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MABILLON

viiie siècle, la confession était depuis longtemps considérée comme nécessaire pour le pardon des péchés même secrets ; souvent la confession particulière se faisait en présence de plusieurs prêtres qui donnaient ensemble l’absolution au pénitent. Dom Tassin, op. cit., p. 226, sur la préface des Acta Sanctorum O. S. B., t. III, 1re partie.

6o Eucharistie. Présence réelle. — L’histoire de l’hérésie de Bérenger est présentée par Mabillon avec une grande exactitude ; il signale sa condamnation par divers conciles, les différents auteurs qui l’ont réfutée et enfin la conversion sincère de Bérenger en 1088. Dom Tassin et dom F. Le Cerf, op. cit., p. 234, 239, sur les Acta Sanctorum O. S. B., t. VI, 2e part., sur les Acta Sanctorum O. S. B., t. IV, et sur le t. II des Vetera Analecta.

Mabillon, au t. IV, 2e part., des Acta Sanctorum O. S. B., expose les disputes survenues entre Paschase Radbert abbé de Corbie et Bertran ou Ratramne un de ses religieux. Le livre de Paschase Radbert, écrit en 831, ne contient rien autre chose que la créance de l’Église catholique de son temps : sur l’autorité de saint Ambroise, il soutient que le corps de Jésus-Christ dans l’adorable mystère de l’eucharistie est le même qui est né de la vierge Marie. Cette façon de parler ne plaisait point à Hériger, abbé de Lobbes. Mabillon cependant fait voir que tel était aussi le sentiment de saint Ignace, martyr, dans son épître aux fidèles de Smyrne, de saint Chrysostome, etc. ; il ajoute dans une lettre du 11 mai 1689 à dom P. Thibault : « Touchant la question de l’eucharistie que j’ai traitée, je ne prétends pas avoir tout dit, ni même d’avoir expliqué les choses d’une manière qui ôte toutes les difficultés dans la contestation qui était entre Paschase et ses adversaires. Ces matières sont obscures et partant il est malaisé de les éclaircir entièrement. Elles sont délicates, c’est pourquoi on est obligé de les traiter avec beaucoup de modération et de retenue. Ç’a toujours été ma pensée que ces auteurs qui combattaient Paschase n’admettaient point la reproduction du corps ni de l’âme de Jésus-Christ, et qu’ils ne voulaient pas admettre une mêmeté individuelle entre le corps eucharistique et le corps naturel de Jésus-Christ. Pourquoi donc, me direz-vous, ne me suis-je pas expliqué de cela dans l’écrit que j’en ai donné au public ? C’est que je n’ai pas cru qu’il fût à propos de le faire d’abord… Sur cet article, et sur quelques autres, je me suis réservé de traiter quelque jour, si Dieu m’en donne le temps et le loisir, et si je vois que cela puisse être utile à l’Église. Car notre dessein ne doit pas être d’augmenter les difficultés touchant l’eucharistie : il n’y en a déjà que trop… Le sentiment qui soutient la reproduction dans l’eucharistie n’est pas aisé à trouver chez les anciens… Il aurait été à souhaiter que l’on s’en fût tenu à la sainte modération des anciens Pères, qui disaient que c’était le véritable corps de Jésus-Christ et que le pain et le vin étaient changés en sa substance. » Cette lettre est à la Bibl. Nat., ms. fr. 19659, fo 103. Elle a été publiée dans la Revue Mabillon, t. V, p. 75. On ne voit pas que Mabillon ait donné suite au projet dont il parle ici.

Ailleurs, dans son commentaire sur les Ordines romani, P. L., t. lxxviii, col. 899, Mabillon mentionne la doctrine très répandue au Moyen Âge d’après laquelle l’hostie consacrée, sanctifiait et consacrait le vin auquel elle était mêlée : « Quæ verba (dit le texte d’un vieux missel de Reims) nullum sensum videntur habere si calix ex contactu in sanguinem conversus non credatur…, à quoi Mabillon ajoute : In monasteriis etiam gallicanis plerisque vigebat eadem sententia. Mais il ne se prononce pas sur cette opinion qu’il signale en historien : il croit que Baronius exagère en laissant entendre que cette croyance était universelle. Dans le même commentaire, col. 896-898, Mabillon signale une autre théorie qui attribuait la consécration au Pater.

Le pain azyme. — Dans sa dissertation De azymo et fermentato, in-12, Paris, 1074, Mabillon soutient que le pain azyme ou sans levain était en usage dans l’Église latine avant le schisme de Photius, les preuves du P. Sirmond pour l’usage du pain levé n’étant pas sans réplique. Par là aussi, il s’éloigne du sentiment du cardinal Bona qui prétendait que les latins avaient employé indifféremment l’un et l’autre pain. Les arguments de Mabillon sont d’ordre historique, il les expose dans les c. vii-ix ; au chap. x, il résout les objections qu’on peut lui faire. Le chap. xi qui donne les conclusions se termine par cette phrase : fermenti usum apud Latinos asserendi (quod cum bona contra sententiam venia dictum velim) mihi sufficiens causa non videtur. En appendice, on trouve exposé le sentiment du P. Macedo, cordelier, où l’opinion du cardinal Bona est traitée d’hérétique : Orator, dit à ce propos Mabillon, mihi visus est vehementior quam causa postularet : intempestiva et personæ parum conveniens est tam incondita declamatio. Généralement, on a donné raison à Bona contre Mabillon (voir Dupin, Bibliothèque ecclésiastique du XVIIe siècle, t. V, p. 46).

Célébration de la messe. — Nous sommes redevables à Mabillon de quelques détails concernant la discipline ecclésiastique. Au viie siècle, est-il dit dans la préface du t. ii des Acta Sanctorum O. S. B., il y avait des prêtres qui disaient tous les jours la messe et qui en disaient quelquefois plusieurs en un même jour : le pape saint Léon II célébrait jusqu’à sept fois le même jour. Les évêques et les prêtres se contentaient quelquefois de communier.

Au viiie siècle, id., t. III a, l’esprit de l’Église était anciennement que les évêques et les prêtres célébrassent tous les jours, les saints mystères. Au xie siècle, id., t. VI b, un concile de Compostelle ordonne que tous les prêtres diront la messe tous les jours.

Communion sous les deux espèces. — Jusqu’à la fin du xiie siècle, la communion fut donnée aux laïques sous les deux espèces ; les hommes, jusqu’au ixe siècle, recevant l’hostie avec la main pour se communier. Acta Sanctorum O. S. B., t. III a. De même au xie siècle, on voit que la communion en viatique était donnée sous les deux espèces ; cependant on trouve aussi des cas où elle est donnée sous une seule.

7o Quelques points de morale. — 1. Sur le mensonge. — Mabillon nous a livré toute sa pensée dans la manière dont il se défendit quand ses frères en religion l’attaquèrent au sujet du t. I des Acta Sanctorum O. S. B. : « Nous ne devons pas avoir plus d’attache à notre ordre qu’à la foi catholique. Or saint Augustin fait voir excellemment bien, et c’est la doctrine de l’Église, que nous ne devons point commettre la moindre faute contre la vérité et contre la sincérité, quand il serait question de convertir par ce moyen les infidèles et les hérétiques. Car, comme dit fort bien ce grand homme, outre l’outrage qu’on ferait à la vérité, si l’on venait à découvrir notre mauvaise foi, tout le bien que nous aurions pensé établir sur ce faux principe s’en irait en ruine. Que si cela n’est pas permis dans le discours, il l’est encore bien moins dans les écrits que l’on donne au public avec préméditation et qui doivent demeurer dans la postérité. » Mémoire justificatif, publié dans Revue Mabillon, t. VI, p. 12.

C’est la même doctrine que nous trouvons dans une profession de foi de Mabillon, trop peu connue, dit Léop. Delisle, Dom Mabillon, sa probité d’historien, dans Archives de la France monastique : Mélanges et documents, t. V, p. 93, 94, et qui est empruntée à la