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1369 LYON (1er CONCILE ŒCUMENIQUE DE). ŒUVRE DU CONCILE 1370

26 juin, est donnée à tort par les Annales Burtonenses, an. 1245, dans J. Fell, Rerum anglic. script., Oxford, 1684, t. i, p. 299, et par l’anonyme de Malmesbury, Eulogium historiarum, t. II, c. ci/vn, Londres, 1858, t. i, p. 278, comme accomplie au concile : elle le fut le 3e dimanche de l’avent, 16 décembre 1246. Cf. Martin, n. 1136. Sur une constitution du concile relative à l’élection du pape, cf. Potthast, Regesta, n. Il 732. On statua, au concile, que les cardinaux porteraient le chapeau rouge. Cf. Martin, n. 1068, 1111. L’institution d’une école de droit divin et humain, canonique et civil, Sexlus, t. V, tit. vii, can. 2, que Cabassut, Notitia ecclesiastica, p. 456, attribue au concile, paraît devoir se placer entre l’arrivée d’Innocent IV à Lyon et l’ouverture du concile. Cf. Martin, n. 1043.

Le concile ordonna-t-il l’abolition de certains ordres religieux ? Nous n’avons là-dessus que des renseignements qui ne semblent pas très sûrs. Cf. Martin, n. 1066. Il approuva la règle de Grandmont, dont le prieur, Guillaume Dongrcs, était présent, et soumit les cisterciens au paiement des dîmes ; pour le reste, certains évêques, notamment Robert Grossetête, de Lincoln, demandèrent en vain de réduire les privilèges de l’ordre de Cîteaux. Cf. Martin, n. 1062-1064. On a dit parfois que le concile avait condamné les cathares et autres hérétiques. Dans son édition de la Brevis nota, Binius, Concilia, Paris, 1636, t. vu b, p. 851, écrit : Papa quasdam constitutiones… quæ contra callaros facile fuerant et fecit legi. Mais caltaros est un texte fautif ; le vrai texte est Tartaros. Et la bulle bien connue d’Innocent IV contre les hérétiques est du 15 juin 1254. Cf. Martin, n. 1417.

2° La défense contre les infidèles et les schismatiques. Dans son discours d’ouverture, Innocent IV avait dénoncé la cruauté des Tartares, les progrès de l’islamisme et ceux des grecs schismatiques.

Les Tartares avaient envahi la Pologne, la Russie, la Hongrie, et divers territoires chrétiens. Le concile fit une constitution pour s’opposer à leur marche en avant (can. 16).

Deux autres furent promulguées afin de procurer rapidement à l’Empire latin de Constantinople et à la Terre sainte des secours nécessaires (can. 14, 15). Les Grecs schismatiques, en effet, s’étaient emparés de la région comprise jusqu’aux portes de Constantinople, et menaçaient la capitale môme. Quant à la Terre sainte, Jérusalem était retombée au pouvoir des infidèles (1244) et toutes les possessions chrétiennes étaient en péril. Pour libérer la Terre sainte, par une 3e constitution (can. 17), qui était une réédition à peu près textuelle de celle du IVe concile de Latran, le concile prescrivit la prédication de la croisade. Les clercs, à l’exception de certains ordres religieux et de ceux qui auraient pris la croix, y concourraient par l’offrande du vingtième (’Albert de Stade, Chronic. an. 1245, dans Mansi, ConciL, t. xxiii, col. 648, dit à tort : le cinquième » ), le pape et les cardinaux du dixième de leurs revenus,

3° La défense contre Frédéric II. — Des « cinq blessures », dont Innocent IV avait parlé en ouvrant le concile, la plus dangereuse, la blessure du cœur, était faite par Frédéric II, qui ne visait à rien de moins qu’à l’asservissement de l’Eglise. La tache principale du concile fui de déjouer les desseins de Frédéric II.

Innocent IV porta contre Frédéric II une sentence < ! e déposition. Voir la partie essentielle du text<

dessus, t. vu. col. 1983, 1 ! » 8t. Elle était motivé’quatre raisons. Frédéric avait multiplié les parjures en violant témérairement la paix entre l’Eglise et

l’Empire ; il s’était rendu coupable <ie sacrilège en faisant prisonniers les cardinaux, évoques et clercs, qui enaient au concile général convoqué par Grégoire IX : il était suspect d’hérésie pour son mépris de l’excom munication et son intimité avec les Sarrasins ; dans son royaume des Deux-Siciles, qu’il tenait en fief du Siège apostolique, il avait réduit à la misère et en esclavage des clercs et des laïques, forcé presque tous les honnêtes gens à s’expatrier et contraint ceux qui restaient à se déclarer contre l’Église, et, depuis plus de neuf ans, il n’acquittait pas de redevances au Saint-Siège.

Deux choses sont à remarquer dans ce document. D’abord, ce qui regarde les domaines temporels de l’Église. Deux fois avant d’être empereur, et une troisième fois après avoir reçu la couronne impériale, Frédéric, dit le pape, avait juré de garder autant qu’il le pourrait et de protéger en toute bonne foi les honneurs, les droits et les possessions de l’Église romaine ; ces possessions avaient été nommées et expressément désignées dans le serment. Or, il a violé ces trois serments non sine prodilionis nota et Isesse crimine majeslalis ; il a occupé, il détient des possessions de l’Église : la Marche, le duché de Bénévent, etc. ; il force les habitants à lui jurer obéissance au mépris de leur serment de fidélité au Saint-Siège. Contre ces usurpations

— et, en même temps, contre les autres excès de l’empereur — le pape applique les censures canoniques, non pas seulement des peines spirituelles, mais encore des peines temporelles allant jusqu’à priver de son sceptre le prince le plus puissant de la chrétienté. « Il faut convenir, remarque A. Theiner, / due concilii generali di Lione dcl 1245 c di Coslanza del 1414 intorno al dominio temporale délia Santa Sede, Rome, 1861, p. 22, que l’inviolabilité et la sainteté de la possession des domaines du Saint-Siège n’avaient jamais été sanctionnées aussi solennellement. » A ce point de vue apparaît une différence entre la revendication du domaine temporel de l’Église et celle de biens qui ne lui sont pas dus au même titre ; dans ce dernier cas, les réclamations pontificales sont moins énergiques. A la nie session, les ambassadeurs anglais protestèrent contre des privilèges arrachés, disaient-ils, par la curie romaine, au roi d’Angleterre, sans le consentement des grands du royaume, au temps de la lutte entre Henri II et Jean sans Terre son fils. En fait, le denier de Saint-Pierre, libéralement payé au pape par les rois anglo-saxons, avait « pris peu à peu la forme d’un tribut, et, par un acheminement naturel, le royaume chargé de cette redevance avait fini par être considéré… comme feudatairedu Saint-Siège, » dit P. Fabre, Étude sur le Liber ccnsuum de l’Église romaine, Paris, 1892, p. 145. Ce droit du Saint-Siège n’était pas de même nature que celui qu’il exerçait sur son domaine temporel. Quand les ambassadeurs demandèrent qu’il fût remédié à l’état des choses, le pape, nec oculos élevons nec vocem, nerbum non respondit. Ensuite, quand ces mêmes ambassadeurs se plaignirent de la mainmise de la cour romaine sur les bénéfices d’Angleterre, il répondit que t<m arduum negolium morosa indiguii dclibcratione. Matthieu Paris, p. 904. Ici donc il se contentait d’une réponse dilatoire.

La déposition de Frédéric II se rattache à la question du pouvoir de l’Église sur la société civile. Nous n’avons pas à la traiter pour le moment. Qu’il suffise de noter, avec L. Bail. Svutana conctltonun omnium. l’aris, 1672, t. I, p. 446, que cet acte non est aliqua dctrrminalio alicujus articuli fidei.

La déposition de Frédéric il fut embarrassante pour

llieans. qui déniaient au pape le droit de déposer les princes tout en admettant de tous points l’autorité du concile œcuménique. Ils s’en tirèrent en disant qu’elle était l’œuvre non du concile mais du

pape, Bossuet, Defetuto declar. clcri galltc, p. I. I. iv. c. viii, argua de ce fait que la sentence de déposition porte : sacre pressente concilia, non : tacro approbante