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LIEUX THEOLOGIQUES. UTILISATION


1° Premier précepte : Posséder ses lieux théologiques et les règles qui les régissent. — 1. Au moment d’aborder une question, le théologien doit avoir présents à l’esprit tous les préceptes recensés dans l’inventaire critique préalable des lieux théologiques, 1. II-X1, Nec enim memoria tenuisse sat est, sed paratos et expeditos habere oportet… quæ res, sivea nobis accipientur, seu ab alio qui ad hœc scribenda paratior post me alque instructior venerit, non mullum refert. — 2. Mais ce n’est pas assez de savoir les règles, qui commandent l’usage des lieux ; il faut aussi connaître à fond la matière qu’ils renferment et à laquelle ces règles s’appliquent, locos ipsos lustrasse ac comprehendisse omnes. Et Cano de s’emporter avec éloquence, dans un passage imité de Cicéron, Orator, c. 34, contre ceux qui voudraient argumenter et ne posséderaient pas leur sainte Écri ture, les traditions apostoliques, la doctrine de l’Église, des conciles, des souverains pontifes, des Pères, des théologiens, la philosophie, les sciences, l’histoire. Il s’objecte : Mais il est impossible de savoir toutes ces choses. (Cf. le mot du P. Lacordaire dans son panégyrique de saint Thomas à Saint-Sernin de Toulouse : le théologien est un homme impossible.) Il repond : je ne le blâme pas de ne pas savoir toutes ces choses : ce que je lui reproche, c’est, s’il ne s’est pas essayé à les savoir, si non secutus, d’usurper le nom de théologien. Et il poursuit ce thème avec sa verve éloquente, pour terminer, après un magnifique éloge de saint Thomas : Quanto D. Thomas copiosior et nervosior est…, parce sarcasme, à l’adresse des mauvais théologiens : Vinum quoque aqua mixtum clarius est quidem, serf dilutius tamen : Merum ad bibendum difflcilius, plus omnino habet virium !

Réfléchissons sur les deux parties de ce premier précepte. Cano, assurément, ne veut pas dire que le théologien doit aborder sa tâche en ayant devant les yeux, d’un côté, les préceptes qui règlent l’usage des lieux et, de l’autre, la connaissance à l’état brut de leur matière. Il est clair que ce qu’il attend de lui c’est un Donné théologique déjà élaboré à l’aide des préceptes, en d’autres termes un donné non pas brut, mais critique, j’entends de cette critique théologique. dont les dix livres II-XI donnent les règles. Le caractère théologique de cette critique n’exclura pas d’ailleurs son caractère scientifique puisque, aussi bien, la philosophie, les sciences, particulièrement les sciences historiques sont dos lieux théologiques, et qu’en acceptant la magistrature de la foi, elles n’ont pas dépouillé les évidences rationnelles qui les constituent comme sciences, mais les ont mises au service d’une connaissance plus certaine et plus haute. On veut dire simplement que, dans cette critique objective et sinle dernier mot appartient à la foi, car pour Cano, critique et théologique ne s’excluent pas, mais se complètent : Divina et fuimana ratio, qund sœpissime dixi, dissimilrs non sunt : ner alio hœc, alio ducil illa ; quin fodem sprrtnnt ambæ et in eumdem finrm referuntur. Nos grands anciens, ajoute-t-il, exécraient ceux qui séparent deux choses faites naturellement pour s’unir : et, s’ils ne les avaient pas associées dans leurs is, ils ne se seraient pas crus théologiens. De foc/5, I XII, c. xi, 3° præreplio. Cf. Gardeil, I.r Donné révélé et la théologie, p. 212-223.

2° Second précepte ; Lecture raisonner des modèles.

emier précepte, qui est fondamental, omnium tjasmodi prteceptorum eaput, Cano ajoute un précepte

llalre, qui va au même but. c’esl à dire à la prépa alable de l’Invention,

iin s de la science théologique.

occupation de restituer leurs nriMl’H lieux dont elles smit tirées :

mnim tibi comparable rr allorum

I cum intrllrrcris ru jus lori usas illis defuerit,

.’' III’t i A III*. !..

ipse per te, ea quai omissa sunt… inquires. C’est ainsi dit-il, que saint Thomas a complété, à l’aide du lieu de la raison naturelle, les argumentations purement surnaturelles de saint Augustin contre les pélagiens. Mais ce n’est là qu’un premier et tout négatif bénéfice à retirer de l’étude raisonnée des théologiens ; en voici l’utilité positive : Agnoscere apud velefes theologos argumentalionumloccs plurimumprodest, luminintelligendis eorum virtutibus (ressources) tum in discernenda varia eorum argumentandi raiione, tum quod copia quædam paratur hac diligentia et usu, ut non solum quæ Mi invenerinl, ea habeamus in promplu, serf ut, quolies e locis theologicis quærimus, similibus in rébus similes nobis argumentationes occurrant… Theologos sane, quod ad inventionem attinet, magis vclerum exempta juvabunt, quam præcepta, non dico nostra, serf ne cujuscumque quidem alterius artificis. L. XII, c. xi, § Argumentationes.

3° Troisième précepte : Rattacher la question que l’on désire résoudre à ses lieux théologiques propres, littéralement, l’y projeter, quæstionem in locos conjicere.

Ce précepte comprend cinq opérations successives. 1. Il faut d’abord se rendre compte du genre de la question à traiter : Ubi theologus disserendi maleria fuerit oblata, quæstionem accurate débet expendere, statuereque in primis cujus generis illa sit… Nisi enim theologus naturam quæstionis comprehenderit, nec facile intelliget, qualia sint ci invesliganda argumenta, nec ex quibus petenda locis. De locis, l.XII, c. xr, 3° præceptio, § Erit autem hœc formula. Cette appréciation se fait en comparant la question posée, aux différents membres des divisions des questions théologiques et de leurs notes.cf. plus haut, sect. vu : Neceodemmododisscrcndum est de iis quæ quærimus ut exponamus (principes de foi mis en cause) ac de aliis quæ quæruntur ut demonslremus (questions de conséquences). Longeque diversa instituitur dispulatio de naturali ac supernaiurali quæstione, aliique loci theologici sunt huic alque illic accommodandi. De locis, c. v, § Primum ergo ofpcium.

2. La principale préoccupation du théologien dans cette qualification de la question sera de démêler, malgré la complication où d’ordinaire elle gît, quamquam omnes inter se colliqali alque implicati sunt, ce qui est la chose difficile entre toutes, si elle est de foi ou non, c. xi, ibid. ; An præter fidem illa sit an polius ad [idem pertineat. Pour les premières, il faut combattre à toutes voiles et faire donner sa cavalerie, velis equisque ; pour les autres, les théologiens sans doute peuvent se battre, et même parfois le doivent, serf cruenta pugna illis omnino interdicta est, c. v, § Sedcum unius cujusque. Pour les questions libres, cujus in scientia nihil periculi habet, error nihil habet criminis, il faut observer la plus grande modération. Ibidem. Ce n’est pas qu’il Taille les « exterminer » et les expulser de l’Ecole. Elles sont utiles tant pour exercer les esprits que pour la théologie elle-même. Mais le sujet propre des discussions théologiqucs ce sont les questions surnaturelles. A celles-ci, il faut aller avec une conscience avertie de leur sérieux : Omnis theologus de re supernaturali dispntaturus nomen theologiœsccumipscreputet.titiilum suum theoloqi fréquenter lenot et qunral a se, non semel, sed sarpius, t. XII, C. v, § Sed cum, et § Sed requla.

S. Le genre de la question étant bien déterminé, c’est enfin le moment de In faire circuler à travers lous les lieux capables de lui fournir des arguments de solution, per omnes locos durât eam. illos pr.Tsertim qui rrunt quæstinni magisapli et cnnqrurntes. Si c’est une ouest ion

surnaturelle, il faut - projeter » de préférence la question dans les lieux qui S’appuient sur l’autorité divine : si naturelle, principalement dans les lieux qui doivent leur efficacité a la raison naturelle : si elle est mixte. per omnes dnrnliir opnrtrl. Se rappeler Cependant qu’il aucune question qu’il ne soit utile de conduire à

travers tous les lieux : la sainieLcriture.cn effet, nous

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