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LUCAR. LA REACTION ANTIC YR ILLIE NNE


du Seigneur ne reçoit pas seulement le sacrement visible du corps et du sang, mais participe spirituel lement et intérieurement au vrai corps et au sang de N.-S. J.-C. » Cf. Legrand, Bibl. hellén., t. iv. p. 319 sq. Il ajoutait qu’il se disait heureux, lui un des chefs de l’orthodoxie, de partager sur ce point les sentiments du conseiller des princes d’Orange.

10° Eschatologie. — Pour Cyrille Lucar, « l’âme, dès qu’elle a quitté le corps, est transportée soit auprès du Christ, soit en enfer, parce que chacun est jugé tel qu’il se trouve au moment de sa mort : il n’y a plus lieu à repentir après cette vie. Pour ceux qui sont justifiés dès ici-bas, aucune condamnation n’est à craindre dans la vie future ; à ceux, au contraire, qui meurent sans la justification sont réservées les peines éternelles. » Conclusion, il faut rejeter la fable du purgatoire, tôv 7tepl xa0xpT7]p£oo p.û90v. C. xviii.

11° Les images des saints. — Lucar distingue l’art qui représente les saints et le culte rendu à ces derniers ; il approuve le premier et condamne le second. « Nous ne réprouvons pas, dit-il, les peintures faites par un art noble et illustre, car nous permettons à ceux qui le veulent, de conserver les images de Jésus-Christ et des saints ; mais nous détestons, comme étant condamnés par le Saint-Esprit l’adoration et le culte qu’on leur rend. » Con/ess., ive quest.

Cette Confession est incomplète ; elle laisse de nombreux points dogmatiques dans l’ombre, son auteur n’ayant voulu donner qu’un résumé de doctrine ; mais telle qu’elle est, elle montre à l’évidence que Lucar était d’accord avec les réformés. Comme eux, il donnait la première place à l’Écriture, comme eux il repoussait la suprématie papale, la transsubstantiation, le purgatoire et bien d’autres doctrines romaines. Ça et là, si on le voit encore osciller entre la doctrine traditionnelle de son Église et la croyance protestante, ce n’est souvent que sur des points secondaires. Son protégé et ami, Métrophane Critopoulos a laissé aussi une Confession de foi de l’Église orienUile catho-Uqueet apostolique, ’Ou-oloyla. t7, ç àvaToXixîje ; èxxX/)oiaçTÏjç xaOoXixîjç xalàTCocToXixrjÇ (imprimée à Helmstsedt, en 1661, par les soins de J. Hornéius), dans le dessein d’exposeï la foi de l’Église orientale, sans en rien retrancher ou ajouter ; cette œuvre reste fidèle, en général, dans ses données essentielles, aux dogmes de l’orthodoxie grecque. On n’en saurait dire autant de la Confession de Lucar ; pour qu’elle pût prétendre à cette fidélité, il faudrait la refondre entièrement, mais elle ne serait plus alors l’œuvre de Lucar, l’œuvre de l’homme qui écrivait en 1634, quatre ans avant sa mort, a son ami, Antoine Léger, ces lignes décisives, vrai testament doctrinal : « Je désire que, si je meurs, vous puissiez témoigner que je meurs catholique orthodoxe, dans la foi de Notre-Seigneur lésus(lirist, dans la doctrine évangélique telle qu’elle est renfermée dans la Confession belge, ma Confession, et toutes celles des Églises évangéliques, qui sont toutes semblables. J’ai en abomination les erreurs des papistes et les superstition-, des grecs ; j’approuve et j’embrasse la doctrine du très-excellent docteur Jean Calvin et de tous ceux qui sont d’accord avec lui. » Cf..1.-11. Hottinger, Analecta historica, Zurich, 1652, p. 560. Nous citons d’après P. Trivier, Cyrille Lucar, ta vie et w/i influence, Paris, 1X77. p. 7<s. Le mot d’Antoine Arnauld mérite d’être rappelé ici : Cyrille Lucar fut « un disciple de Calvin travesti en patriarche ». La Perpétuité de la Foi de l’Eglise catholique touchant haristie, Taris, 1669, t. iv. p. 618.

On ne saurai ! porter un jugement parfaitement éclairé sur la doctrine de Lucar si l’on passait silence certains autres textes de Bes écrll Poui tauvi r son orthodoxie défaillante, ses défenseurs on’Invoqué Y Apologie qu’il adressa en 1634 à la paroisse de la

Vierge à Léontopol. « Sachez, écrivait Cyrille, qu’étant, dès le début, imbu du lait de piété et élevé dans des dogmes orthodoxes, nous gardons toujours fermement les dogmes orthodoxes, de l’Église orientale, notre mère… Mais les ennemis qui ferment les yeux à la lumière de la vérité, dans leur désir de nous frapper de blâme, nous accusent de calvinisme et d’hérésie, faisant ainsi preuve de mauvaises dispositions en même temps que de méchanceté et d’ignorance ; car, méditant de nous venger pour d’autres raisons, ils tâchent de nous rendre coupables ailleurs ; ils ont beau se tourmenter ; ils heurtent contre Dieu et contre la vérité. » Cf. Nsa Htœv, 1905, t. n p., 33 sq. ; Revue internationale de théologie, 1906, t. xiv, p. 327 sq. En comparant ce texte avec celui que nous avons cité il y a un instant, et qui est de la même année 1634, on conviendra que Cyrille Lucar est un fourbe et un hypocrite. Mais il y a de cette duplicité doctrinale un témoignage plus éclatant encore. En 1601, au lendemain des réunions de Brzesc, Cyrille gravement compromis avec la justice polonaise, adressa à l’archevêque latin de Léopol, Démétrius Sulikowski, une humble apologie de sa conduite ; il était accusé de complicité avec les protestants dans l’attaque des catholiques ; pour échapper au danger qui le menace, voici ce qu’il ose écrire : « Je sais très bien, et les patriarches de qui je tiens mes pouvoirs savent comme moi, que non seulement les actions et les dogmes de ces hérétiques ont causé les désordres et la ruine de l’Église catholique en Orient comme en Occident, mais qu’ils ont amené une déplorable corruption de mœurs parmi les chrétiens. Ils sont si éloignés de nous qu’une réunion a toujours été impossible. Au contraire, si des divisions semblent exister entre l’Église d’Orient et celle d’Occident, elles ne doivent être atribuées qu’aux illusions de quelques ignorants. En Grèce comme à Rome, tous ceux qui ont de la science, professent des doctrines absolument semblables ou au moins très rapprochées. Loin de détester la chaire de saint Pierre, nous l’entourons de respect et de la vénération qui lui est due, et nous lui reconnaissons la primauté et le titre de mère. » Lettre publiée par le jésuite Pierre Skarga dans ses Miscellanca de Sgnodo Brestensi, et en partie dans Hurmusati, Documente privitore la istoria Romànilor, suppl. î, t. i, p. 240. Ainsi le Cyrille I.ucar, en qui on a voulu voir, à tout prix, un fidèle et fervent orthodoxe, a su aussi, quand besoin en était, se faire passer pour un papiste. Ses variations de doctrine et de conduite sont un fait qu’aucun apologiste ne saurait atténuer. Un écrivain protestant n’a pu s’empêcher de constater « que la loyauté la plus élémentaire lui fait défaut ». P. Trivier, Cyrille I.ucar, sa vie et son influence, Paris, 1877, p. 90.

IV. LA RÉACTION ANTICYIULLIKNNE.

Les premiers essais d’union des églises protestantes avec l’Église orientale avaient eu lieu en 1554, sous le patriarche.loasaph II ; d’autres avaient été tentes plus tard auprès du patriarche Jérémie par Martin Crusius et Jacques Andréas, professeurs à l’Univcrsité de Tubingue ; I DUS ces essais furent sans succès. I, .i propagande calviniste menée par Cyrille Lucar ne devait pas aboutir davantage ; elle ne représenta qu’un mouvement isolé ; l’Église orientale sut résister et c’est là me gloires, l’u vivant de I. uc.u, Imis

anieins croisèrent la plume contre sa Confession : an certain Yan Tilen écrivit trois lettres pour réfuter les Idées du patriarche. Le titre de cette réfutation est ainsi conçu : Lettres <i un amy touchant la nouvelle Confession de (’.grille soi-disant Patriarche de Constantlnople, MDCXXIX ; pour l’explication du soidisant Patriarche oir Legrand, BibL helL du II » s., 1. 1, p. 268. L’évoque de Périgueux, François