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puisqu’en 484, au dénombrement du clergé de Carthage, Victor de Vite mentionne quamplurimi lectores infantuli, loc. cit., P. L., t. LVHI, col. 246.

Le lectorat nous apparaît en somme comme l’ordre de début et de formation. « C’est par lui que commençaient les jeunes clercs ; ils demeuraient lecteurs jusqu’à l’âge adulte, nécessaire pour exercer les ordres supérieurs. La plupart des carrières ecclésiastiques dont on connaît le détail ojjt commencé par le lectorat. C’est le cas de saint Félix de Noie, de saint Eusèbe de Verceil, du père du pape Damase, des papes Libère, et Sirice, du diacre de Fiesole, Messius Romulus, de saint Épiphane de Pavie et de bien d’autres. » Duchesne, Origines du culte, p. 354. — Il faut remarquer cependant que tous les clercs ne passaient pas obligatoirement par l’ordre de lecteur ; ceux qui n’entraient dans le clergé qu’à l’âge adulte pouvaient être placés soit parmi les lecteurs, soit parmi les exorcistes : c’est ce que disent formellement les lettres que nous avons citées des papes Sirice et Zozime, ainsi que le Sacramentaire gélasien.

Actuellement, aucun âge n’est fixé non plus pour le lectorat. Mais l’Église exige pour la tonsure des conditions d’études telles qu’il faut nécessairement n’être plus un enfant, can. 976. Après la tonsure, il appartient à l’évêque de déterminer le délai qui doit s’écouler avant les ordres mineurs ou d’un ordre mineur à un autre, can. 978.

Qualités professionnelles.

Une certaine instruction

était nécessairement requise pour exercer d’une manière convenable les fonctions de lecteur. Cette instruction, il est naturel de penser qu’on l’exigeait de quiconque aspirait à recevoir cet ordre, et qu’après leur ordination, les jeunes lecteurs la complétaient, soit sous la direction d’un prêtre, soit dans les scholse lectorum, plus tard scholæ cantorum que l’on trouve dans certaines églises. Duchesne, Origines, p. 355, note ; Tixeront, L’ordre…, p. 96-97. Ils acquéraient à ce moment, non seulement l’art de bien lire, mais aussi cette connaissance plus approfondie des Écritures et des canons qui permettait d’aspirer aux ordres supérieurs.

Pour les fonctions propres au lecteur, il était nécessaire avant tout de savoir lire et bien lire. Le Pontifical romain le rappelle aux lecteurs comme un devoir de leur charge. Dans la monition préliminaire, l’évêque s’exprime ainsi : studete verba Dei… distincte et aperte, ad intelligentiam et œdificationem fldelium… proferre ; et dans l’invitation à prier qu’il adresse au peuple, il revient sur la même idée : quatenus distincte legant quæ in Ecclesia Dei legenda sunt. Il fallait, en effet, que la voix de celui qui lisait se fît entendre de tous les assistants. Pierre Lombard donne à ce sujet des conseils qui, dans sa pensée, s’adressaient surtout à ceux qui recevaient le lectorat, mais que doivent méditer et suivre tous ceux qui ont à parler en public ; et ce sont sans doute des conseils de même genre qui ont été de tout temps à la base de la formation des futurs lecteurs. Le Maître des Sentences déplore la manière lamentable dont certains lecteurs s’acquittent de leur office ; il décrit ensuite les qualités que requiert la lecture dont ils ont la charge : voix assez claire pour qu’elle parvienne aux endroits les plus éloignés de l’église, science des Écritures qui permette au lecteur de comprendre ce qu’il lit afin de le faire comprendre, connaissance de l’accentuation, prononciation distincte, lecture intelligente, qui distingue ce qui est indicatif de ce qui est interrogatif, qui place les pauses au bon endroit. » Quand on n’observe pas ces règles, ajoute Pierre Lombard, on ne se fait pas comprendre et on provoque la risée des auditeurs. » Sentent., lib. IV, de sacramentis, dist. xxiv, de ordine, n. 4

Qualités morales.

L’Église a toujours eu souci

de la valeur morale de ses clercs ; elle veut que ceux qu’elle distingue par le rang se distinguent par la vertu. Aussi dès le premier degré de la hiérarchie, a-t-elle voulu trouver déjà de sérieuses qualités morales, et elle a tout de suite rappelé la nécessité d’un effort constant pour que la vie soit digne de la fonction.

Elle exigeait du candidat des qualités morales. Saint Cyprien atteste qu’il avait coutume, avant chaque ordination, de consulter le clergé et le peuple et ainsi mores et mérita singulorum communi consilio ponderare. S’il fait exception à cette règle en faveur d’Aurélius et de Célérinus, c’est à cause des gages éclatants qu’ils ont donnés de leur foi et de leur vertu. Epist., xxxiii et xxxiv, P. L., t. iv, col. 325-333 ; Hartel, ep., 38, 39, p. 579-585. — Cette pratique de consulter le peuple semble avoir été à peu près générale ; pour le lectorat, cette consultation était même une véritable élection : n’étaient admis que ceux dont les suffrages avaient attesté la valeur. Aussi Pfe Sacramentaire gélasien fait-il dire à l’évêque, en parlant à celui qui va être ordonné : Eligunt te fratres tui, ut sis lector in domo Dei lui, P. L., t. lxxxiv, col. 1147 ; et il reste trace de cette pratique dans le Pontifical qui contient une formule semblable au début du monitoire de l’évêque : Electi… ut sitis lectores in domo Dei nostri. — Cette élection, peut-être un peu compliquée, se transforma dans la suite : les Statula Ecclesiæ antiqua supposent que l’évêque lui-même a choisi les futurs lecteurs ; mais il est censé faire ratifier son choix par le peuple en lui rendant compte < de la foi, de la vie, du caractère » de ceux qu’il va ordonner, n : 96, P. L., t. lvi, col. 888. — Plus net encore est le document grec, publié par Harnack dans les Texte und Untersuchungen ; il précise les qualités que doivent réunir ceux que l’on va élever à quelque dignité dans l’Église, et voici ce qu’il exige du lecteur : « On ne doit l’établir qu’après une sérieuse enquête ; il ne faut pas qu’il soit bavard, ni buveur, ni bouffon, mais de bonnes mœurs, docile, charitable, le premier à se rendre aux assemblées du dimanche ; il doit avoir une élocution nette et être capable de s’expliquer avec clarté, car il tient la place d’un évangéliste. » Loc. cit., p. 17-19.

Attentive à bien choisir les lecteurs, l’Église ne l’a pas été moins à leur rappeler qu’ils doivent se montrer dignes de leurs fonctions par une vie exemplaire. C’est le sens des prières et des avertissements qui accompagnent toujours l’ordination. Par exemple, dans le Pontifical romain, l’évêque recommande aux ordinants de croire et d’agir conformément à ce qu’ils liront, afin de convaincre leurs auditeurs par l’exemple en même temps qu’ils les instruiront par la parole ; il leur rappelle que, élevés sur l’ambon en vue du peuple, ils doivent être pour tous des modèles par l’élévation de leur vie ; il demande au peuple de prier pour que les lecteurs conforment fidèlement leurs actes à ce qu’ils auront lu ; toutes ces recommandations se résument dans la splendide formule de la prière qui termine l’ordination des lecteurs : benedicere dignare hos famulos tuos ut…et agenda dicant, et dicta opère compleant.

IV. Rites de l’ordination. — Le rite par lequel on plaçait quelqu’un au rang des lecteurs était une ordination. C’est le mot dont se sert déjà saint Cyprien pour annoncer la promotion du lecteur Aurélius : in ordinalionibus clericis. Epist., xxxiii, P. L., t. iv, col. 325 ; Hartel, ep. 38, p. 579.

De cette ordination, c’est l’évêque qui est le ministre en règle très générale. Saint Cyprien dit d’Aurélius qu’il a été ordonné par lui-même et par les collègues qui étaient présents, I.oc. cit., col. 320. Les Statuta Ecclesiæ antiqua attestent que c’est l’évêque qui ordonne le lecteur comme les autres clercs, P. L., t. lvi, col. 888,