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485 LÉVITIQUE (LIVRE DU). ORIGINE DES PRESCRIPTIONS ET INSTITUTIONS 486

de leur tente, et celle-ci, ouvrant à l’Est comme la porte du temple de Jérusalem, ils se tiennent donc face à l’autel, la tête de la victime étant dirigée vers le Sud. » R. Dussaud, Le sacrifice en Israël et chez les Phéniciens, Paris, 1914, p. 12. Il en va de même pour le sacrifice pacifique : « Tu m’élèveras, dit Jahvé dans le Code de l’Alliance, un autel de terre sur lequel tu m’offriras tes holocaustes et tes sacrifices pacifiques. » Exod., xx, 24 ; son élément caractéristique, à savoir le repas qui l’accompagne et qui donne aux sacrifices anciens des récits du Jahviste et de l’Élohiste une note joyeuse et familiale, subsiste et n’est pas exclu de la réglementation sacerdotale, dont l’esprit, tout pénétré du double sentiment de la sainteté divine et de l’indignité humaine, se serait peu prêté, dit-on, à de telles manifestations.

Mais c’est surtout au sujet du sacrifice pour le péché et du sacrifice pour le délit que la question d’origine mosaïque est posée. Est-il vrai de dire, selon une opinion généralement reçue, que dans la période préexilienne nulle mention n’est faite de ces sacrifices, la première, en dehors des textes sacerdotaux du Pentateuque, se rencontrant dans Ézéchiel, xun, 19 ; xliv, 27 ; xlvi, 20 et le rituel du Code v acerdotal, à leur sujet, n’étant que la codification ultérieure et finale d’usages religieux, ignorés dans les temps anciens ? Gautier, Introduction à l’Ancien Testament, Lausanne, 1914, t. i, p. 104. L’idée fondamentale du sacrifice pour le péché ou pour le délit qui est l’idée d’expiation, les termes techniques eux-mêmes qui désignent l’un ou l’autre de ces sacrifices ne sont pas inconnus dans l’Israël des rois. Ainsi dans le récit des travaux entrepris pour la réparation du Temple sous le règne de Joas, il est dit que l’argent des sacrifices pour le de lit et des sacrifices pour le péché, ’â dm et hatlâ’t n’était point apporté dans la maison de Jahvé, mais était pour le prêtre, IV Reg., xii, 16, ce qui veut dire que les coupables au lieu d’amener eux-mêmes les victimes en remettaient le prix entre les mains du prêtre qui assurait l’offrande. Il ne s’agit point là, en efîet, d’une simple amende pécuniaire transformée dans la suite en sacrifice spécial (Wellhausen, Prolegomena zur Gcschichte Isræls, e édit., Berlin, 1905, p. 72, 73) : on ne voit pas à quel titre les prêtres pourraient prétendre à cette amende, n’ayant subi aucun dommage. « Ce texte ne prouve pas seulement l’existence, au temps de Joas, des deux sacrifices lévitiques ; il met sous nos yeux une institution florissante, en vogue parmi le peuple et respectée du pouvoir. Malgré d’urgentes nécessités, l’autorité royale défend de faire servir l’argent des sacrifices expiatoires à d’autres fins même aussi pieuses que la reconstruction du temple : tant l’expiation est un devoir sacré I » A. Médebielle, L’expiation dans l’Ancien et le Nouveau Testament, Rome, 1924, t. i, p. 62. C’est la même conclusion qui se dégage du reproche adressé par le prophète Osée aux prêtres qui se repaissent du péché du peuple, Os., iv, 8 ; sans doute il ne s’agit pas des profits que les prêtres auraient tiré des sacrifices pour le péché, bien que le terme employé soit celui-là même qui désigne le sacrifice ou la victime pour le péché a fd’t, i mais la manière dont le prophète s’exprime renferme une allusion à la loi qui attribuait aux prêtres les viandes de la victime pour le péché dans le cas où ccllc-ei ne devait i > ; i s être entièi ement consumée. I.cv.. vi, 25 sq. ; ! "L. i.iv, 29. Le prophète veut donner à entendre) en rappelant par ion tangage figuré la prérogative sacerdotale relative a la consommation des viandes sacrées, combien est odieuse la prévarication qu’il dénoi

Qu’à l’époque d’O ri fier pour le péché fût

inconnu (Wellhausen et d’autres/, c’est une assertion gratuite et inexacte. » A. van Hoonacker, op. cit., P 16. l.a façon < afin dont Lzéchiel prescrit, tantôt de

brûler les restes de la victime pour le péché en dehors du sanctuaire, Ez., xun, 21, tantôt de réserver aux prêtres la consommation des viandes des sacrifices pour le péché et pour le délit, Ez., xliv, 29, suppose connues les prescriptions lévitiques à ce sujet. De Michée, vi, 7, où quelques-uns voient une allusion au sacrifice pour le péché de l’âme, non plus que du Ps. xxxix, 7, on ne saurait tirer argument.

Que ces sacrifices expiatoires soient très anciens en Israël, c’est ce qui semble bien résulter de l’existence de sacrifices analogues chez les anciens peuples de Canaan, Philistins et Phéniciens. Un épisode de l’histoire de l’arche au temps de Samuel peut paraître significatif à ce sujet, I Reg., v, vi. Les Philistins pour détourner la colère de Jahvé qui les frappait durement depuis qu’ils s’étaient emparés de son arche sainte, la renvoyèrent en son lieu, accompagnée d’un tribut selon la recommandation que leur en avaient faite leurs prêtres et leurs devins. Or le mot hébreu, employé pour désigner ce tribut, est le même que celui du Lévitique, désignant le sacrifice pour le délit’âsâm I Reg., vi, 3-4 ; est-ce à dire qu’il faille leur donner le même sens ? non, assurément, mais on a fait justement remarquer que « les trois éléments qui constituent l’'âsâm cananéen : restitution, amende et sacrifice, se retrouveront dans l’'âsâm lévitique, en sorte que les institutions les plus caractéristiques du « Code Sacerdotal » plongent leurs racines dans les couches les plus profondes des traditions sémitiques et empruntent les noms de la langue populaire. » A. Médebielle, op. cit., p. 20.

La découverte d’inscriptions puniques, de celle en particulier qui est connue sous le nom de « tarif de Marseille », trouvée en 1845, permet d’intéressants rapprochements entre sacrifices lévitiques et sacrifices phéniciens. Cf. Corpus Jnscriptionum semilicarum, t. i, n. 165, Lagrangc, Études sur les religions sémitiques, Paris, 1903, p. 395-404. Des trois sortes de sacrifices pour lesquelles le « tarif de Marseille >indique la rétribution en argent, due au prêtre, il en est une qui répond au sacrifice pro peccato ou pro delicto des Hébreux. « A vrai dire, rien n’indique qu’il soit expiatoire, mais il rentre du moins dans la même catégorie, quant à la disposition de la victime. » Lagrange, op. cit., p. 398. Des ressemblances entre sacrifices carthaginois et lévitiques on a conclu à leur commune et antique origine ; « les uns et les autres, dit R. Dussaud, dérivent d’une source commune, ils sont empruntés au même fond qui ne peut être que le rituel cananéen, autrement dit phénicien. Pour les Israélites, l’emprunt doit remonter au temps où, installés et acclimatés en Terre sainte, ils adoptèrent la langue et l’écriture cananéennes avec le genre de vie du pays. Le rituel dut être officiellement fixé à Jérusalem lors de la dédicace du temple par Salomon. » Le sacrifice en Israël…, p. 89. Si l’hypothèse d’un emprunt ne s’impose pas, car de telles ressemblances s’expliquent suffisamment par l’application de principes généraux identiques, appartenant au Fond commun des anciennes traditions sémitiques, il n’en demeure pas moins que [’antiquité du rituel lévilique se tlOUVl confirmée par sa comparaison avec les riles plieni riens. C’est encore une conclusion du même genre que suggère la découverte d’ex VOtO expiatoires (lie/

les Sabéens et les Minéens : les vœus ci les sacrifices dont il y est fait ment ion. pour effacer les Impuretés, équivalant au sacrifice pour le péché. Sans doute cet Inscription ! ne remontent guère, pour les plus an ciennes, au delà du i" ou du iie siècle avant I (. mais elles apparaissent comme des témoins de tradl

ti.-ms religieuses dont la haute antiquité est i n’rali

ment admise I) II. Mùller, Sûtlnrabische Altrrthilmrr.

lenne, 1899, p. 20 sq ; Pt. rfommel, Die alttsræliUscht