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    1. LIBÉRALISME CATHOLIQUE##


LIBÉRALISME CATHOLIQUE. LE LIBÉRALISME MODERE

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Le catholicisme reprenait possession de l’opinion ; la presse s’était prononcée en majorité, pour les prévenus. Comme il devait céder sur le droit d’association, laisser dom Guéranger faire revivre Solesmes, Lacordaire ressusciter l’ordre des Frères Prêcheurs et paraître en costume monacal dans la chaire de Notre-Dame, le gouvernement dut s’occuper de la liberté d’enseignement. « Nous n’avons pas besoin de dire, avait déclaré le procureur général Persil au procès de l’école libre, que, quand nous invoquons le monopole, nous nous appuyons sur une législation expirante. » Ailleurs : « Nous reconnaissons comme obligation du gouvernement la liberté de l’enseignement. Vous l’aurez cette liberté. » Mais il ajoutait : « Vous l’aurez dans des conditions qui vous empêcheront de faire ce que vous voulez, d’enseigner une religion qui ne peut être une religion française. » Loc. cit., p. 312. Il y avait pourtant trop de préjugés irréligieux ou gallicans dans le gouvernement ou le parlement pour que pleine satisfaction fût donnée vite aux amis de la religion et de la liberté. Surtout l’épiscopat, peut-être parce que l’idée vient de l’Avenir, hésite à entrer en lutte ; il est satisfait, d’ailleurs, du régime de ses petits séminaires et il attend.

En 1833, cependant, Guizot, chargé de l’instruction publique dans le ministère de Broglie, fait voter la loi du 22 juin qui, organisant l’enseignement primaire, consacre également la liberté dont cet enseignement jouit en fait ou à peu près. Cette loi ne satisfera pas tous les catholiques, cf. Riancey, op. cit., mais le débat porte principalement sur la liberté de l’enseignement secondaire : cet enseignement est le vrai domaine du monopole. A l’exception des petits séminaires soumis à un régime spécial bien déterminé, l’Université tenait sous une étroite dépendance et soumettait à un tribut les établissements ecclésiastiques qui obtenaient le droit de vivre. En 1830, Guizot, redevenu ministre de l’instruction publique, présentait, concernant cet enseignement, un projet libéral qui eût satisfait les catholiques, mais auquel les libéraux de la Chambre, toujours hostiles à l’indépendance de l’Église et aux congrégations, unirent deux amendements contraires a une pleine liberté. Le gouvernement retira son projet. En 1838, Salvandy revient en arrière, et remet en vigueur les exigences les plus tyranniques du décret Impérial du 15 novembre 1811. Montalembert intervient auprès de Villemain qui a remplacé Salvandy. Il ne demande pas la mort de l’Université ; qu’elle vive pour ceux qui veulent de son enseignement, mais que l’État ne nous refuse pas le droit, disait-il, « de dérober nos enfants à un enseignement qui, depuis les degrés les plus élevés jusqu’aux plus infimes, nous est à bon droit suspect et plus que suspect ! » Lecanuet, "/ ;. cit., p. 150. Cousin, qui remplaça quelques mois Villemain, mars-octobre 1840, prépara un projet dont la seule annonce indigna les catholiques militants. La lutte était commencée pour ne plus l’arrêter jusqu’au triomphe définitif.

Ce furent des prêl res qui annoncèrent le combat. En mai ikio. paraissait un livre Intitulé : Le monopole universitaire dévoilé à la France libérale et a la France catholique ; les doctrines, lu institutions de l’Eglise et le sacerdoce enfin justifiés devant l’opinion du pays, par une société d’ecclésiastiques sous la présidence de M. l’abbé Rohrbacher, el qu’avait rédigé l’abbé Garât,

aumônier du collège royal de Nancy. Il attaquait le

monopole au nom du droit de I en faut catholique d être élevé catholiquement, mais aussi au nom de la Charte, de la liberté des cultes, de la liberté familiale, de la liberté en général : le monopole est en contradiction avec nos institutions libérales ; du p rès et de la société menacée, que seul i nent de l’Église peu) sauver. Quelques m S lllemaln qui aval) repris

son poste, déposait un nouveau projet qui se rapprochait de celui de Guizot en 1836, mais qui enlevait aux petits séminaires leurs privilèges. C’était une transaction, mais cette transaction se faisait aux dépens des séminaires : cinquante-six évêques protestèrent. Villemain retira son projet.

2. La lutte portée sur le terrain de la liberté et du droit commun, autrement dit du catholicisme libéral. — Les catholiques demandaient la fin du monopole universitaire et la liberté d’enseignement.

Mais qu’entend lient-ils par là ? la mort de l’Université et le droit d’enseigner pour l’Église seule en vertu de sa mission divine ? ou simplement pour elle ce droit à côté de l’Université, et ce droit pour tous, non par un privilège, mais au nom de la Charte et de la liberté promise à tous ? Cette solution avait été celle de l’Avenir ; depuis, les catholiques avaient mêlé les deux, et leurs adversaires les accusaient de ne vouloir la liberté que pour eux-mêmes. Mais Montalembert était resté fidèle à la solution de l’Avenir : l’Université paraît d’ailleurs trop puissante, trop organisée pour disparaître ; il faut transiger avec elle ; dans l’état présent des esprits, l’Église ne peut espérer pour elle seule le droit d’enseigner ; et mieux vaut pour elle que son droit soit sous la garantie de la liberté commune. Il proclame cela dans sa correspondance, avec Villemain par exemple, Lecanuet, loc. cit., dans ses conversations, et il rallie à ses idées, avec Lacordaire, de nouveaux venus dans la lutte, le jésuite Ravignan, l’abbé Dupanloup. Il gagne Veuillot qui, entré à l’Univers en 1838, y mène une campagne ardente

— des esprits modérés la désapprouvent — pour la liberté d’enseignement, et qui, en septembre 1843, publie sa fameuse Lettre à M, Villemain. Un auxiliaire lui vient encore dans la presse, c’est le Correspondant. qui renaît avec les anciens libéraux catholiques de la Revue européenne. Enfin, en octobre 1843, Montalembert lance un véritable manifeste, une brochure intitulée : Du devoir des catholiques dans la question de la liberté d’enseignement, avec ces mots de saint Anselme en épigraphe : Nihil magis diligit Deus in hoc mundo quam libertatem Ecclesise suæ. La France est irréligieuse ; elle le doit au monopole. Il faut le détruire, non l’Université. Ainsi, du reste, le veut la Charte. La liberté de l’enseignement serait une réalité. si les évêques et les pères de famille catholiques l’avaient voulu. Ils ont compté sur le gouvernement, sur les Chambres, calcul illusoire. Qu’ils agissent eux mêmes ; qu’ils s’entendent, qu’ils se groupent et for ment un parti ; qu’ils imposent leurs volontés a leurs représentants pendant les élections ; qu’après, ils agissent par leurs pétitions : 1e résultat ne se fera pas attendre.

Montalembert ne veut pas recommencer Lamennais. Il tient à conquérir l’épiscopat à sa tactique el à ses idées. Le temps presse. La lutte devient d’une extrême violence et s’égare sur les personnes. En 18 13. ont paru : Le monopole universitaire, destructeur de la religion et des lois, un énorme volume du jésuite I >eschamps, publié sous le nom de Desgarets, chanoine de Lyon, qui veut justifier sa définition de l’Unlveisite i cette sentlne de tous les vices > ; le Simple coup

d’œil sur les douleurs et les espérances île l’Eglise ttUX

l>rises avec les tyrans des consciences et les vices du

XIX* Siècle, du curé limousin Védrine ; L" liberté d’en seignement est-elle une nécessité religieuse et sociale’de l’abbé Carie ; le Mémoire à consulter, de l’abbé Corn balot, qui tous demandent, dans un délai plus ou moins proche, la mori <ie l’Université. Les universl

se défendirent et défendirent leur maison :

ainsi Villemain, Cousin, Guizot, Mlgnet : quelques uns tii.ii t une contre offensive où Ils visèrent surtout les jésuites : ainsi Michèle ! el Qulnet, dans les cours