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LIEBERMANN — LIEUX THÉOLOGIQUES


capitale pour le renouvellement de l’esprit catholique en Allemagne, tant au point de vue doctrinal qu’au point de vue de l’éducation du clergé. L’esprit ascétique et conservateur de l’école de Mayence date de lui : Geissel, Kâss, Weiss, Klee, Lennig, Miihe étaient parmi ses disciples préférés. Licbermann refusa, en 1823, le siège épiseopal de Metz, mais retourna en Alsace pour devenir le vicaire général de Mgr Tharin. Sous .Mgr de Trevern, il présida la commission de théologiens qui condamna, en 1838, les erreurs de Louis Bautain. Il mourut le Il novembre 1844 dans le couvent de Sainte-Barbe, où il s’était retiré depuis quelques années.

Les Instiluliones theologiæ dogmalicæ, son chefd’œuvre, 5 vol., Mayence, 1818-1827, 10e édit., 1870, furent longtemps en usage dans les écoles d’Europe et d’Amérique, même à Rome où l’on avait exigé une expression plus précise de la doctrine de l’infaillibilité. C’est un manuel clair et complet, pleinement traditionnel, plutôt historique que spéculatif. Ses Institutioncs juris canonici, inédites, se trouvent à la bibliothèque du grand séminaire de Strasbourg. Des sermons ont été publiés, par l’auteur lui-même, dans Râss et Weiss, Neue Bibliothek der katholischen Kanzelberedsamkeit, 2 vol., Francfort, 1829, et par Sausen, mais d’une manière peu fidèle, en 3 vol. : Predigten, Mayence, 1851-1853. Liebermann était connu comme auteur de tracts et de poésies populaires ; il rédigea de 1825 à 1826 la fameuse revue de son école : Der Katholik, réfugiée à Strasbourg.

Joseph Guerber, Liebermann, Fribourg-en-B., et l’art, du même, dans le Kirchenlexikon, t. vii, col. 2005 sq.

A. Schai.ck.

    1. LIEN H ART Théobald##


LIEN H ART Théobald, théologien alsacien (1765-1831). — Né à Truchtersheim, près Strasbourg, le 1 er septembre 1765, il fit ses études au collège de Molsheim, où des prêtres séculiers avaient remplacé les jésuites, et entra à l’abbaye bénédictine de Marmoutier (Maursmùnster), où il commença ses études de théologie. Il était prêtre au moment où éclatait la Révolution, qui le contraignit à se réfugier au delà du Rhin. Retiré à l’abbaye bénédictine de Schuttern, il réussit à grouper autour de lui un certain nombre de séminaristes d’origine alsacienne qui formèrent, au lendemain du concordat, le premier noyau de la nouvelle génération ecclésiastique. Rentré lui-même à Strasbourg après la tourmente, il réorganisa le grand et le petit séminaire, où pendant plusieurs années il dut suffire à toutes les tâches de la direction et de l’enseignement ; il eut finalement la joie, en 1823, de voir le grand séminaire réintégrer son ancien local d’avant la Révolution. Entre temps, Lienhart était devenu chanoine titulaire de la cathédrale, vicaire général et, à la mort de l’évêque de Strasbourg Saurine (8 mai 1813), vicaire capitulaire, fonction qu’il exerça jusqu’à la nomination comme évêque du prince de Croy (3 janvier 1820). Sous ce prélat et ses deux successeurs, Tharin et Le Pappe de Trévern, Lienhart continua ses fonctions de. vicaire général et de supérieur du séminaire ; en 1830, il donna sa démission et mourut le 22 mars 1831, ayant bien mérité de l’Église d’Alsace, à la restauration de laquelle il avait singulièrement contribué.

Son héritage littéraire est représenté surtout par ses Instituliones Iheologiæ dogmatiese in usum Seminarii Argentinensis, 3 vol., Strasbourg, 1819, 1820, 1821, résumé de son enseignement théologique. Ce manuel, très clair, très didactique, est loin d’être sans valeur ; l’ampleur donnée aux preuves d’Écriture sainte et surtout de Tradition contraste avec le caractère étriqué qu’ont en général ces arguments dans les ouvrages de la même époque. La partie proprement scolastique est moins développée, mais le livre fait

penser aux bons ouvrages théologiques de la fin du xviii siècle. Esprit très averti, Lienhart se rendait bien compte que la théologie dogmatique n’existait pas sans un fort appui des sciences auxiliaires. Il essaya de promouvoir l’étude de l’exégèse. Les thèses qu’il fit soutenir par ses élèves, et dont le résumé se trouve dans l’Analysis studii biblici pro specimine publico et lilterario quod præside Th. Lienhart dabunt seminarii alumni die XIII aug. 1*14, Strasbourg, 1814, montrent que l’enseignement de l’Écriture sainte était pour lors assez poussé. Lui-même écrivit une Disserlalio crilica in librum Judith. Il subsistait, paraît-il, en ms., un traité de Morale, un Studium biblicum, enfin un traité sur les Liturgies dont la première partie seule avait été imprimée. Nous n’avons pu réussir à les retrouver.

Sans être de premier plan, l’œuvre de Lienhart est intéressante en ce qu’elle nous montre la science ecclésiastique française, au début du xixe siècle, essayant de renouer, après la terrible crise de la Révolution, les traditions de la science du xviiie siècle. A ce titre elle méritait d’être signalée avec quelques détails.

Feller-Pérennès, Biograptue universelle, 1834, t. vii, p. 458, 459 ; F.-X. Schwartz, Populàre Kirchengeschichte von Slrassburg und Basel, Rixheim, 1878, t. u ; renseignements particuliers.

É. Amann.
    1. LIEUX THÉOLOGIQUES##


LIEUX THÉOLOGIQUES. — I. L’œuvre

de Cano. IL Sources, (col. 714). III. Définition des lieux théologiques (col. 716). IV. Leur classification (col. 717). V. La double tâche du théologien (col. 718). VI. L’élaboration préalable des lieuxthéo logiques (col. 722). VIL Les Questions théologiques (col. 733). VIII. Les notes théologiques (col. 734). IX. L’utilisation des lieux théologiques (col. 736). X. La destinée des lieux théologiques après Cano (col. 739). XL Essai d’une systématisation des lieux théologiques d’après les Topiques d’Aristote (col. 742).

I. L’œuvre de Cano. — Le traité des Lieux théologiques constitue une création de Melchior Cano, De Locistheologicis libri duodecim, Salamanque, 1563. Sans doute, il a des antécédents dans l’histoire de la méthodologie théologique, mais ce ne sont que des essais fragmentaires, cf. Albert Lang, Die Loci theologici des M. Cano, c. i, p. 21-54. spécialement, p. 62, note 8 ; p. 63, note 1, p. 64, notes.

L’expression même Lieux théologiques existait, mais, comme l’a noté Cano, elle désignait tout autre chose à savoir, soit les positions maîtresses de la théologie ou d’un système théologique, capita rerum illuslrium, dont l’Index tertius de la somme de saint Thomas, cf. édit. Nicolaï, 1663, peut donner une idée ; soit des collections des lieux communs de la théologie, Loca communia quæ de uniuersa re tractari soient, Cano, De Locis, t. I, c. iii, dont on trouvera la recension dans la table des trois derniers volumes du Nomenclator lillerarius de Hurter ; ou encore, les lieux théologiques des protestants, Mélanchthon, Calvin, etc., mentionnés ici même par Cano. Ibid. Cf. A. Lang, op. cit., c. ii, § 2 : L’emploi des Loci dans la théologie, p. 62-64 ; cf. ibid., § 3, p. 70.

L’œuvre de Cano, au contraire, se présente comme un traité systématique de méthode théologique. Cano revendique hautement la paternité de ce genre d’ouvrages. Citons : Id autem libentius feci quod nemo theologorum adhuc, quod equidem sciam, hoc genus argumenti tractandum sumpsit. De locis th., Proœm. ; cꝟ. t. III, c. m ; t. XII, c. ii, § N^cenim qui~qnam. L’histoire ratifie son témoignage, cf. A. Lang. loc. cit. Sans doute Barthélémy de Carranza, dans un discours prononcé au concile de Trente, et imprimé à Venise en 1547, seize ans avant l’ouvrage de Cano. avait énoncé l’idée des lieux théologiques, et en partie leur division,