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LÉON 1er. LES DERNIÈRES ANNÉES DE SAINT LÉON


pour faire parvenir cette réponse aux évêques orienraux. Ses légats au concile ont approuvé la foi délinie, saint Léon renouvelle cette approbation, en ce qui concerne la cause de la foi, car c’était pour cette cause seulement que le concile avait été convoqué ex prxcepto christianorum principum et ex consensu apostolicx Sedis. Quant à ce qui regarde l’ordre dans l’Église, le pape ne veut rien savoir de ce qui va contre « les droits des Églises établis par les trois cent dix-huit Pères divinement inspirés » de Nicée. On a du même jour, 21 mars 453, dans le même sens une lettre à Marcien et une lettre à Pulchérie. Jaffé, n. 491 et 492.

Cependant saint Léon continue de tenir rigueur à Anatolios : il déclare à Julien de Kos, 21 mars 453, Jafïé, n. 493, qui l’a prié d’écrire à Anatolios, qu’il n’en fera rien, quia eum corrigi nolle perspeximus. Anatolios, en effet, ne vient-il pas de pousser la présomption jusqu’à écrire aux évêques del’Illyricum oriental pour leur demander ut sibi subscriberent ? On peut penser qu’il s’agissait de souscrire le 28e canon de Chalcédoine. Tillemont, t. xv, p. 729.

Sur la fin de 453, l’excellent empereur Marcien intercède à Rome en faveur d’Anatolios. Le pape répond, 9 mars 454, Jaffé, n. 504, qu’il ne veut pas résister aux instances de l’empereur. Il oubliera qu’Anatolios n’a pas répondu aux réclamations de Rome concernant Aétios et André, mais il exige qu’Anatolios satisfaciat canonibus, qu’il désavoue toute ambition coupable. Que la paix se fasse in qua simul studebimus et catholicam fidem et Nicœnorum canonum décréta servare. Marcien aidant, Anatolios envoya à Rome une lettre maussade de soumission, Inter S. Léon. Epist., cxxxii, et le 29 mai 454, saint Léon lui répondit sans grande chaleur pour l’assurer de sa réconciliation, et non sans lui rappeler le respect des canons de Nicée : Nicœnorum canonum universalis Ecclesiæ pacem servantia décréta custodias. Jaffé, n. 509.

Constantinople rejeta-t-elle le 28° canon ? C’est bien douteux. Dans une lettre du pape à Julien de Kos, 9 janvier 454, Jaffé, n. 503, on voit que la lettre du pape au concile (celle du 21 mars 453) a été lue à Constantinople en présence d’évêques et devant le clergé, mais on n’a lu que ce qui s’y rapportait à la foi, et l’on n"a rien lu de ce qui concernait l’ambition d’Anatolios. Tillemont dit sagement : « Ce qui paroist certain, c’est que, soit qu’Anatole se soit désisté du canon de Calcédoine, soit qu’il ait prétendu le maintenir, soit que Marcien ait aboli le mesme Canon par une loy de 454, comme le veut Baronius, soit que cette pensée soit sans fondement, ce canon subsista, et fut exécuté, malgré l’opposition de saint Léon et de ses successeurs, parce que les empereurs l’appuyoient… L’évêque de Constantinople conserva toujours la préséance sur Alexandrie et Antioche, et exerça une grande jurisdiction sur l’Asie, le Pont, et la Thrace. » Mémoires, t. xv, p. 730, Mais rien de tout cela n’affectait le privilège apostolique de Rome, sauf en temps de schisme. Sur les vicissitudes du 28° canon, après saint Léon, voyez la note de A. Fortescue, dans J. Maspero, Histoire des patriarches d’Alexandrie, 1923, p. 270-271.

V. Les dernières années de saint Léon. - — 1° L’Orient après Chalcédoine sous Marcien.

La sollicitude

de saint Léon à maintenir l’orthodoxie et l’ordre en Orient, par l’intermédiaire de Julien de Kos et avec le concours de l’empereur Marcien, allait être mise avant longtemps à de rudes épreuves. On en peut juger par les lettres que le pape écrit à Julien de Kos. Le 25 novembre 452, Jaffé, n. 486, le pape gémit des graves nouvelles que Julien lui a données de la Palestine, qui est mise sens dessus dessous par une jacquerie de moines eutychiens.Sur ces troubles, voir Duchesne, Hist anc, t. iii, p. 467-473.

Je n’ignore pas, écrit saint Léon à Julien, ce que l’on doit de charité et d’encouragement aux vrais et saints moines, mais les moines orgueilleux et agités qui méprisent les évêques ne sont que des soldats de l’Antéchrist. Que Julien agisse auprès de Marcien en vue de mettre la main sur les auteurs responsables de ces séditions, et en vue de soutenir l’évêque de Jérusalem, Juvénal, chassé de son siège par ces fanatiques. Que Julien écrive à Rome plus souvent encore pour tenir Léon au courant des événements.

Le Il mars 453, Jaffé, n. 489, saint Léon écrit à Julien qu’il n’a pas de nouvelles de la sédition des moines de Palestine, et qu’il ne sait pas exactement pourquoi ils sont en discorde avec Juvénal : Unde cupio me super his plenius edoceri, ut etiam talium correctioni congrue studeatur. C’est bien la preuve que Juvénal, qui s’est réfugié à Constantinople, n’a pas cru nécessaire de saisir saint Léon de ses difficultés.

Le 21 mars suivant, JaiTé, n. 493, saint Léon se réjouit de voir sa sollicitude si bien aidée par Julien, et quel secours puissant le Seigneur a préparé à l’Église universelle dans la piété de Marcien. Il se félicite de l’édit de Marcien contre les moines insensés (de Palestine ) et de la réponse de Pulchérie blâmant les supérieurs de leurs monastères. Marcien a fait suggérer secrètement au pape d’écrire à l’impératrice Eudocie, veuve de Théodose II, qui vit retirée à Jérusalem et brouillée avec la cour de Constantinople : on espère que Léon pourra la détacher du parti des moines eutychiens en révolte. Fcci quod voluit, annonce le pape à Julien. Le pape a obtenu de l’empereur Valentinien III, gendre d’Eudocie, qu’il écrive aussi à la princesse sur le même sujet. Il compte apprendre par Julien quel effet aura produit cette intervention en Palestine et si la rébellion s’apaise. Si ces moines en révolte contre le concile de Chalcédoine ont le front de mettre en doute la doctrine de Léon, qu’ils ne rejettent pas du moins celle d’Athanase, de Théophile, de Cyrille, avec qui Léon est bien assuré d’être unanime. Voir sur cette même affaire des troubles suscités par les moines eutychiens de Palestine, la lettre de saint Léon à Eudocie, 15 juin 453, la lettre du même aux dits moines, même temps, la lettre du même à Marcien, 9 janvier 454, la lettre du même à Julien de Kos, même date. Jaffé, n. 499, 500, 502, 503.

Le 2 avril 453, Jaffé, n. 494, saint Léon répond aux alarmes que les hérétiques inspirent à Julien de Kos. Il ne faut pas que per desidiam nostram ulla pars Ecclesise catholicæ neglecta videatur. Le concile de Chalcédoine a condamné l’impiété hérétique de Nestorius et d’Eutychès : le bras séculier doit maintenant réprimer les perturbateurs de la paix ecclésiastique et les ennemis de la république. Nous avions vu déjà saint Léon faire appel au prince chrétien pour la répression des manichéens. Ici il réclame toute la sévérité du prince : il veut une inquisitio judiciaria, il veut que l’on procède sans pitié, mais que l’on ne verse pas de sang, ut (imperator) et disciplina inquietos revocari, et a sanguine eorum jubeat abstineri, d’une part, action de l’imperialis potestas qui doit tumultus publicos ac seditiones sacrilegas seuerius coercere : d’autre part, action de l’auctoritas sacerdotalis, qui dans le cas présent doit retirer aux moines la faculté de prêcher contre la foi et de rien entreprendre sur l’autorité des évêques. Ainsi, le pape a appris que Thalassios évêque de Césarée de Cappadoce a permis d’écrire et de prêcher à un certain Georges, qui était moine et qui ne l’est plus. Si Julien de Kos le juge opportun, « nous écrirons d’ici à cet évêque ». On peut penser que ce Georges avait été dénoncé à Rome : le pape était tout prêt à écrire une lettre de monition à l’évêque de Césarée. Julien de Kos apparemment dut