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LUCQUES. ŒUVRES


vinciaux d’Orvieto (1300) et de Spolète (1303), ainsi qu’au chapitre général de Bologne (1302). Sa carrière conventuelle semble avoir été honorable, mais n’est pas autrement connue,

A partir de 1309, il est installé à demeure près la cour pontificale d’Avignon, attaché comme chapelain, d’abord à la maison du cardinal d’Albano, Léonard Patrasso, puis à celle du cardinal de Bayonne, Guillaume de Godin. Aucun témoignage contemporain n’atteste qu’il ait été, comme on l’a dit, bibliothécaire ou même confesseur des papes Clément V et Jean XXII. Toujours est-il que, par les hautes relations qu’il lui valut et par les documents qu’il lui permit de consulter, ce séjour en Avignon a grandement favorisé l’activité scientifique de Toloméo.

En 1318, Jean XXII le nommait évêque de Torcello, dans le ressort patriarcal de Grado. Il n’y fut pas heureux. Un conflit de juridiction à propos d’une élection d’abbesse, auquel s’ajouta bientôt le grief d’avoir dilapidé les biens de la mense épiscopale, le mit aux prises avec son patriarche, et lui valut une suspense, qui se changea bientôt en excommunication (1321). Après une assez longue résistance, le vieillard Unit par se soumettre et put terminer en paix ses derniers jours. Sa mort eut lieu vraisemblablement en 1326, ou, tout au plus, au commencement de 1327.

II. Œuvres. — Toloméo fut un écrivain fécond et varié, surtout si l’on ajoute aux ouvrages anciennement connus ceux que beaucoup d’historiens croient aujourd’hui pouvoir lui attribuer.

1° Œuvres historiques. — Les plus nombreuses et les plus connues de ses œuvres appartiennent à l’histoire ecclésiastique.

1. Ce sont tout d’abord des Annales brèves, qui résument sous une forme très succincte les principaux événements de 1061 à 1303. L’auteur y mêle à l’histoire des papes et des empereurs bien des épisodes d’intérêt local, d’après les Gcsla Florentinorum et Lucensium qu’il donne comme une de ses principales sources. Il s’étend davantage sur les faits de son temps, où il peut faire état de souvenirs personnels. Éditées d’abord à Lyon en 1619, puis de nouveau en 1677 dans la Bibliotheca Patrum, t. xxv, les Annales ont été insérées par L. Muratori dans la collection des Rerum italicarum scriptores, t. xi, p. 1245-1306, et enfin, avec un texte plus critique, par C. Minutoli dans les Documenti di storia italiana, Florence, 1876, t. vi, p. 1-113. Voir B. Schmeidler, Studien zu Tholomseus von Lucca, dans Neues Archiv der Gesellscha/t fur altère deutsche Geschichtskunde, 1908, t. xxxiii, p. 285-343.

2. Beaucoup plus importants et plus étendue est VHistoria ecclesiastica nova, en 24 livres, depuis la naissance du Christ jusqu’en 1294. Elle est prolongée par des biographies consacrées à Boniface VIII, Benoit XI et Clément V, dont Toloméo est aujourd’hui reconnu l’auteur. Des continuateurs anonymes y ajoutèrent plus tard la vie des autres papes d’Avignon. Ce qui est un indice du renom qui s’attachait dès lors à son ouvrage. Texte dans Muratori, op. cit., p. 754-1242. La vie de Clément V est aussi dans Baluze, Vitæ Paparum Avenionensium, col. 23-56. Voir D. Kônig, Ptolemœus von Lucca und die Flores chronicorum des Bernardus Guidonis, Wurzbourg, 1875, et, pour les dernières parties, G. Mollat, Étude critique sur les Vitse paparum Avenionensium d’Etienne Baluze, Paris, 1917, p. 1-21.

3. Cette grande histoire ecclésiastique devait être complétée, dans les intentions de l’auteur, par un Caialogus imperatorum, où seraient exposés les gestes des empereurs et sans doute aussi celles des rois de France. Il ne semble pas avoir été composé.

4. Elle avait été préparée par une Historia tripartila, à a}j3llj TolomJD renvois ses leiteurs, et qui succédait

elle-même à un projet A’Historia quadripartila. Cet ouvrage n’a pas survécu et l’on a fait de vains efforts pour en restituer le plan. Minutoli, op. cit., p. 23.

2° Œuvres doctrinales. — Un lot, moins considérable peut-être, mais non moins p é : ieu., d’ouvrages divers classe proprement Toloméo dans la catégorie des théologiens.

1. On connaissait de lui un Exæmeron seu de opère sex dicrum tractatus, resté longtemps introuvable. Il a été édité pour la première fois par P. T. Masetti, Bibliotheca thomistica, 1. 1, Sienne, 1880.

2. Mais son principal titre de gloire était jusqu’ici sa continuation du De regimine principum, laissé inachevé par saint Thomas d’Aquin.

Sur la foi de plusieurs manuscrits et de la critique interne, déjà l’érudition ancienne avait rétabli sans conteste que l’oeuvre originale du Docteur angélique s’arrête au c. iv du 1. II. Voir Quétif-Echard, t. i, p. 336-337, 543, et B. de Rubeis, dont les célèbres Dissertations sur les œuvres de saint Thomas sont reproduites dans l’édition de Parme, t. xvi, Dissert, iv : De opusc. De regimine principum, p. 500 505. Exposé très étendu et très minutieux de ce chapitre d’histoire littéraire et des positions diverses prises par la critique à son endroit par Ezio Flori, 77 trattato « De regimine principum » e le dottrine politiche di S. Tommaso, dans Scritti vari nel VI centenario délia canonizzazione di S. Tommaso d’Aquino, Milan, 1924, p. 134169.

Tout le problème était d’identifier l’auteur à qui est due la suite du livre II ainsi que les livres III et IV. On a voulu parfois attribuer l’œuvre entière à Gilles de Rome ; mais son traité du même titre est, en réalité, un ouvrage tout différent. Voir Gilles de Rome, t. vi, col. 1364-1365. Cette confusion, accréditée par C. Oudin, est définitivement écartée par De Rubeis, loc. cit., p. 504-505.

Comme indice il reste que deux anciens mss., décrits par Quétif-Echard, p. 336, et retenus par De Rubeis. p. 501, distinguent expressément les parties authentiques de la continuation et nomment Toloméo de Lucques comme auteur de celle-ci. Les différences alléguées par De Rubeis, p. 503 504, qui existent entre cet ouvrage et VHistoria ecclesiastica nova, n’empichent pas d’y reconnaître des ressemblances plus grandes encore et ne sauraient annuler, en tout cas, l’attestation formelle des manuscrits. Reprenant à son compte les objections formulées par De Rubeis, E. Flori s’élève contre la gia troppo tollerata tradizione, loc. cit., p. 168, et veut enlever le traité à Toloméo sans le rendre à saint Thomas. Ce n’est pas la fin seulement, mais l’ouvrage entier qui serait d’une autre main. L’avenir dira si cette solution radicale est appelée à prévaloir contre la i tradition » reçue jusqu’ici par la quasi-unanimité des historiens. Voir M. Grabmann, Die cchten Schriften des hl. Thomas von Aquin, Munster. 1920, p. 216-219.

Il n’y a pas davantage lieu de considérer, avec Echard, p. 543, la fin du livre II et les livres IIIIV comme deux ouvrages distincts. L’n seul auteur a composé le tout, et il y a toutes raisons de croire que cet auteur, comme on l’a vii, n’est pas autre que Toloméo.

On conçoit que les relations d’intimité qui l’unissaient à saint Thomas l’aient poussé à terminer l’œuvre incomplète de celui-ci. Peut-être eut-il sous la main pour cela quelques notes du maître lui-même. Mais il ne s’est aucunement préoccupé de suivre son plan, ni de reproduire ses idées. Cette fin du De regimine principum constitue, en somme, un ouvrage original, où, sous le couvert de saint Thomas qu’il se donne l’apparence de continuer, Toloméo expose ses conceptions personnelles sur l’ordre politique en général, livres II