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LOIS. LA LOI ECCLESIASTIQUE


docteurs, des fidèles qui ont la] conscience droite, timorée.

Il va sans dire que, si la loi est obligatoire, les moyens pour s’y soumettre obligent aussi. Par conséquent, on doit faire en sorte de la connaître ; on doit se procurer ce qui est nécessaire pour la pratiquer : un bréviaire si on est tenu à l’office ; ne pas poser volontairement un obstacle à l’accomplissement de la loi : aller à la chasse un jour de jeûne si cela doit rendre le jeûne impossible.

La loi ecclésiastique peut sanctionner son obligation par des peines. Voir ce mot, le Code, les mots Censures, Excommunication, Suspenses, etc.

8° Interprétation de la loi ecclésiastique. — Il est impossible que le législateur prévoie tous les détails d’application d’une loi ; les circonstances changent, les habitudes ne sont plus les mêmes, etc. On est obligé d’interpréter la loi. Le Code prévoit cette interprétation : « L’interprétation authentique de la loi est faite par le législateur, son successeur ou celui qui a reçu d’eux commission d’interpréter. » Can. 17, § 1. 1. L’interprétation est authentique quand elle est faite par le législateur lui-même ou son successeur, elle a force de loi : Interpretalio authentica, per modum legis exhibita camdem vim habet ac lex ipsa ; et si verba legis in se certa declaret tantum, promulgatione non indiget et valet relrorsum ; si legem coarctet vel extendat aut dubiam explicet, non relrotrahitur et débet promulgari. Ibid., § 2. On prévoit le cas d’une interprétation simplement déclarative, qui explique la loi, declaret tantum : elle n’a pas besoin d’être promulguée et vaut pour le passé. Cela se comprend, car elle n’est autre que la loi elle-même plus clairement exprimée. Ainsi on a déclaré que le terme filius désigne aussi le fils adoptif, que legitimus peut s’entendre du legitimatus. — Si l’interprétation ajoute à l’obligation de la loi, coarctet ; si elle l’étend à d’autres cas, extendat ; si elle l’applique à des cas douteux, dubiam explicet, la déclaration est appelée supplétive : elle ne peut avoir d’effet rétroactif et doit être promulguée de nouveau. Ainsi Pie X a étendu, appliqué aux personnes privées l’excommunication qui atteint cogentes clericos ad tribunal sseculare, déclarant que tel était le sens de la bulle Apostolicæ sedis.

Le souverain pontife peut interpréter la loi ou par lui-même, ou par des congrégations nommées à cet effet : ainsi Pie IV a établi la S. Congrégation du Concile pour expliquer les décrets du concile de Trente ; saint Pie V a établi la S. Congrégation des Rites pour les questions relatives au culte. Le Code, c n. 243257, détermine les droits des diverses congrégations qui peuvent rendre leurs décrets en forme solennelle, en forme commune, ou répondre aux questions particulières comme fait souvent la S. Congrégation des Rites. 2. L’interprétation est judiciaire quand elle est faite par les Juges ecclésiastiques qui appliquent la loi à tel cas particulier : ainsi le Tribunal de la Sacrée Pénitencerie dont la juridiction s’exerce au for interne, la Sacra romaïui Rota, qui est surtout un tribunal d’appel, etc. Leurs sentences obligent ceux qui leur ont soumis la cause, à moins qu’ils ne puissent encore porter le débat devant un autre tribunal. Can. 18. Les décisions n’ont qu’une valeur doctrinale poi r les autres que les intéressés, elles forment la jurisprudence de l’Église qui a plus d’autorité que l’interprétation faite par un simple docteur. L’interprétation usuelle est connexe a celle-là. c’est celle qui se fait par la coutume, optima legum tnterpra. Code, I oir (.m 1 1 me, t. m. col. l’.tx.s. S. L’interprétation est doctrinale quand elle est faite par les docteurs, canonlstes, moralistes.. ! Elle n’a d’autre autorité que celle de la science du docteur qui la donne Ie Code pose quelques règles : Legu teelt

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siasticæ intelligendse sunt secundum propriam verborum significationem in textu et contextu consideratam ; quæ si dubia et obscura manserit, ad locos Codicis parallelos, si qui sint, ad legis finem ac circumslantias et ad mentem legislatoris est recurrendum. Can. 18.

On peut ajouter : a) Les mots généraux doivent être pris dans le sens général : si l’on dit omnes, c’est tout le monde, nullus, aucun, homir.es désigne habituellement les femmes aussi bien que les hommes, omnes baptizatos désigne tous les baptisés, les hérétiques aussi bien que les fidèles. Ubi lex non distingua, nec nos distinguere debemus. — b) La loi est contenue dans son dispositif, non dans les raisons apportées pour la légitimer ; ainsi quand le IVe concile de Latran (1215) restreignit au quatrième degré l’empêchement de consanguinité pour le mariage, can. 50, on ajouta cette raison qui manque de fondement : parce qu’il y a quatre humeurs dans le corps, humeurs composées des quatre éléments. Décrétâtes, Greg. IX, t. IV, tit. xiv, c. 9, Non débit. C’est ce qu’exprime l’adage : Ratio legis non est lex. Mais il faut ajouter : Ubi eadem ratio, ibi eadem currit legis dispositio. La loi prévoit que la clôture peut être violée en cas d’incendie, on peut la violer aussi en cas d’inondation : Ratio legis est anima legis. — c) Le Code prévoit que : Leges quæ pœnam slaluunt, aut liberum jurium exercilium coarclant, aut exceptionem a lege continent, striclæ subsunt interprelationi. Can. 19. Cette règle, qui est fort précise, indique dans quel sens il faut prendre certains adages dont on est quelquefois tenté d’abuser : Odia restringi et favores convenu ampliari : il faut qu’il y ait vraiment doute sur la peine imposée pour qu’on juge en être exempté. Si l’interdit est porté contre le peuple, il n’atteint pas le clergé ; si un privilège est accordé à une nation, populus, le clergé peut en profiter. In obscuris minimum est sequendum. Quand le texte est vraiment obscur, que le contexte, le sujet traité, la coutume ne peuvent pas renseigner sur la volonté du législateur, on peut adopter le sens qui favorise le plus la liberté. Si on restreint les droits des religieux sans parler des religieuses, la loi n’atteint pas celles-ci. Et la raison, c’est que le supérieur qui veut obliger doit parler clairement.

4. L’interprétation qui est une restriction apportée à la loi dans un cas particulier où elle serait impraticable dans sa teneur générale s’appelle épikie. Voir ce mot, t. v, col. 358.

Cas dans lesquels la loi cesse d’obliger.

Il peut

arriver que la loi cesse d’obliger tout en continuant d’exister ; il peut aussi arriver qu’elle disparaisse en tout ou en partie :

1. L’obligation de la loi cesse : a) quand on ne peut pas l’observer, voir Impuissance physique et morale, t. vii, col. 1441 ; — b) quand on en est dispensé, voir Dispenses, t. IV, col. 1428 sq. ; le Code, can. 8086, et Privilège.

2. La loi cesse d’exister : a) par l’abrogation, voir ce mot, t. i, col. 126 ; — b) par la dérogation, voir ce mot, t. ii, col. 532 ; — c) par la coutume, voir ce mot, t. iii, col. 1988 ; — d) par la cessation même de la fin pour laquelle la loi a été faite.

L’abrogation et la dérogation sont accomplies par l’autorité elle-même qui supprime sa loi en tout ou en partie ; la coutume, pour être légitime, doit être contrôlée par elle. La cessation survient par le fait même de l’Incapacité complète et perpétuelle des inférieurs à pratiquer la loi : si, par exemple, lorsqu’il était

interdit d’assaisonner les aliments avec la graisse aux

jouis d’abstinence, on n’eût pu trouver aucun autre condiment, et cela pour toujours, la loi aurait cessé par l’impossibilité de l’appliquer. La loi aussi peut

devenir Inutile, elle ne l’adapte plus s des condilions

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