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LIEUX THÉOLOGIQL’ES — LIGAMEN


nient le congruisme, alors que tout le contexte du livre et même du paragraphe proteste contre cette interprétation, je ne puis m’empêcher de penser que « ma » Caractéristique serait bien utile, ne serait-ce que pour éliminer de la théologie ces sortes d’arguments sans efficacité, arundines longas arma videlicet levia puerorum, De locis, theol. t. VII, c. x, que de graves théologiens de l’École perdent leur temps et leur huile à s’administrer mutuellement depuis des siècles.

En raison de divergences dans la distribution des chapitres, qui se rencontrent dans les différentes éditions du De Locis de Cano, je préviens que je me réfère, comme le 1)’Lang et pour des motifs analogues, opère in/ra citato, p. 251, à l’édition de Serry, Bassano, 1746, dont j’utilise la réimpression de Madrid, 1776, intitulée Melchioris Cani episcopi Canariensis Opéra, in hac primum editione clarius <linis<t.

L’essentiel de la Bibliographie a été indiqué, soit au fur et à mesure de l’article, soit à la section x. Mais c’est pour moi un devoir de signaler, en finissant, l’érudite et sans doute exhaustive bibliographie de la question des Lieux théologiques, que l’on trouvera, tant au bas des pages, que dans l’Index, p. 246-251, dans l’ouvrage du D r Lang dont je n’ai pu utiliser dans cet article que les 90 premières bonnes pages, et qui paraît au moment que je corrige ces épreuves, décembre 1925 : Die Loci Iheoloqici des M ?lchior Cano, Munich, 1925.

A. Gardeil.

    1. LIGAMEN (Empêchement de)##


LIGAMEN (Empêchement de).— I. Notion. II. Constat de la rupture du lien.

I. Notion.

On désigne sous ce nom le lien matrimonial qui unit les époux entre eux, et, par voie de conséquence, l’obstacle légal ou empêchement qui rend impossible tout mariage nouveau de l’un des conjoints du vivant de l’autre. C’est ainsi que l’empêchement est communément défini par les auteurs. Le Code de droit canonique en donne la définition suivante : Invalide matrimonium attentat qui vinculo ienetur prioris matrimonii quanquam non consummati, salvo privilègio fidei. Can. 1069, S 1

Le lien conjugal est brisé par la mort de l’un des époux ; mais il n’y a pas que la mort qui le rompe. Une dispense du souverain pontife pour une raison grave, et la profession religieuse solennelle d’un des conjoints ont aussi pour effet de dissoudre le matrimonium ratum et non consummatum. Mais il est nécessaire qu’une de ces causes intervienne pour permettre aux époux devenus libres, à celui qui survit, à celui qui reste dans le monde, ou même aux deux, de convoler à d’autres noces. Tant que subsiste entre les conjoints le lien du mariage, toute tentative’de leur part d’une nouvelle union conjugale est déclarée nulle de plein droit. Le code a pourtant mis hors de cause le cas du privilège paulinien, salno privilegio fidei. On sait la concession que l’apôtre a faite, en faveur de la foi, aux époux unis dans l’infidélité. Si, après la conversion de l’un d’eux, l’autre refuse de cohabiter avec lui, ou, comme on interprète aussi, s’il ne consent à la cohabitation qu’en lui imposant des actes contraires à la religion chrétienne ou aux devoirs essentiels du mariage, la partie fidèle est en droit de reprendre sa liberté et rien n’empêche qu’elle songe à former un nouvel engagement. Toutefois, le lien du premier mariage contracté dans l’infidélité n’est rompu qu’au moment où la partie fidèle a convolé en fait et régulièrement à de secondes noces. Code, can. 1120-1126. Voir Divorce, t. iv, col. 1473-1474. Hormis ces exceptions, un des conjoints ne peut, durant la survivance de l’autre, se remarier validement. Le juge séculier ou même le chef religieux de la secte à laquelle il appartient auront beau annuler son premier mariage, l’union qui suivra ne sera jamais qu’un concubinage pur et simple. La situation serait la même, encore que les époux n’auraient fait qu’échanger leur mutuel consentement et n’auraient consommé le mariage d’aucune

façon, prioris matrimonii quanquam non consummati.

L’empêchement de ligamen est de droit divin, naturel et positif et n’admet point de dispense. Il se fonde sur le dogme de l’unité et de l’indissolubilité du mariage. Nul n’est admis, en regard de la loi divine, à donner pouvoir sur son corps à plusieurs en même temps, et le droit dont on a disposé en faveur d’un seul, on ni’peut le transmettre à un autre que si le premier engagement a été légitimement rompu.

II. Constat de la rupture du lien.

Le canon 1069, en son paragraphe 2, exige que, avant de contracter une nouvelle union, l’époux libre de tout lien établisse par des voies régulières et d’une manière certaine, que la première ou était nulle en droit, ou a été régulièrement brisée : Quamvis prius matrimonium sit irritum aut solutum qualibet ex causa, non ideo licet aliud contrahere antequam de prioris nullilale aut solutione légitime et certo consliterit. La certitude ici requise est une certitude morale, mais en aucun cas elle ne se confond avec une simple probabilité, si grande qu’on la suppose. Si le lien matrimonial a été rompu ou déclaré inexistant par une sentence judiciaire ecclésiastique, il va de soi que la production de cette sentence est requise pour la constatation de l’état libre.

S’il s’agit de la mort d’un des conjoints, plusieurs cas sont à distinguer. Si la mort est survenue dans la localité même ou dans une localité assez proche de l’endroit où le survivant se remarie, le fait est public, notoire, trop connu pour qu’on doiveen fairela preuve. Mais le décès du conjoint n’est pas dans tous les cas également avéré. Une instruction du Saint-Office, de l’année 1868, donne la marche à suivre lorsqu’on est en présence seulement de conjectures. Tout d’abord l’absence, même très prolongée, d’un des époux n’est pas regardée par les canons comme une preuve suffisante de la mort de celui-ci. Que d’exemples, à la suite de la dernière guerre, de disparus qu’on n’estimait plus en vie et dont le retour imprévu au foyer après un long temps a surpris tout le monde, a troublé même la paix d’une seconde union ! Il est nécessaire que la mort du conjoint soit attestée par un acte authentique du curé du lieu, où il est dit être décédé, ou même de l’évêque, si ce fut dans Ain diocèse éloigné. Un acte de l’autorité civile ne suffit pas généralement, surtout si cet acte a été dressé après une guerre ou quelque catastrophe. A défaut du document officiel exigé, une preuve recevable encore sera l’affirmation d’au moins deux témoins immédiats. Parfois même un seul, mais d’une valeur incontestable, suffira, surtout si d’autres indices par ailleurs s’ajoutent à son témoignage et le corroborent. Quand le décès en question n’est certifié par aucun témoignage de première source, on verra si la preuve ne peut être faite au moyen de témoins indirects ou résulter d’un faisceau de présomptions. Le bruit de cette mort recueilli, auprès de la portion la plus considérable et la plus saine d’une population, par deux personnes dignes de foi, et qui ont prêté serment, si d’autre part des conjectures dans le même s"ens ne font point défaut, ne peut-il être considéré comme une preuve véritable ? Quant aux présomptions et circonstances diverses qui aideront le juge ecclésiastique à se former une conviction et à prononcer le constat de mort, ce sont : l’estime générale dont jouissait le conjoint, sa religion et sa conscience, l’amour qu’il avait pour sa femme, les raisons majeures qu’on lui suppose de se tenir éloigné et dans le silence, les lettres qu’il a écrites à plusieurs reprises depuis sa disparition, les biens immeubles qu’il possède et qui l’attachent au pays, les recherches entreprises auprès de ses chefs, s’il est soldat, des sociétaires, s’il est dans le commerce-on par la voie des journaux, etc. Il appartient a l’Ordinaire de peser attentivement tout cet ensemble, et, après avoir pris conseil de théologiens et d’hommes