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    1. LOLLARDS##


LOLLARDS. LES LOLLARDS EN ANGLETERRE

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Voir W. Capes, The English Church in the XIV and XV centuries, p. 94.

Si les lollards s’entendaient pour nier les sacrements et désirer la confiscation des biens ecclésiastiques, ils se divisèrent très vite en une infinité de sectes interprétant chacune la Bible selon sa fantaisie. Quelquesuns condamnaient la guerre, la peine capitale et se refusaient à prêter serment. D’autres prohibaient le commerce des articles de luxe. Swinderby condamnait la prison pour dettes. D’autres, conséquents avec leurs principes relatifs à l’autorité de la Bible, réclamaient l’observation du sabbat juif et l’interdiction de la viande de porc. Ils condamnaient comme idolâtrique le culte des saintes images. Beaucoup n’admettaient pas le chant d’Église et déclaraient nul tout baptême donné par un prêtre en état de péché mortel. Ils en appelaient à des textes de la Vulgate mal compris pour justifier leur doctrine, prétendant que saint Paul enseigne qu’il faut être ignorant pour être sauvé et que Dieu n’admet pas les savants au salut.

Exagérant encore le principe de Wiclef qui considérait la sainte Écriture comme unique règle de la vie religieuse, ils repoussaient tout enseignement ecclésiastique officiel et admettaient que le premier venu peut compter sur l’inspiration suffisante pour comprendre les paroles inspirées. Ils versèrent dans les pires extravagances d’une exégèse parfois bouffonne et ne surent se garder des superstitions les plus puériles.

La lutte de l’Eglise officielle contre les lollards continua jusqu’au règne de Henri VIII. Quand les écrits de Luther apparurent en Angleterre, le clergé fut effrayé du renouveau qu’ils allaient fournir aux hérétiques qu’il poursuivait depuis plusieurs générations. En 1523, l’évôquc Tunstall écrivait à Érasme : « Ce n’est pas une pernicieuse nouveauté, ce sont de nouvelles armes fournies à la nombreuse légion d’hérétiques héritiers de "Wiclef. »

Les lollards et la Réforme protestante.

On

s’est demandé jusqu’à quel point le mouvement lollard a préparé la Réforme du xvie siècle. Dom Gasquet, La veille de la Réforme en Angleterre, trad. fr. par D. Bourgeois, Louvain, 1914, t. i, p. 237, combat la tentative de certains protestants qui voudraient faire commencer la Réforme avant Henri VIII et considèrent son divorce avec Catherine comme un simple accident qui eut tout au plus pour effet de précipiter les conséquences et de faire éclater subitement ce qui était depuis longtemps inévitable.

Tout en reconnaissant qu’à cette époque il se trouvait un peu partout en Angleterre des esprits mécontents, que d’autres y étaient prêts à saisir avec empressement toute occasion favorable pour se libérer de contraintes que ne reconnaissaient plusieurs consciences et d’un enseignement qu’ils en étaient venus à considérer comme un pur formalisme ecclésiastique, il cite un voyageur vénitien, intelligent observateur, qui visitait le pays au commencement du xvie siècle et qui était frappé des pratiques catholiques et des manifestations générales de piété dont il était témoin tout m constatant qu’il se trouvait nombre de gens différant d’opinion sur les questions religieuses ». Camden Sot îely, p. 163.

Ince témoignage il résulte que, dans l’en semble de la contrée, bien peu d’inquiétude relinieuse.au vrai sens du mot, de ; iil exister. Il est en effet impossible de supposer qu’une proportion notable du peuple ait pu

er ouvertement l’enseignement de L’Église ou m moins de secrets lollards, sans qu’un pareil fait soit venu : i notre connaissance,

La ressemblance des doctrines adoptées parles réfoi m..leurs anglais du kï’siècle avec plusieurs des ensel gnements profesi es pai les disciples de w ydef de ail conduire plu ii< ui i écrivains à supposer entre les uns

et les autres un lien qui, en réalité, n’a pas existé. Au moins pour l’Angleterre, rien ne vient justifier la prétention de chercher l’origine de la Réforme dans une certaine forme de lollardisme anglais. Il est impossible d’étudier le siècle qui précède la ruine du vieux système religieux de l’Angleterre sans aboutir à cette conclusion, que la secte des lollards avait depuis longtemps disparu, et que le petit nombre de ceux qui demeuraient encore les adhérents des doctrines de Wiclef, dispersés de tous côtés dans le pays, sans aucun principe effectif de cohésion, étaient impuissants à opérer le moindre changement d’opinion dans la masse de la population, où ils demeuraient comme perdus.

Le lollardisme était alors taxé d’ « hérésie », et tout essai pour le répandre était énergiquement réprimé par l’autorité ecclésiastique, soutenu par la force du bras séculier ; et comme cette doctrine blessait le sentiment commun du public, il est hors de doute que cette répression avait l’approbation du peuple. Le génie de Milton lui fit voir que « la propagande wicléfiste avait été étouffée et écrasée par le pape et les prélats pour six ou sept siècles ».

M. James Gairdner en arrive à la même conclusion : « En dépit des ténèbres qui entourent tout ce qui se rapporte à l’histoire du xve siècle, nous pouvons nous aventurer, à peu près à coup sûr, à affirmer que le lollardisme ne fut en aucune façon la source du protestantisme moderne. Si plausible qu’il puisse paraître de regarder Wiclef comme « l’étoile du matin de la Réforme », cette comparaison donne une impression parfaitement erronée. L’influence de Wiclef ne survécut pas beaucoup à l’époque où il vivait, et loin que le lollardisme ait enfoncé de profondes racines parmi le peuple anglais, ses traces avaient entièrement disparu bien longtemps avant la grande révolution dont on le croyait l’avant-coureur. Quoi qu’il en soit, dans la riche collection de documents que nous possédons sur le commencement du règne de Henri VIII, et que viennent encore éclairer les correspondances du même temps, c’est en vain qu’on chercherait la trace de quelque chose ressemblant à la secte des lollards. Le mouvement s’était éteint de sa mort naturelle. Depuis Oldcastlc, il devint insignifiant. Pendant quelque temps il eut encore le nombre, mais il ne compta plus parmi ses adhérents un seul homme remarquable : et quand une génération eut disparu, les soucis plus sérieux de la guerre civile ne laissèrent aucune place aux billevesées du fanatisme. »

Gairdner écrit au Guardian (1 er mars 1899) : « Naturellement on vous dira que le germe de la Réforme avait été semé avant le temps de Henri VIII, et que ce fut particulièrement Wiclef qui provoqua ce grand mouvement. Je serais désolé de déprécier Wiclef, qui a produit indubitablement un grand ébranlement à son époque, quoiqu’un jugement étudié et circonspect sur ce fait historique reste un desideratum. Même au point de vue théologique, la doctrine fondamentale de la Réforme, — la justification par la foi — n’existe pas dans Wiclef, j’ose l’affirmer. Mais quelle que soit la dette que l’Angleterre actuelle ait pu contracter vis-àvis de Wiclef) au poinl de vue theoloL’ique, vingt W’i-ClefS, si populaires qu’Oïl les suppose, n’auraient pas mené a bien, aux xv c et wr siècles, une Réforme comme celle à l’ombre de laquelle nous avons vécu

pendant ces derniers siècles. C’est une chose qui ne

pouvait être réalisée que par le pouvoir royal, comme

(-n Angleterre, ou par le triomphe d’une rébellion

renversant l’autorité royale, comme en i Icosse.

cette Importante déclaration je n’opposerai

qu’une remarque qui, d’ailleurs, n’en affaiblil nulle ment la portée, Quand on dit que la doctrine de la Jnsti Bcation par la foi est fondamentale dans la Réforme, on dii vrai il l’on se place au point de vue historique,