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LÉON VI LE SAGE. SA POLITIQUE ECCLÉSIASTIQUE


de l’année suivante, en mettant au monde un fils qui, hélas ! ne vécut point. Ibid.,

La situation se compliquait donc de plus en plus : car Léon songeait à prendre une quatrième femme. « Le troisième mariage de l’empereur, bien qu’il se justifiât par des raisons assez plausibles, et que l’Église, tout en le tenant pour « un acte malpropre », ne l’eût point formellement blâmé, avait scandalisé cependant beaucoup d’âmes pieuses. » On l’avait bien remarqué au moment des funérailles d’Eudocie. Pour les contemporains « un quatrième mariage devait paraître une simple abomination. L’Église l’interdisait de la façon la plus formelle ; la loi civile ne prévoyait même pas qu’on pût arriver à ce degré inouï de perversité. Aux yeux des Byzantins une telle union était pire que l’adultère. Mais, quoi ! Léon avait besoin d’un fils. » Diehl, op. cit., p. 196-197.

L’attentat préparé contre le basileus, sur l’instigation de son « frère » Alexandre, et qui faillit réussir, le jour de la Mesopenlecosté 902 (21 avril) ou 903 (Il mai), Vita Euthym., xi, 1-7, p. 35-36 ; Léo Gramm., P. G., t. cvni, col. 1108 ; Sym. Mag., t. cix, col. 765, était venu encore, après une série de conspirations, confirmer les inquiétudes de l’empereur et aviver ses regrets de ne pas avoir un héritier présomptif. Il commença par vivre en concubinage avec Zoé Carbonopsina, une fille de l’aristocratie byzantine, petitenièce de Théophane le Chronographe, laquelle prit sur Léon un grand ascendant en vue de se faire, épouser. Le basileus, qui songeait lui-même au mariage, semble bien avoir voulu se ménager à cette fin l’indulgence de l’autorité ecclésiastique, en installant sur le trône patriarcal, après la mort d’Antoine Cauléas (12 février 901), un candidat dont il escomptait la complaisance, Nicolas, parent de Photius, ancien condisciple de Léon lui-même et son frère adoptif (Vita Eulhymii, xi, 15), et qui était déjà honoré du titre de conseiller secret ou de mystikos. Le nouveau patriarche se montra d’abord intransigeant et refusa, semble-t-il, de se prêter à une violation des canons ecclésiastiques en matière matrimoniale. Mais des circonstances spéciales permirent bientôt à l’empereur d’influencer en sa faveur la conscience souple du pontife. Nicolas, alors assez mal en cour, avait pris une certaine part, en 904, à la conspiration d’Andronic Doukas contre Léon. Lorsque Andronic fut obligé de s’enfuir en Lycaonie d’abord, puis chez les Arabes (printemps 905), quelques-uns de ses amis, pour se faire pardonner, livrèrent au basileus les documents de la révolte : l’on y trouva une lettre autographe de Nicolas, preuve flagrante de sa trahison. Vita lùilhymii, xi, 10-16. Cette révélation, jointe à la persuasion que le patriarche n’était pas sans avoir été prévenu de l’attentat de Saint-Moldos, excita un profond ressentiment chez l’empereur, qui résolut de se venger. Ibid., xii, 1-4, Nicolas comprit qu’il n’avait qu’un moyen de salut : c’était de désarmer, à force de complaisance, la colère du souverain. Ht dès lors il changea résolument de tactique et se montra prêt à toul accorder. Ibid.. xi. 16.

Zoé Carbonopsina allait être mère, et Léon caressait avec joie l’etpoir de sa prochaine paternité. « On vit alors le hautain patriarche venir chaque jour au palais. Il dînait avec le hasileus et s.i maîtresse, il affirmait

a Léon que l’enfant attendu serait un garçon, et il

prescrivait à cet effet à sept prêtres de dire pendant sept jours. ; i Snirit <--Sop)ijc, des prières solennelles : puis, gravement, de ses mains sacerdotales, il bénissait le ventre de la favorite, et déclarait que le prince qui allait naître ferait la grandeur et la gloire de l’Église. »

Diehl. op. cit., p. 20(i-201, résumant les données <ie la Vita Buthymii, m. l « : xii, 2K 2’» Ce fut Constantin Porphyrogénète qui naquit, à la ml mal ou au début de

septembre 905. C. de Boor, op. cit., p. 117-118 et 127. Il fallait maintenant faire légitimer ce fils tant désiré. « Nicolas s’y prêtait volontiers ; mais les autres évêques résistaient », déclarant que « la naissance d’un enfant ne pouvait rendre licite une union prohibée », P. G., t. exi, col. 196 D, et ils refusaient en conséquence de célébrer le baptême, surtout avec les honneurs impériaux dont Léon voulait l’entourer. Finalement, on s’avisa d’un expédient. Comme, après tout, ainsi que le patriarche l’expliquait plus tard, « c’était un sentiment humain d’aimer son enfant », Nicolas, Epist., xxxii, P. G., t. exi, col. 196, le clergé promit de baptiser le fils, si Léon promettait de se séparer de la mère. Ibid., col. 197. A ce prix, le 6 janvier 906, le baptême fut célébré dans Sainte-Sophie par les propres mains du patriarche : Alexandre, frère du basileus, et Euthymios furent les parrains du jeune Constantin Porphyrogénète. Vita Euthym., xi, 16-17 ; Léo Gramm., P. G., t. evin, col. 1112 ; Nicol. Myst., loc.cit., Syméon Mag., t. cix, col. 769 D. Trois jours ne s’étaient pas écoulés, que Léon VI, oublieux de promesses faites uniquement pour le besoin de la cause, introduisait Zoé Carbonopsina au palais avec tous les honneurs impériaux et la couronnait Augusta. Nicol. Myst., Sym. Mag., loc. cit. Nicolas prétend qu’il ne se trouva aucun prêtre pour bénir le mariage ; le continuateur de Théophane et Syméon Magister affirment, au contraire, que le prêtre Thomas se prêta à cette cérémonie et fut ensuite pour ce motif déposé de sa charge. En tout cas, l’émoi fut considérable dans tous les milieux ecclésiastiques et autres à Constantinople. Le patriarche dut interdire à l’empereur l’accès du sanctuaire. 11 semble bien que ce soit Léon qui ait eu alors, en vue d’arriver à faire légitimer son union, l’ingénieuse idée d’en appeler à l’Église universelle, de consulter sur l’affaire de la tétragamie le pape de Rome, les patriarches d’Alexandrie, d’Antioche et de Jérusalem. Nicolas, qui dans sa lettre au pape, Epist., xxxii, P. G., t. exi, col. 200 D, s’attribue à lui-même cette proposition, paraît bien plutôt avoir été obligé de la subir avec toutes ses conséquences.

En attendant, Léon garda Zoé au palais, refusant de s’en séparer même pour un jour, ibid., col. 201 A ; et la seule concession qu’il consentit au patriarche, ce fut de se soumettre provisoirement à son interdit. Cette soumission même n’était pas sans embarrasser sérieusement Nicolas. La Vita Euthymii, c. xi et xii, nous montre le prélat tantôt cherchant dans les écrits patristiques des textes favorables aux quatrièmes noces, tantôt offrant à Léon (notamment le l rr niai 906, fête de la Dédicace, et le 6 août, fête de la Transfiguration, C : Roor, p. 38 et 127) de franchir le seuil du sanctuaire sans attendre les décisions de Rome et des patriarches orientaux, déclarant hautement que lui-même l’y recevrait. L’empereur évita de se prêter aux suggestions de Nicolas. « Tant que je ne verrai point ici les évêques de Rome, déclara-t-il, je n’userai point d’une autorisation que vous m’offrez en dehors d’eux. » Vita Euthym.. xi. 22. Piqué au vif du peu de cas ainsi fait de son autorité. Nicolas alla Jusqu’à dire qu’il était en mesure, à lui seul, sans l’intervention des autres patriarches, d’accorder au basileus la dispense sollicitée. Ce que saint Athanase a fait pour les troisièmes noces sans Imposer de pénitence, comment aurais-je peur de le faire pour les quatrièmes avec une pénitence ? » énonçait-il hardiment..le serais vain il funeste, si [’apportais encore quelque retard a cette

affaire, pour attendre une réunion nu l’arrivée des

Romains, alors que je puis moi même recevoir l’en

perenr à l’intérieur de l’église. Vita Euthym. i. 23-24. « Voilà comment s’exprimait « ’ « lui qui allait

bientôt se montrer Irréductible sm cette question de la tétragamie, se poser en défenseur héroïque des saints