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LUCIFER DE CAGLIARI. ECRITS

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pour travailler à y guérir les maux de l’Église. Le plus sûr moyen eût été de se rendre à la convocation d’Athanase qui rassemblait pour lors à Alexandrie un certain nombre de nicéens fidèles, pour étudier avec eux les décisions à prendre, tant au point de vue des formules doctrinales, qu’au point de vue des personnes. Touché par la convocation d’Athanase, Eusèbe, supplia sou compagnon de venir lui aussi à Alexandrie. Rufin marque expressément que Lucifer refusa de s’y rendre en personne, se contentant d’y envoyer deux diacres ; pour lui, il se rendit en droiture à Antioche, où sa présence ne tarda pas à compliquer une situation déjà fort embrouillée. Rufin, H. E., I, xxviii, P. L., t. xxi, col. 498 ; les historiens grecs, qui dépendent tous de Rufin, ne sont pas aussi précis, Théodoret III, ii, P. G., t. lxxxhi, col. 1089 ; Socrate, III, vi, Sozomène, V, xii, P. G., t. lxvii, col. 388 et 1249.

Ce fut un grand malheur. On dira à l’art. Mélèce quelle était au juste la position réciproque des divers partis religieux à Antioche. Lucifer n’hésita pas à se joindre aux catholiques les plus intransigeants, les eustathiens, délaissant la communion des orthodoxes qui se réclamaient de Mélèce, exilé pour la foi. Après des pourparlers qui n’aboutirent à rien, Lucifer, brusquant les choses, accorda au parti eustathien la satisfaction qu’il demandait et consacra comme évêque son chef, Paulin. Ainsi, du fait de Lucifer, il y aurait désormais à Antioche deux évêques catholiques rivaux : Paulin, le nouvel ordonné, et Mélèce qui rentrait d’exil. Or c’était tout le contraire de ce que décidait juste au même moment le synode réuni à Alexandrie. Athanase y avait fait tous ses efforts pour amener dans la capitale de l’Orient, la réunion des deux partis catholiques. Le Tome aux Aniiochiens pressait les anciens fidèles d’Eustathe, les adhérents de Paulin, de s’unir aux catholiques qui se réclamaient de Mélèce. Voir P. G., t. xxvi, col. 797. Porteur de cette pièce importante, Eusèbe de Verceil ne tardait pas à aborder à Antioche. Il y trouva la situation irrémédiablement compromise par la précipitation de Lucifer. L’évêque de Verceil connaissait trop bien le caractère de son ancien compagnon pour essayer de le faire revenir sur son erreur ; il ne dit rien, mais son attitude donnait à entendre qu’il réprouvait le geste de l’évêque de Cagliari : pudore et indignatione compulsus, abscessit neutri parti communionem suam relaxons, dit Rufin, ibid., xxx, col. 501, que Socrate et Sozomène, loc. cit., n’ont pas bien compris. Lucifer fut extrêmement blessé de l’attitude d’Eusèbe ; comme ses diacres avaient signé à Alexandrie le Tome aux Antiochiens, il n’osa pas s’élever ouvertement contre les décisions conciliaires, mais il n’en persista pas moins dans son idée de ne reconnaître que Paulin. Se sépara-t-il, dès ce moment, de la communion de ceux qui suivaient le concile d’Alexandrie ? Nous n’avons aucune preuve qu’il ait fait alors acte positif de schisme ; ce qu’il y a de certain, c’est qu’il prit à l’endroit des évêques qui se montraient favorables à la miséricorde une attitude’! ' bouderie qui aboutira finalement à le séparer de l’ftglisc catholique. Il rentra enSardaigneet, en route, se montra très violent, à Naples, contre l’évêque Zosime ; ensuite on perd complètement sa trace. Jérôme, dans sa Chronique, le fait mourir en 370 : Lucifer Caralitanus moritur, qui cum Grcgorio episcopo Hispaniæ et Philone Libyæ nunquam se arianic miscuit oravitati. P. L., t. xxvii, col. 505-506.

Il ne semble pas que Lucifer se soit jamais réconcillé avec l’Église catholique dont il avait fini par se rer. Cette attitude plus ou moins schismatique n’a pas empêché l’évêque de Cagliari de jouir en Sardaigne d’une certaine popularité. Que sa ville episcopale l’ait honoré comme s ; iint, cela n’a pas de quoi surprendre : que diverses crises de l’île lui aient été

dédiées, cela ne serait pas extraordinaire, encore qu’il y ait pu avoir confusion entre l’évêque du ive siècle et un évêque postérieur, ou même un saint Luxore, une autre illustration de la Sardaigne. En 1623, on prétendit avoir découvert à Cagliari le tombeau même de Lucifer, en des circonstances bien faites pour éveiller les soupçons. Voir tout le détail dans les Acta sanct., mai, t. v, Anvers, 1685, p. 210* sq. Sur quoi l’évêque de Cagliari, A. Machini, adressa au pape Urbain VIII une Defensio sanctitalis beali Luciferi, 1639. Mais il y eut des contradicteurs. Voir la liste dans la préface des Coleti, P. L., t. xiii, col. 759. Le pape Urbain VIII, sollicité de se prononcer en faveur de la sainteté de Lucifer, se refusa à porterun jugement. Le 13 juin 1641, il portait un décret qui sera renouvelé par Innocent X, le 16 octobre 1647 : Ne in posterum, donec a Sancta Sede fuerit aliter ordinatum audeant super Luciferi sanctitate, cultu ac veneralione publiée traclare. disputare aut altercari illamque neque scriplo, neque typis impugnare aut defendere.

IL Écrits. — Saint Jérôme qui a connu d’assez près les lucifériens, est assez mal renseigné sur les écrits de l’évêque de Cagliari. Contra Constantium imperatorcm, dit-il, scripsit librum eique legendum misil. De vir. ill.. 95, P. L., t. xxiii, col. 735. En réalité, Lucifer a composé, durant son exil, toute une série de pamphlets à l’adresse de l’empereur Constance. Ils sont conservés dans un unique ms. du ixe -xe siècle, lequel, à l’estimation de L. Saltet, doit reproduire un archétype d’origine luciférienne, où un partisan de la secte a réuni un certain nombre de pièces qui lui semblaient intéressantes. Voici les traités dans l’ordre où les donne le ms. : 1. De Athanasio liber L et II. — 2. De regibus apostaticis. — *- 3. De non conveniendo cum hæreticis. — 4. De non parcendo in Deum delinquentibus. — 5. Moriendum esse pro Dei Filio.

Ces cinq traités sont suivis de quelques lettres : La 1° d’un officier de la cour nommé Florentius à Lucifer, lui demandant si le livre, contenant un ou plusieurs des écrits ci-dessus, qui avait été adressé à Constance, est bien de lui. La 2e est une réponse de Lucifer au dit officier, prenant l’entière responsabilité du codex incriminé. La 3e est une lettre d’Athanase à Lucifer lui demandant l’envoi des ouvrages en question. La 4e est encore d’Athanase qui remercie Lucifer de la communication qui lui a été faite. Cette lettre se relie à la précédente par une courte notice : Ilis acceptis litteris beatus Lucifer misit libros quos ad Constantium scripserat, quos cum legissel AthanaBius, hanc in/ra epistulam misil. La 5e lettre est celle du pape Libère à l’empereur Constance, lui recommandant Lucifer lors de sa mission à Arles. Jaffé, n. 212, P. L., t. viii, col. 1351. Enfin, la dernière pièce est une lettre d’Athanase aux solitaires, les mettant en garde contre les communications avec les ariens, édit. Hartel, p. 332. Description du ms. dans A. Reifferseheid, Hiblinth. ptitrum latin, italien., Vienne, 1865, p. 383.

Les divers éditeurs, depuis du Tillet Jusqu’à Hartel, n’ont point respecté cet ordre, et ont disposé les diverses pièces suivant la chronologie plus nu moins conjecturale qu’ils en avaient établie. Il semble indiqué de revenir à l’ordre du ms. Nous étudierons successivement le contenu de ces écrits, quitte à eu établir postérieurement la chronologie et le caractère. 1° Contenu des écrits.

1. Les pamphlets. — a) De

Athanasio liber primus et liber secundus. — C’i si ce que les anciens éditeurs appellent : Pn snucto Athanasio n<l Constantium tmperatorem, Le titre que nous maintenons est celui du double expltctt. Le ms, donne un titre qui Indique davantage le thème du livre : Quia absentent nemo drbrt judicurc et dnmnare.

Ce sujet se précise encore <iaus les premiers mot

l’introduction. S’adiessanI directement au souverain,