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LUC1DUS


de la région procédera contre lui. Fauste, Epist., i. Lucidus ayant mis quelque délai à signer le papier envoyé par Fauste, l’action conciliaire est déclenchée, sans doute à Arles en 473 (date préférable à celle de 475). Le prêtre reconnaît son erreur et adresse aux prélats de l’assemblée une lettre où il adhère aux condamnations portées et aux enseignements positifs donnés. Epist., ii. Fauste prend occasion de ces débats pour écrire son traité De gratia, qu’il présente comme l’exposé des discussions menées sur le sujet tant au premier concile tenu à Arles, que dans une autre assemblée tenue à Lyon. Voir De gratia, Prologue.

Il y a une autre présentation possible de la suite des faits : Sur son refus de souscrire la première sommation de Fauste, Lucidus est cité devant le concile d’Arles, où il accepte de signer le document en question ; c’est ce qui explique que, dans plusieurs mss., le formulaire imposé par Fauste porte les signatures d’une douzaine d’évêques, à la suite desquelles vient celle de Lucidus. Puis, de nouvelles discussions s’étant élevées, une assemblée plus considérable est réunie à Lyon, elle compte une trentaine d’évêques : c’est à ce concile que Lucidus adresse sa lettre de rétractation. Ce sont enfin les débats d’Arles et de Lyon qui donnent occasion à Fauste de rédiger le De gratia. Comme celui-ci peut dater de 474, il faut que les deux conciles aient eu lieu en 473 ; c’est ce que confirmerait, d’ailleurs, l’étude des noms d’évêques qui y prirent part.

Toute cette affaire nous est exclusivement connue par ces trois pièces. Mais ce n’est pas une raison pour révoquer en doute l’existence des deux assemblées signalées par Fauste, ni des décisions doctrinales qui y furent prises. Les objections du président Mauguin sont, de toute évidence, inspirées par l’esprit de parti et il n’y a absolument rien que de vraisemblable dans l’attitude que Fauste prête soit à Lucidus, soit à l’épiscopat provençal.

En réalité cette affaire, assez mince en soi, n’est qu’une des manifestations de la lutte qui se prolongera dans le midi de la Gaule, entre les conceptions augustiniennes et ce que l’on est convenu d’appeler le semi-pélagianisme, qu’il vaudrait mieux nommer l’antiaugustinisme. — Une première phase de la bataille s’était déroulée entre 425 et 440, nous n’avons pas à la retracer ici. Une autre bataille reprendra au début du vie siècle qui aboutira au IIe concile d’Orange. Kntrc ces deux épisodes considérables, l’affaire de Lucidus apparaît comme une escarmouche qui se situe vers 470-475.

Dans son ensemble, l’épiscopat provençal est acquis aux doctrines de Marseille et de Lérins. Il rejette non point les thèses doctrinales d’Augustin sur le péché originel et la grâce, mais le système général du docteur d’Hippone relatif au gouvernement divin, à la prédestination, à la grâce efficace par elle-même, à la volonté sâlvifique, etc. Cette quasi-unanimité dans le rejet de l’augustinisme intégral n’excluait pas l’existenre de quelques isolés demeurés fidèles à la pi du maître. En ces délicates matières il est bien difficile de trouver la note juste : dans la chaleur de la discussion il n’est pas impossible qu’il ait échappé > tel augustinien des propos qui turent ormes

par les adversaires. De la a les accuser d’hérésie, a imposer des rétractations, il n’y avail qu’un pas. I.a mésaventure arrivée a Lucidus apparat ! donc tout a fait naturelle ; peut-être n’a t-elle pas été isolée. Mais il faudrait se garder de transformer en un redou table sectaire « pauvre prêtre, si vivement pris a parti par son évêque.

III. Les deux doctrines en pi 1° Lu

, condamnées. — Au fait, que reprochait on A Lucidus’.' Nmis en pouvons juger par les an.iM

que Fauste lui demande de prononcer. Us sont au nombre de six :

Le 1 er est pour la forme : anathème au pélagianisme. — Le 2e est d’une interprétation plus laborieuse : « Anathème à celui qui prétend que le chrétien baptisé et orthodoxe, qui retombe ensuite en diverses fautes, se perd à cause d’Adam et du péché originel. » La pensée de Fauste est assez claire : « c’est par sa propre faute, veut-il dire, que le chrétien devenu pécheur se perd. » A quelle doctrine de Lucidus l’évêque de Riez opposait-il cet aphorisme ? A cette assertion, sans doute, que la cause dernière de la perte des damnés, quelles qu’aient été les circonstances de leur vie, c’est le péché originel. C’est une doctrine nettement augustinienne. — Le 3e anathème vise ceux qui prétendraient que c’est par la prescience de Dieu que l’homme est condamné à la mort (éternelle). On remarquera que Lucidus (à la suite de Prosper d’Aquitaine sans doute) évitait d’employer le mot de prédestination à l’égard des damnés, expression qu’Augustin avait admise assez fréquemment. Mais cette précaution même ne le met pas à l’abri des soupçons de son évêque. — Le 4e anathème est contre qui prétendrait que celui qui se damne n’a pas reçu les moyens de salut : anathema illi qui dixerit illum qui periit non accepisse ut salvus esse posset. Un ms. ajoute : id est de baptizato vel de illius œtatis pagano qui credere potuit et noluit. — Le 5e vise celui qui prétendrait qu’un vase d’ignominie ne peut devenir un vase d’honneur. On reconnaît ici la fameuse doctrine augustinienne de la massa damnata dont Dieu tire un certain nombre de vases destinés à des emplois relevés (les élus), tandis qu’il abandonne tout le reste à la perdition. — Enfin, ledernier anathème est dirigé contre qui prétendrait que le Christ n’est pas mort pour tous les hommes, et qu’il ne veut pas les sauver tous. On sait que, sur ce point de la volonté sâlvifique universelle, Augustin avait usé de toutes les ressources de son subtil génie pour exténuer la force du texte si clair de I Tim., iii, 4.

En résumé, les anathèmes imposés par Fauste au prêtre Lucidus visent des doctrines authentiquement augustiniennes. Mettons, si l’on veut, que les propositions condamnées, isolées de leurs contextes, séparées des atténuations que saint Augustin savait apporter à sa pensée, surtout quand il prêchait à son peuple, prennent un caractère plus dur que dans l’original. Il n’en reste pas moins que ce qui a excité les soupçons de Fauste, c’est tout simplement la pure doctrine d’Augustin.

C’est la même impression qui se dégage de l’étude des anathèmes imposés par le concile au prêtre Lucidus. Ils sont au nombre de neuf, qui recouvrent partiellement ceux qu’avait dictés l’évêque de Fiiez ; 3 du concile = 6 de Fauste ; 4 = 3 ; 5 = 2 ; 6 = 3. Il y a aussi d’autres doctrines visées : « An. 2 : jecondanme quiconque dit qu’après la chute du premier homme le libre arbitre a été complètement détruit. — An. 7 : .le condamne ceux qui prétendent que, depuis Adam jusqu’au Christ, nul parmi les gentils n’a été sauvé pour le jour de l’avènement du Christ, par la première grâce de Dieu, c’est-à-dire par la loi de nature, parce que le libre arbitre a été complètement perdu dans nuire premier père. — Les anathèmes S et ! relalils a des doctrines cschatologiqucs détonnent un peu dans le contexte : S. Anatlième à qui prétend que Ifpatriarches et les prophètes ou tout au moins les plus grandi saints ont été reçus en paradis avanl l’époque de la rédemption ; ’. ». Anathème à qui nie l’existence du leii et de l’enfer : qui diril igné » et in/rrna non essc. LuddUS avait-il tenu des propos risques sur

l’eschatoli propos s’appuyaient ils sur des as

sertions mai comprises de saint Augustin ? il est