la conciliai ion de l'économie et de la morale. Les vues de Malthus, bien loin de menacer ses prescriptions et ses conseils, en vérifient la bienfaisance. II a ton jouis considéré comme état supérieur la virginité et, en fait, il a facilité ainsi l'équilibre des familles pendant de longs siècles. En imposant pour but primordial aux époux la procréation, il y ajoute l’obligation très stricte d'éduquer les enfants, leur fixant ainsi une limite, celle des forces et des ressources rigoureusement indispensables pour cette fin. « Pas de nombre obligatoire, car pas plus que le célibat, la continence entre époux n’est en elle-même condamnable, pourvu qu’elle résulte du consentement exprès ou tacite, peu importe, mais mutuel et libre des deux intéressés. Elle vaut ce que valent les motifs qui l’inspirent. Elle pourra être, selon les cas, obligatoire, louable, légitime, plus ou moins critiquable. » E. Jordan, Contre la dépopulation, p. 18. Ce que l'Église condamne, c’est l'égoïsme et ce sont les licences contraires à la dignité individuelle et au bien social. « Il ne faudrait pas que la prévoyance devînt du calcul, ni les espérances une spéculation basse ou usurière. » Cardinal Mercier, op. cit., p. 15.

La même considération des fins du mariage dicte aux catholiques leur attitude en face de l’eugénisme. La société peut-elle condamner à une existence. contre nature, en leur infligeant un traitement incompatible avec les droits de la personne humaine, les êtres moins vigoureux dont il n’est d’ailleurs point sûr qu’ils ne procréeront pas des enfants sains ? Ici encore, c’est l'éducation morale qui pourrait et devrait inciter les faibles à observer la continence. Le Prêtre et la Famille, septembre-octobre 1926, p. 252 sq.

La doctrine très élevée de l'Église est donc défendue avec force. Mais il serait injuste et imprudent de méeonnaître la qualité et les rapides progrès de ses adversaires et l’extrême gravité d’un conflit où l’avenir de la famille, des sociétés, des idées morales est en jeu.

Conclusion. — Comment les théologiens ont approfondi les paroles divines, peu à peu reconnu tous les aspects du mariage, nous avons essayé d’en rendre compte. Depuis les origines du christianisme jusqu'à nos jours, la croyance fondamentale n’a point changé : le mariage est un sacrement institué par Dieu pour procurer à la famille les grâces nécessaires. Puisque l’on a montré chez les premières générations chrétiennes cette croyance, il n’est point permis d’y voir un fruit de la spéculation théologique.

Ce qui a occupé, souvent divisé les théologiens, c’est l’explication de ces vérités. Le goût des raisonnements infinis et des analyses subtiles a, pendant de longues périodes, conduit et maintenu les docteurs en des voies obscures : la dialectique leur a caché des vérités élémentaires. Au xue siècle, on ne parle guère de la grâce, et l’idée pessimiste de la concupiscence retient de classer le mariage au rang de l’eucharistie ou du baptême dans rénumération septénaire des sacre ments. Le même abus des analyses compliquera au

xiiie siècle et pour longtemps la théorie du signe, de la matière et de la forme, du ministre, de l’institution divine, des rapports entre le sacrement et le contrat. D’où les controverses, dont nous avons montré la portée pratique, l’intérêt historique, et dont le cycle est achevé. L'ère des grands débats de la théologie dogmatique semble close. La définition très pré du contrat-sacrement ne laisse plus qu’un champ étroit aux conflits d’opinions.

Le temps des divergences et des querelles intestines est passé, la tâche des théologiens n’est plus tant d’expliquer le signe ou la « race que de maintenir et défendre les principes du mariage chrétien que le monde moderne s’efforce de ruiner. Du domaine surnaturel ou ils se cantonnaient jadis, les révolutions religieuses les mil ramenés au terrain de la lutte engagée entre les nouvelles morales et l'Église, et qui met en présence non plus des écoles de commentateurs, mais deux conceptions de la vie. L’union des sexes a-t-elle pour fin principale, et certains disent exclusive. le bonheur de l’individu, ou bien le sacrifice des égoïsmes au profit de la société, l’apaisement de la concupiscence ? Exaltation de l’individualisme ou soumission de l’individu à des lois divines ? Le problème présent pourrait être posé dans ces termes généraux, et toute la doctrine catholique du mariage, aussi bien la doctrine du signe et de la grâce que celle des caractères et des buts du mariage, implique et exalte le renoncement des époux à l'égoïsme, à la liberté absolue qui est le dogme des plus résolus adversaires de l'Église. Les temps nouveaux assignent donc aux moralistes et aux sociologues la place éminente qui, naguère, appartenait aux scolastiques. Le dogme est défini dans des formules précises. Peut-être la grande affaire, aujourd’hui, est-elle d’en montrer aux chrétiens toute la richesse morale et aux incroyants la bienfaisance, la haute dignité.

1. On trouvera au début des principales subdivisions une bibliographie méthodique. Pour permettre au lecteur de traduire rapidement l’abréviation : op. cit., nous donnons ci-dessous la table de ces bibliographies. — Ouvrages généraux (Esmein, Freisen, etc.) : col. 2123, 2127 sq. — Sources littéraires de l'époque classique (et notamment, œuvres des scolastiques entre 1180 et 1500) : col. 2163 sq. — Théologiens de la première moitié du xvr siècle : col. 2229 sq. — Théologiens et canonistes depuis le concile de Trente jusqu’au pontificat de Pie VI (15631775) : col. 224 !) sq. — Théologiens du xixe siècle : col. 2284 sq. — Traités canoniques du mariage parus depuis le Code : col. 22n4.

2. Ouelques ouvrages sont cités à diverses reprises, qui n’ont pu trouver place dans ces bibliographies. Ainsi, G. Basdevant, dont le titrt » complet est indiqué col. 2261 ; J. Brys, col. 2162 ; Détrez, col. 2183 ; Falk, col. 2181 ; Gillmann, col. 2177 ; l.emaire, col. 2274 ; Martêne, col. 2170 ; Schmoll, col. 2168.

3. Pendant que cet article était sous presse, a paru la première partie de l’ouvrage, annoncé col. 2166, de J. Koch, Durandus de S. Porciano, O. P. Forschungen zuni Strcit uni Thomas von Aquin ru Bcginn des 14. Jahrhunderls. I. Teil. Literargeschichiliche Grundlegung, dans Beilràge ziir Geschichte der Philosophie des Miltelaliers, t. xxvi, Munster, 1927. Les conclusions des études du Rev. G. Lacombe, de Mlle Daguillon.de M. Maylan, mentionnées col. 21 65 et 2166, que nous connaissions par d’aimables communications du P. Chenu, du P. Théry et des auteurs eux-mêmes, ont été publiées dans les Positions des Thèses de l'École Nationale des Chartes, p. 59-66, 31-36, 89-94. L’ouvrage du Rev. Lacomhe sur Prévostin doit paraître bientôt dans la Bibliothèque thomiste du Saulchoir. Et aussi les deux études sur Llrich de Strasbourg et sur Philippe le Chancelier.

4. Voici quelques études toutes récentes : C. Michalski, Les courants critiques et sceptiques dans la philosophie du XIVe siècle, Cracovie, 1927 (cf. col. 2166) ; F. Degni, Del' matrimonio, Turin, 1926, t. i (compte rendu par Cappello, dans Gregorianum, 1927, p. 124 sq.) ; J. Blouet, Le Xéo-