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    1. LIBÉRALISME CATHOLIQUE##


LIBÉRALISME CATHOLIQUE. LAMENNAIS ET L’AVENIR

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« qu’en rétablissant la censure, on aurait soin d’en

exempter leurs écrits… Le privilège de la liberté est impossible aujourd’hui… » Exercée par l’État, la censure serait une servitude pour l’Église et en soi une absurdité ; à quel titre un pouvoir serait-Il le juge infaillible du vrai et du faux ? La censure d’État, « c’est M. de Montalivet fait Dieu ». C’est chose odieuse également : « Elle cache, je ne sais où, quelques hommes vendus… qui décident de toute vérité selon la colère ou l’ignorance de chaque jour…, coupent les pages de l’Évangile, émondent les bulles apostoliques et les mandements épiscopaux…. » Et comme, aujourd’hui, la censure ne peut être exercée par l’Église, « reste donc la liberté et Dieu soit béni ! » Car « loin que l’ordre soit détruit par le libre combat de l’erreur contre la vérité, c’est ce combat même qui est l’ordre primitif et universel. Rien dans les desseins de Dieu n’a été accompli par voie de censure et tout l’a été par voie de répression ; … il a préféré au régime de la censure le régime de l’enfer. » Enfin il’faut avoir confiance dans la puissance de la vérité. « La vérité persécutée a triomphé partout de l’erreur privilégiée et puissante, voilà l’histoire. » Ibid., p. 505-509. Quant aux scandales et aux ravages de la presse : « Un clergé vertueux, disait le Prospectus, ibid., t. i, p. iv et v, n’a rien à craindre de la publicité. Si des scandales contristent la piété, le premier devoir des catholiques est de ne pas laisser à d’autres le soin d’élever, entre les coupables et le sanctuaire profané, la barrière du mépris public » et si l’on a dû gémir « sur les ravages de la presse…, ceux qui les déplorent y ont contribué. Car, à raison même de leurs préjugés contre elle, ils ont négligé de s’emparer. .. de cette arme puissante » ou quand ils l’ont maniée pour défendre la religion « ayant lié sa cause… à celle du pouvoir arbitraire…, ils n’ont pu exercer sur les masses aucune influence. « 

b. La liberté d’enseignement. — Voir plus loin. L’ensemble de la question sera exposé à propos de la loi de 1850, col. 566.

c. La liberté d’association. — « Il nous manque la liberté d’association, puisque vingt Français sont encore impitoyablement privés du droit de se réunir pour s’occuper d’objets politiques, religieux…, ou autres (art. 29 du Code pénal). » T. v, p. 483. « Tout ce que nous pouvons dire en ce moment, lisait-on déjà le 17 octobre 1830 dans l’Avenir, c’est que la législation de l’Empire, conçue dans un esprit de défiance et dans le but d’obtenir une obéissance passive… doit subir d’importantes et nombreuses modifications. » T. i, p. 14. « La liberté d’association, lui semblait-il, a pour règle ce principe très simple, que tout ce qu’un seul peut faire légitimement, plusieurs le peuvent faire ensemble aussi légitimement. » T. ii, p. 326. Toutefois, avait-il déjà précisé, le 17 octobre 1830, loc. cit., (en ce temps où les sociétés secrètes provoquaient si facilement l’émeute, la réflexion s’imposait) : à cause des graves abus qui résulteraient bientôt de cette liberté laissée à elle-même, elle <l<>it être soigneusement réglée par les lois. Dans tes limites, elle lui paraissait devoir être complète. C’est là encore un droit natu rel, parce qu’on ne peut rien que par l’association, tant

l’homme est taible… quand il est seul. » C’est une conséquence de l’état social et politique île la France. Dans on pays où il n’y a plus ni classes, ni corporations. où il n’existe que dis Individus, point de défense possible contre l’arbitraire sans la Liberté d association », et là OÙ vit - un s y si eu ie d’insl il ul ions fondé sur l’élection et la discussion », elle sud comme conté quenee. ». I.Ile permet eu effet a l’opinion i de se former et de se manifester » avec un caractère de puis

sanec tel qu’on ne peut en aucun cas la méprisai OU

la méconnaître. » Ibid., et t. i, p, 357. L’Aotnir, on i s a, réclamait pour les ouvriers Le

droit de coalition, comme l’on dira, et il ne cessa de réclamer le droit de se former librement pour les communautés religieuses, sans quoi, disait-il, « leur existence dépendrait du despotisme administratif et des triomphes successifs des partis. » Déclaration, t. ir, p. 477. Leur droit de vivre est incontestable. Qu’on n’objecte pas « les lois qui abolissent les ordres religieux ! » Ou ces lois enlèvent simplement aux ordres religieux « le caractère légal », et cela « ne touche en rien au droit d’habiter en commun », ou « elles interdisent les vœux religieux eux-mêmes » ; dans ce cas « elles sont contraires à toutes les notions de justice admises jusqu’ici » et à la liberté de conscience ; elles sont donc nulles de plein droit. Elles sont de plus formellement abolies par la Charte : n’a-t-elle pas, « en proclamant la liberté de conscience et en déclarant l’État étranger, comme tel, à toute religion, interdit à l’État de s’occuper des opinions et des attitudes religieuses des citoyens ? » L’État n’a-pas à s’enquérir de ce qu’ils ont ou n’ont pas promis à Dieu. T. vi, p. 383-386 ; tous les articles relatifs à l’expulsion des trappistes de la Meilleraye.

d. La liberté pour V Église, par la séparation de V Église et de l’État et la liberté de conscience. — C’est la partie la plus audacieuse et, partant, la plus contestée du programme de l’Avenir, que la façon dont il envisage les rapports de l’Église et de l’État. Pour l’Église, il demande la liberté, c’est-à-dire, une indépendance absolue, complète, dans l’ordre spirituel, le droit de se régir selon ses lois, sans contrôle et sans restriction, mais il ne demande que la liberté, aucun privilège, aucun appui spécial de l’État, le droit commun. Quant à l’État, il doit se considérer comme « placé en dehors de toutes les communion’- », sans autorité sur aucune d’elles, mais aussi sar.. autre obligation à l’égard de toutes que d’assurer le respect de leur liberté. Cela suppose que l’État, areligieux ou, si l’on veut, athée, professe la liberté des cultes et la liberté de conscience et que l’Église accepte pratiquement ces deux choses. Cꝟ. 18 octobre 1830, De la séparation de l’Église et de l’État, article de Lamennais, 1. 1, p. 23-30.

La Révolution, à partir de l’an III, avait entendu, elle aussi, séparer l’Église de l’État, mais ses lois n’avaient accordé à l’Église qu’une liberté restreinte, subordonnée, tracassière et périlleuse. C’est une pleine liberté, sans conditions comme sans restrictions, que l’Avenir réclame pour l’Église. Comment justifie-t-il cette demande, inattendue malgré quelques mots déjà jetés ? Par les raisons qu’il donnait à lliglise de se rallier à la liberté. Sans doute « l’Église et l’État sont inséparables : ils doivent être unis comme l’âme et le corps : voilà l’ordre », l’Église animant, inspirant l’État, l’État mettant ses forces au service de l’Eglise : voilà l’idéal. Mais cet idéal est impossible aujourd’hui. Il suppose l’unité morale. Or la France n’a plus cette unité ; loin de là. Si l’État protège l’Église, « il suscite contre lui une opposition semblable à celle qui a contribué si puissamment à renverse]’L’ancien pouvoir. » S’il s’obstine, « l’opinion montera commi llols de la mer et balaiera les faibles digues qu’il essaiera de lui opposer. Ibid., p. 2l-21’i. l.a séparation est d’ailleurs voulue par la nouvelle loi fondamen-Ibid. Elle est un fait accompli. II n’y a plus de religion d’État ; la nouvelle charte a décidément affranchi tous les cultes ; la même liberté leur esi indistinctement garantie. A quel titre donc le gouverne ment viendrait il se mêler du catholicisme.’i T. i. p. 13.

Quant a l’Église, elle tt’S pas besoin des gouverne

ments, elle n’est point un vaste système d’administration qui emprunte des gouvernements sa force, son éclat, vi puissance… Qu’il y a loin de ces idées à

celles que la foi nous donne de eell. n’Indique,