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LIEUX THÉOLOGIQUES. ÉLABORATION PRÉALABLE


1941-53, 1979-80, 1997-2000, 2001-2061 passim, 202730, 2071 sq. passim. Dans mon opuscule, La notion du lieu théologique, section iv, §2, n.2, j’ai tenté de donner une liste, aussi intégrale que possible pour l’époque où elle fut rédigée, des règles de critique théologique qui concernent la sainte Écriture.

2° Second lieu théologique : Les traditions apostoliques.

— Si nous laissons de côté les intéressantes discussions avec les protestants sur les traditions apostoliques, De locis, t. III, c. i, ii, vii, qui appartiennent à l’histoire, pour nous concentrer sur ce qu’il y a d’éternel dans ce lieu théologique, nous nous trouvons en face de quatre questions principales.

1. Question d’existence.

Cano l’expédie en quatre propositions, fortement appuyées de leurs preuves : L’Église est antérieure à l’Écriture et, par suite, le lieu théologique de son autorité déborde l’Écriture. — Toute la doctrine chrétienne n’est pas exprimée dans les Saintes Lettres. — Beaucoup de dogmes ne se rencontrent ni clairement, ni confusément dans l’Écriture.

— Les apôtres ont livré toute une partie de leur enseignement de vive voix. De locis, t. III, c. iv.

2. Question de la certitude des traditions apostoliques.

— Quatre préceptes : L’exemple des apôtres quiont confirmé la foi et établi les mœurs, à l’aide de traditions orales ou des coutumes de l’Église, autorise le théologien à regarder la tradition non écrite comme un moyen de preuve efficace. — Les plus graves autorités de l’antiquité chrétienne, p. e. saint Irénée, Tertullien, saint Basile, reconnaissent à la tradition et aux institutions de l’Église, issues des Apôtres, la même autorité qu’à l’Écriture. — Les Pères de l’Église objectent perpétuellement aux hérétiques la tradition ecclésiastique non écrite. — Le concile de Nicée et celui de Trente, consacrent l’autorité des traditions apostoliques comme égale à celle de l’Écriture.

3. Question de la possibilité de reconnaître les traditions apostoliques. — Quatre règles : Ce qu’a toujours tenu l’Église universelle et qui, d’ailleurs, n’a pas été institué par les conciles, doit être justement regardé comme institué par les apôtres. Saint Augustin, Contra donatistas, t. IV, c. xxiv. — Si les Pères, de tout temps, ont tenu d’un commun accord quelque dogme de foi et réfuté comme hérétique son contraire, encore qu’il ne soit pas contenu dans l’Écriture, c’est une tradition apostolique. Exemple, la perpétuelle virginité de la sainte Vierge, le nombre des Évangiles, la descente du Christ aux enfers. — Si quoi que ce soit est approuvé dans l’Église par le consentement commun des fidèles, que cependant aucune puissance humaine n’a eu le droit d’introduire, ce point est nécessairement de tradition apostolique. — Si, d’une seule voix, les hommes d’Église, f’(r ; >cr/r.ç/ash’c/, attestentque nous avons reçu des apôtres un dogme ou une coutume, il n’y a pas de doute que ce soit là une chose certaine : culte des images, symbole des apôtres.

4. Question des différents genres de traditions apostoliques. — Certaines traditions étaient manifestement transitoires : baptême au nom de Jésus, abstinence a sufforato rt sanguine ; d’autres ont un caractère perpétue 1. Celles-ci proviennent soit du Christ lui-même, soit dos apôtres inspirés par le Saint-Esprit. Elles donnent lieu à trois préceptes : Les traditions reçues du Christ ne peuvent être ni modifiées, ni abolies pnr l’Église. — Les traditions établies par les Apôtres comme pasteurs peuvent être, au contraire, modifiées ou abolies. - - Les vérités de foi enseignées par le Christ OU pur le Saint-Ksprit aux apôtres, et non écrites, gardent leur perpétuelle valeur dogmatique.

On trouvera, dans les ailleurs modernes, des règles

plus détaillées, et surtout distribuée ! de manière à

tpter davantage aux exigences des questions

théologiques. Celles que l’on vient de lire renferment tout l’essentiel, à part peut-être la règle principale du discernement des traditions apostoliques par le jugement authentique de l’Église. Cf. Berthier, De locis theol., part. 1, t. I, a. 3. Mais, outre que cette règle est implicite dans les précédentes, cf. les mots viri ecclesiastici, Cano, l’a mentionnée explicitement, De locis theol., t. VI, c. vii, § Adde quod apostolicarum. Ces préceptes de Cano suffisent donc à donner l’intelligence du génie propre de ce lieu et de la manière dont il doit être élaboré en vue de l’usage théologique, ce qui est présentement notre unique intention formelle.

3° Troisième lieu théologique : L’autorité de l’Église catholique. — Cano distingue ce lieu des lieux de l’autorité des conciles et du pape. Sans doute, dit-il, ces trois réalités n’en font qu’une : Hœc enim est una res prorsus proplerea quod connexa hœc et colligata sunt quemadmodum esse videmus humanum corpus et capui.De locis, t. V, q. v. Mais au point de vue lieu théologique, et non plus réalité, res, il y a des raisons de faire cette distinction, ainsi que pour renverser l’ordre naturel de leur énumération qui voudrait qu’on les ordonnât ainsi : papes, conciles, Église : nempe Sedis apostolicæ auctoritale sublala, concilia quæcumque non solum vacillare sed cadere. Ibid., t. VI, c. n. Autant en dira-t-il des conciles vis-à-vis de l’Église.

La raison pour mettre à part et en tête l’Église, c’est que, quand il s’agit de lieux, il convient de suivre non l’ordre naturel des causes, mais l’ordre naturel de l’esprit qui est d’aller du plus manifeste au moins manifeste. Or, l’autorité des conciles est plus connue et plus reçue, nolior et acceptior, que l’autorité du pape, ibid ; sous-entendons qu’il en est de même de l’autorité de l’Église vis-à-vis des conciles. La présente séparation se justifie donc par des raisons de logique théologique.

Que faut-il entendre ici par l’Église ? Cano l’établit par des discussions avec des hérétiques divers. Il appert que l’Église est d’abord la société des catholiques baptisés, justes ou pécheurs unis par la profession d’une même foi, et formant ainsi une nouvelle et spéciale république, et ensuite les chefs ecclésiastiques en qui l’autorité de cette république réside principalement, selon ce que dit Aristole, Ethic, t. IX, c. ix : civitatem id maxime esse, quod in ea est principale, « à tel point, estime le Philosophe, que ce que font et estiment les chefs d’une cité, la cité est censée le faire et le sentir.

Cano tient que l’autorité de l’Église ainsi définie a une telle efficace qu’elle fournit aux théologiens les plus fermes principes d’argumentation. De locis, 1. IV

c. IV.

Il l’établit en quatre conclusions qui sont autant de règles pour le jugement du théologien : L’Église ne peut avoir de défaillance dans la foi. — L’Église dans sa foi ne peut se tromper. — Non seulement l’Église antique n’a pu se tromper, mais l’Église actuelle et l’Église future, jusqu’à la consommation des siècles, ne peut ou ne pourra errer dans la foi. Non seulement l’Église universelle, c’est-à-dire la collection de tous les fidèles, possède cet esprit perpétuel de vérité, mais il appartient aussi aux princes et pasteurs de l’Église, en sorte que, vu l’impossibilité de recourir à la sentence de tous les fidèles, le jugement des chefs et pasteurs est l’interprète autorise du sentiment de l’Église. Ibid,

La richesse des preuves et documents amassés à l’appui de ces quatre conclusions, et en réponse aux objections qu’elles soulèvent, défie toute analyse. Ausfl i bien la dernière d’entre elles, faisant coïncider pratiquement ce lieu i connue le corps humain et sa tête avec les suivants, nous dispense d’insister. Cf. Cano. De loris, t. V, c. v. q, 5.

4° Quatrième lieu ihéoloçique : I.rs conciles. — Cano