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M iu-ll flSME, l I MOI 'TAZIL18ME

agir ainsi, il doit protester Intérieurement contre le

mal triomphant et appeler sur les mauvaises pus tt les mauvaises nievurs la punition divine (Gold zihcrï.

On peut Juger comme on voudra ces principes, mau on ne peut certainement pas voir dans la secte qui les

n professes quoi que ee soit qui ressemble a Ce que nous appelons le libéralisme ou la tolérance. A une faible nuance près, et avec le courage en moins, la scission mou’taxilite était équivalente à la scission U.andjite Ie mot de inou’tazilisine n’est lui-même qu’un synonyme de khâridjlsme, et il n’est pas impossible que le premier soit au second comme le fdsiq du prunier au kâfir du second.

Jusqu’ici, nous remarquerons que les doctrines ont un caractère essentiellement musulman et une origine corai Ique, les deux autres principes sont inspires de la philosophie grecque et sont donc d'époque postérieure. Comment s’est faite la soudure ? Par une conception qui. sous sa forme primitive, a pris le nom de qadarisme et qui. plus tard. dans la langue des mou’tazilites, qui ont rejeté le nom de qadaristes que leur Infligeaient leurs adversaires, est devenu le principe de 'adl justice.

Il y a là une question de mots fort obscure, car le qadarisme est la doctrine de la prédestination et le mou’tazilisnie est résolument opposé à la prédestination. Kssaxons de voir clair dans cette confusion. L. mot qadar, dans le Coran, a le sens de convenance, de répartition conforme à l’ordre des clioses.de mesure. Par exemple (n, 237) : après le divorce, il est bon de constituer à la femme répudiée quelque pension, chacun suivant son qadar. c’est-à-dire suivant les convenances de son état. Tins souvent, il est dit que Dieu fait descendre l’eau sur la terre dans une proportion convenable, qadar. De même manière, il a crée toute chose. C’est que le plan de l’univers conçu par lui

id à un idéal d’harmonie et aussi de justice.

On comprend alors comment le principe du qadar coranique a pu évoluer vers le principe de justice. d’autant que le mot arabe, 'ode 1 invoque par le mou tazilisme postérieur signifie ordinairement : charge svn.ctrique et équilibrée des bêtes de sommes. De là l’idée de proportion et d'équilibre si voisine de celle du qadar coranique. Comment alors les adversaires ont-ils voulu voir dans ce dernier un synonyme de qadà, qui signifie décision » et a pris légitimement dans la langue théologique le sens de prédestination ? Et comment le < adarisme est-il devenu la négation du qadar pris dans ce second sens ? Lis mou’tazilites ont évidemment raison quand il renvoient ce nom à leurs adversaires partisans de la prédestination, donc du qadar tel qu ils l’entendent. On peut supposer que, quand ils combattirent lu prédestination, ils alléguèrent que le sens réel du qadar était non pas prédestination, mais ordre, c’est- ; -dire justice. Ils se posèrent donc en défenseurs de la véritable interprétation et leurs adversaires les traitèrent d’inventeurs d’un autre qadar, lequel conduisait, d’après eux, à un véritable dualisme. Le là cette parole qu’ils attribuaient au prophète : Les qadaristes sont les mages de cette ce n munauté. » En effet, la théorie mou’tazilite, refusant de croire que Lieu fût l’auteur du mal, voulait que l’homme eût une puissance spéciale, qoudra (mot de même racine que qadar) et, suite la faculté, de s’opposer à la volonté de Lieu, homme, en faisant le mal, se sert dune puissance Ile de Dieu, il y a donc deux puissances sées : c’est le dualisme des mages. A quoi les .'tazilites re pondent : si tous les actes des hon.mes I voulus par Dieu, il n’y a p : us de responsabilité, allant il v a injustice a les récompenser et à les punir. C’cst’donc en définitive le libre arbitre que

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proclament ces sectaires, et c’est ee qui leur a valu la tendresse de certains orientalistes modernes S’ils s’en étaient tenus là. ils auraient pu rallier

à eux les musulmans ; mais, probablement pour se

défendre du reproche île dualisme, ils créèrent leur

cinquième principe de l’unité absolue qui acheva

leur négation de toute réalité divine. Après avoir

refusé à Pieu la prédestination, ils en vinrent a lui

refuser toiil attribut Ils se heurtèrent, comme nous l’avons vii, à l’opposition absolue de l'école I anballtc

et finirent par avoir le dessous. Telle est, en bref, la doctrine des cinq principes. Nous

avons vu que trois dérivent de conceptions purement

musulmanes et apparentées sinon Identiques, à celles

des pl. listes les plus exallés. Les deux autres, en opposition avec l’esprit coranique et contenant des

spéculations philosophiques nouvelles, s’j rattachent cependant par une Interprétation spéciale du qadar

coranique.

' Histoire de la Stcte. — C’est, nous disent certains auteurs. 'Amrou ibn 'Oubaïd (80-144= 700-761) qui cria le qadarisme et qui, en se joignant à Wâsil partisan de la position intermédiaire, constitua le mou tazilisme. Mais il y a d’autres opinions, et il semble bien que, pendant un certain temps, on considéra comme distincts niou’tazililes et qadariles.

Au dire des docteurs de la secte, l’origine en remonterait à 'Ali, par Aboû Hâchim, le fils de ce Moulammad, que nous avons vu reconnu comme imâmmahdî par les keïsànites. Le mou’tazilisnie se concilie en cITet, fort bien avec le chiïsme. C’est par la secte ^eïditc, qui a encore des adhérents dans le sud de l’Arabie, que nous sont parvenus des écrits mou tazilites. Mais ceux-ci sont trop tardifs pour que nous puissions les opposer aux témoignages anciens. Nous en retenons seulement la prétention à l’orthodoxie que nous avons déjà plusieurs fois signalée et leur rattachement à l’islam primitif, vrai ou réel.

Après ces deux premiers fondateurs, il semble qu’il y ait une interruption et que la doctrine ait été reprise et renouvelée, probablement sur ses bases philosophiques, par Aboû Houdhaïl Mouhammad ibn Houdhaïl, surnommé al *Allâf. La date de sa naissance est inconnue ; sur sa mort il y a désaccord (entre 227 et 235 = 842 et 850). Les uns le font mourir à 150 ans, d’autres à 100 ou 105 ans. Il est sépare des deux fondateurs par plus d’un siècle, et si on lui a attribué un âge si extraordinaire, c’est probablement pour rapprocher plus étroitement 1'. ncienne et la nouvelle doctrine. Entre eux if y aurait eu un nommé Aboû 'Amrou 'Outhmân ibn KhâUd surnommé at Tavrtl, dont le rôle est obscur. Peut-être a-t-il été inventé pour constituer la chaîne orthodoxe ainsi énoncée dans un texte mou’tazilite très tardif : « Aboû Houdhaïl a reçu la doctrine de 'Outhmân al Tavil qui lavait reçue de Wi il et Aboû 'Amrou, lesquels la tenaient de 'Abd Allah (Aboû Hâchim) fils de Mouhammad de qui il l’avait reçue : Mou), ammad la tenait de son père 'Ali qui la tenait du prophète, qui ne professa point d’hérésie.

Ce néo-mou’tazilisme est souvent désigné par un nouveau nom : le kûlam ou parole, dont l’oiigine est assez controversée et qu’on pourrait traduire par : veri alisme. Le mou’tazilite devient alors, suivant la langue i ethnique un moutakallim « celui qui est versé dans l’art du kaldm. a-t-il entre ce mot kaldm et le raisonnement qu’il représente une parenté semblable a celle qui unit le J.ogos à la logique ? C’est possible. Ce qu’il y a de certain, c’est que les théologiens sommités empruntèrent plus tard, avec al A( h’arî, le mot et la chose. Mais à l'époque qui nous occupe et qui répond à la fin du règne de_ Ilaroûn achld, le nom ne convient qu’aux mou’tazililes.